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Affinités musicales

Paris
Salle Pleyel
05/25/2011 -  et 28 mai 2011 (Wien)
Johannes Brahms : Concerto pour piano et orchestre n° 2 en si bémol majeur, opus 83
Antonín Dvorák : Symphonie n° 7 en ré mineur, opus 70

Leif Ove Andsnes (piano)
Orchestre de Paris, Paavo Järvi (direction)


L. O. Andsnes (© Sheila Rock/EMI Classics)


Le concert de ce soir, rapprochant deux compositeurs célèbres, est avant tout, au-delà d’une simple association d’œuvres, le souvenir d’une sincère amitié, Johannes Brahms (1833-1897) ayant en effet longtemps pris Antonín Dvorák (1841-1904) sous son aile. N’écrivait-il pas, par exemple, au célèbre éditeur Fritz Simrock: «Dvorák écrit tout: opéras, symphonies, quatuors, pièces pour pano. C’est sans aucun doute un homme de très grand talent. Et pauvre! Je vous prie de penser à tout cela»?


Honneur donc au protecteur dont l’Orchestre de Paris donnait le Second Concerto pour piano (1881), œuvre riche de quatre mouvements et qui, contrairement au Premier (1859), fut applaudie et saluée dès sa création. Comme à son habitude, son visage ne trahissant la moindre émotion, Leif Ove Andsnes gagne rapidement son siège pour interpréter une œuvre qu’il connaît parfaitement pour l’avoir, ces derniers temps, jouée aussi bien sous la baguette de Mariss Jansons (avec le Concertgebouw) que de Bernard Haitink (à la tête du Philharmonique de Berlin). Cela s’entend: du point de vue strictement technique, le pianiste norvégien n’a pas grand-chose à craindre mais, en revanche, il reste beaucoup trop sur la réserve comme il l’avait d’ailleurs montré il y a quelques mois dans Mozart. Même si son jeu fait preuve d’une nervosité de bon aloi (notamment dans le premier mouvement), on ne sent pas toujours cette pleine implication qui permet de prendre la partition à bras-le-corps, en la tourmentant au besoin, et qui rend ainsi pleinement justice à tous ses soubresauts. D’un tempérament proche de la timidité, Leif Ove Andsnes s’exprime ainsi beaucoup mieux dans le climat intimiste du troisième mouvement que dans les deux premiers où les débordements de la partition sont trop souvent gommés. Il faut dire que Paavo Järvi ne l’aide pas beaucoup. Même s’il dirige un très bel orchestre (le pupitre des cors doit être salué, emmené par la puissance d’André Cazalet, de même que la petite harmonie), on regrette un évident manque de volume chez les cordes et une certaine difficulté pour le chef estonien à conduire ces fins de mouvements dont on ne perçoit pas suffisamment les temps forts, ceux-ci s’achevant alors de façon quelque peu maladroite. Le caractère guilleret, voire nonchalant, du quatrième mouvement, est en revanche parfaitement rendu par un Leif Ove Andsnes décidément plus à l’aise dans les passages peu telluriques.


Ces dernières années, Paris aura entendu la Septième Symphonie d’Antonin Dvorák à de multiples reprises, que ce soit sous la baguette viennoise de Seiji Ozawa, sous la férule berlinoise de Sir Simon Rattle ou, plus récemment, sous la houlette italo-germanique de Riccardo Chailly, preuve que cette œuvre majestueuse fait depuis longtemps figure de morceau de choix pour les grandes phalanges et leurs directeurs musicaux. L’Orchestre de Paris, pour sa part, ne l’avait pas donnée depuis le mois de décembre 2000 (au cours de trois concerts dirigés par Zdeněk Mácal), n’ayant en revanche jamais perdu de vue l’œuvre concertante du compositeur tchèque, qu’il s’agisse de son Concerto pour piano ou, tout récemment, de son Second Concerto pour violoncelle. Brahmsienne dans son esprit mais regardant également vers Bruckner (la construction du premier mouvement est assez proche du premier mouvement de la Huitième du maître de Saint-Florian), c’est une symphonie qui dégage, comme souvent chez Dvorák (et ce, dès la Première), un climat de puissance violente mêlée à un lyrisme épanoui.


Or, là encore, Paavo Järvi tend à rester sur une tranquille réserve et à gommer un trop grand nombre d’aspérités: dès l’introduction du premier mouvement, le climat ne distille aucune inquiétude ni aucun véritable dramatisme ce qui, par contrecoup, ne permet pas aux bois d’exprimer le soudain soulagement. Certaines imperfections orchestrales (une subite accélération du pupitre de cors, quelques décalages entre instruments) ne contredisent tout de même pas la très bonne impression d’ensemble donnée par l’Orchestre de Paris qui, dans le deuxième mouvement, distille un climat empreint d’une très agréable quiétude incarnée par des clarinettes au sommet. En revanche, on reste peu convaincu par le pourtant magnifique Scherzo, dont l’atmosphère (assez proche du fameux «Furiant» de la Sixième) manque continuellement de violence et d’impétuosité. De même, le concert s’achève sur un quatrième mouvement en demi-teinte, aux transitions pas toujours très bien soignées, Paavo Järvi révélant une direction assez lourde en plusieurs occasions et ne lançant pas les musiciens dans cet élan que l’on pouvait pourtant être en droit d’attendre. C’est dommage car, comme le notait Johannes Brahms, parlant de Dvorák, «le bougre a plus d’idées que nous tous. Tout autre pourrait glaner dans ses déchets la matière à des thèmes principaux» (cité par Guy Erismann dans sa belle biographie du compositeur tchèque parue chez Fayard): ce concert ne lui aura rendu que très partiellement justice.


Le site de Leif Ove Andsnes



Sébastien Gauthier

 

 

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