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Tannhäuser rock'n'roll

Zurich
Opernhaus
01/30/2011 -  et 2, 6*, 10, 13, 17, 20, 26 février 2011
Richard Wagner: Tannhäuser

Alfred Muff (Hermann), Peter Seiffert*/Robert Dean Smith (Tannhäuser), Michael Volle (Wolfram von Eschenbach), Christoph Strehl (Walther von der Vogelweide), Valeriy Murga (Biterolf), Patrick Vogel (Heinrich der Schreiber), Andreas Hörl (Reinmar von Zweter), Nina Stemme (Elisabeth), Vesselina Kasarova (Venus), Camille Butcher (Ein junger Hirt)
Chœur et chœur supplémentaire de l'Opernhaus de Zurich, Jürg Hämmerli, Ernst Raffelsberger (direction), Orchestre de l'Opernhaus, Ingo Metzmacher (direction musicale)
Harry Kupfer (mise en scène), Hans Schavernoch (décors), Yan Tax (costumes), Jürgen Hoffmann (lumières), Timo Schlüssel, Peer Engelbracht, Christopher Lensing (vidéos), Philippe Egli (chorégraphie)


(© Suzanne Schwiertz)


Maître du Regietheater à l'allemande, avec plus de 200 mises en scène lyriques à son actif, Harry Kupfer ne laisse pas de surprendre, même si son légendaire sens de la provocation s'est quelque peu émoussé avec le temps. Il vient de signer sa première production à l'Opernhaus de Zurich, sa cinquième de Tannhäuser. Au centre du chef-d'œuvre de Wagner, il voit la condition de l'artiste, tiraillé en permanence entre sa personnalité et son talent d'une part, et les normes imposées par la société d'autre part. Un thème universel, toujours d'actualité, d'où l'idée de transposer le livret à notre époque. Ainsi, Tannhäuser est un chanteur rock, une guitare électrique à la main, rappelant Jimi Hendrix. L'acte de Vénus est situé dans un cabaret aux tons rouge vif, où le champagne coule à flots, où des strip-teaseuses n'en finissent pas de se trémousser et où les injections de drogue sont monnaie courante. Lorsque Tannhäuser s'enfuit, il retrouve le Landgraf et ses chevaliers – ici les musiciens de son groupe – en pleine partie de golf, comme il sied à la bonne société d'aujourd'hui. Le concours de chant du deuxième acte a lieu en public, devant les caméras de la télévision, allusion évidente à la Star Academy ou autre Nouvelle Star. Le dernier acte, qui marque le retour des pèlerins, se passe dans le hall d'une gare aux longues perspectives, Elisabeth attendant Tannhäuser prostrée sur un banc. Cette actualisation de l'ouvrage, pourtant plutôt cohérente et modérée dans son propos, a clairement divisé les esprits.


L'unanimité en revanche s'est faite sur le plan musical, tant ce Tannhäuser zurichois est une fête pour les oreilles. L'orchestre, en forme superlative, sonne comme on l'a rarement entendu ces derniers temps, avec des passages solo absolument remarquables, notamment de la clarinette et du cor anglais. Le chef Ingo Metzmacher n'a pas son pareil pour dynamiser les contrastes et jouer sur les couleurs, tout en privilégiant une transparence de musique de chambre. L'aspect dramatique de la partition est mise en avant, au détriment peut-être de la conception romantique, mais la tension ne faiblit jamais tout au long de la représentation. Le chœur livre, lui aussi, une prestation de premier ordre. De premier ordre, la distribution l'est aussi, avec à sa tête Nina Stemme en Elisabeth. La voix de la soprano suédoise est puissante, apparemment sans limite, et franchit sans peine le mur de l'orchestre pour se projeter souverainement dans la salle intimiste de l'Opernhaus; ce qui frappe cependant, c'est sa luminosité, son soyeux, sans aucun accent métallique, et sa flexibilité qui lui permet de se faire intensément lyrique, notamment dans la célèbre prière finale. On attendait avec appréhension les débuts de Vesselina Kasarova dans Wagner, mais sa prestation dissipe tous les doutes. Spécialiste il y a encore quelques années des rôles de travestis dans Mozart et Rossini, la mezzo bulgare peut désormais envisager des emplois beaucoup plus lourds. La voix, toujours chaude et sensuelle, s'est énormément développée, la prononciation allemande améliorée et on sent ici la chanteuse véritablement investie dans son personnage, jouant avec raffinement la carte de la séduction. Michael Volle est un Wolfram von Eschenbach idéal, alternant douceur et autorité. Seul le Tannhäuser de Peter Seiffert déçoit: le ténor allemand chante tout en force, avec pour résultat que la voix s'épuise rapidement et présente de nombreux signes de fatigue dès la fin du premier acte.



Claudio Poloni

 

 

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