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Quintessence

Paris
Hôtel national des Invalides
11/29/2010 -  
Ludwig van Beethoven : Quatuor n° 8, opus 59 n° 2
Suzanne Giraud : Assemblages
Wolfgang Amadeus Mozart : Quintette à deux altos n° 4, K. 516

Quatuor Tercea: Claire Bucelle, Anne Camillo (violon), Céline Tison (alto), Pauline Buet (violoncelle) – Lise Berthaud (alto)


Le Quatuor Tercea (© Philippe Bucelle)


ProQuartet poursuit sa saison aux Invalides avec un concert de son cycle «Jeunes talents et création»: dans ce copieux programme, les «jeunes talents» sont représentés par le Quatuor Tercea, formé en 2004 au Conservatoire de Lyon, et par Lise Berthaud (née en 1982), la «création» par Suzanne Giraud. Quatre plus un égalent cinq: si le quatuor est le genre roi de la musique de chambre, rien n’interdit, ainsi que le suggère finement Georges Zeisel dans son propos introductif, de considérer le quintette à cordes comme en étant, au sens propre, la quintessence: l’élément le plus subtil, résultant, selon les philosophes antiques, d’une cinquième distillation.


Les musiciennes du Quatuor Tercea ont bénéficié de l’enseignement du Quatuor Artemis à la Chapelle musicale Reine Elisabeth entre 2006 et 2009 et suivent le cursus professionnel de ProQuartet depuis 2008. Dans le Huitième Quatuor (1806) de Beethoven, le volontarisme, l’urgence même, et une excellente mise en place compensent quelques soucis de justesse, mais le Molto adagio manque encore un peu de caractère.


C’est déjà dans le cadre de ProQuartet qu’avait été créé voici plus de huit ans un premier quintette (pour guitare et quatuor à cordes) de Suzanne Giraud, Envoûtements V (voir ici). Son choix s’est porté cette fois-ci sur une formation beaucoup plus usuelle, illustrée notamment par Mozart: elle engage ainsi le dialogue avec l’un de ses compositeurs de prédilection – qui, comme elle et comme... Beethoven, tenait volontiers la partie d’alto au sein d’un quatuor – et va jusqu’à citer dans les dernières mesures de son œuvre le premier thème du Quintette en sol mineur (1787).


Commande de l’association Art, Culture et Tradition de Saint-Paul-de-Vence, Assemblages (2007) n’avait alors été présenté qu’en privé et il s’agissait donc en l’espèce de sa première audition publique. D’une durée de dix-sept minutes, la partition est structurée en quatre mouvements, dont le compositeur, au cours d’un «atelier» préliminaire d’un quart d’heure, décrit les principales caractéristiques, exemples à l’appui. «Forêt», sensiblement plus développé que les trois suivants, évoque le cheminement d’un personnage, incarné par un alto et accompagné d’une «idée fixe», confiée à l’autre alto; l’enchevêtrement «horizontal» de ces deux motifs alterne avec une écriture «verticale», harmonique, comme des «poteaux indicateurs» au fil du parcours. Le trajet des altos continue dans «Soulèvements», mais dans des «géographies volcaniques» figurées par de puissants dessins ascendants puis descendants. «Sables et rocs» suggère différents états d’une «géométrie minérale» se référant à la peinture de Mondrian, arêtes vives, strates mais aussi passages plus fluides et mouvants. Enfin, «Rebonds» comprend deux thèmes: une «histoire» qui se noue entre le violon et le violoncelle, soutenue par une formule d’accompagnement typiquement mozartienne, puis, après un pont en spectaculaires glissandi, un «fantôme de carillon de Westminster», pour se conclure autour de la citation du Quintette en sol mineur, comme une ébauche de son commencement.


Les principales constantes du style de Suzanne Giraud demeurent parfaitement identifiables – agencement méthodique, qualité de l’écriture pour les cordes, exigence esthétique, clarté de la pensée – mais dans un environnement de violence expressionniste, âpre et heurtée, tension incantatoire et brûlante à laquelle les Tercea et Lise Berthaud apportent toute leur force de conviction et qui ne laisse que peu de répit aux auditeurs.


C’est fort logiquement le Quintette de Mozart qui conclut la soirée. Lise Berthaud passe au premier alto et, bien qu’elle-même par ailleurs membre du Quatuor Orfeo, donne l’impression de ressortir un peu trop de l’ensemble – mais ce n’est ici que sa première rencontre avec le Quatuor Tercea. Vigoureuse et allante, exacerbant les ruptures et les silences, l’interprétation confère à ce quintette un caractère déjà beethovénien.


Le site de Suzanne Giraud



Simon Corley

 

 

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