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"…Parfois même à l'amour"

Paris
Opéra Bastille
04/08/1998 -  et 12, 18, 22, 25 et 29 avril, les 2 et 6 mai 1998
Alban Berg : Lulu
Anna-Katharina Behnke (Lulu), Julia Juon (Gräfin Geschwitz), Eirian James (eine Garderobiere/der Gymnasiast/ein Groom), Jean-Paul Muel (Der Medizinalrat/der Professor), Claude Pia (der Maler/der Neger) Wolfgang Schöne (Dr Schön/Jack), David Kuebler (Alwa), Carlos Feller (Schigolch), Günter von Kannen (der Tierbändiger/der Athlet)....
Dennis Russell Davies (direction)
Willy Decker (mise en scène), Wolfgang Gussmann (décors et costumes), Hans Toelstede (lumières)

Se plaçant dans l’optique de Franz Wedekind et de Karl Kraus, Willy Decker reprend l’idée selon laquelle Lulu est assassinée par la société qui ne peut se résoudre à considérer la femme autrement que comme une chose. Séductrice venimeuse et cruelle, Lolita, femme fatale, femme enfant, Lulu est l’objet de toutes les convoitises, de toutes les haines. Elle est aussi la victime de ceux qui la désirent, de ceux qui l’idolatrent et la méprisent par là-même. Victime d’un monde qui brule ses idoles. Ainsi, le metteur en scène place le coeur de sa scène , le coeur de l’action au milieu d’une arène. Le peuple, placé sur des gradins en arrière-scène, est spectateur et acteur. Il se fait miroir et loupe grossissante du microcosme qui entoure Lulu. Willy Decker souligne aussi à merveille l’idée de fantasme individuel devenant collectif. Par le biais d’un portrait emprunté à Magritte ("L’évidence éternelle"), il stigmatise la passion porté à une créature devenue icone, devenue objet. La multiplication des échelles et des portes figure par ailleurs les inombrables passserelles existantes entre univers privé et public.

La distribution, quant à elle, est en tout point digne d’éloge, surtout chez les femmes. Anna-Katharina Behnke campe une Lulu terriblement sensuelle. Elle possède un réel charisme, elle ondule, fluide et féline, attirant irrésistiblement les regards. La voix aussi est superbe avec un timbre proche de l’idéal pour le rôle. Pas un cri, pas une défaillance. Les aigus sont purs, tranchants et assurés, la projection sans faille. Julia Juon, fait de même des débuts remarqués à l’Opéra de Paris en incarnant une comtesse Geschwitz blessée et digne. Sombres et charnues ses sonorités ne peuvent laisser indifférent. Chez le hommes les rôles sont bien tenus, assurant un ensemble homogène et de qualité égale autant sur le plan musical que dramatique.

Au pupitre, Dennis Russell Davies manie avec assurance la partition sublime et accidentée de Berg. Très lyrique, sa direction emporte l’action dans un tourbillon sonore subtil et toujours inspiré. A l’écoute des chanteurs, il ne s’autorise l’épanouissement orchestral qu’au moment des interludes.

Ainsi, ce magnifique spectacle est totalement fidèle à Karl Kraus qui écrivait que "La femme est associée par son sexe à toutes les affaires que l’on traite en ce monde. Parfois même à l’amour."



Katia Choquer

 

 

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