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Une création accessible à toutes les oreilles

Zurich
Opernhaus
10/09/2010 -  et 14, 19, 23, 29, 31* octobre 2010, 6 novembre 2010
Marc-André Dalbavie: Gesualdo
Rod Gilfry (Carlo Gesualdo, prince de Venosa), Liliana Nikiteanu (Eleonora, son épouse), Benjamin Bernheim (Emmanuele, son fils), Marie-Adeline Henry (Polissena, femme d’Emmanuele), Konstantin Wolff (L’abbé), Jérôme Billy (Muzio Effrem, musicien), Hélène Couture (Francesca, paysanne), Gabriel Bermudez (Pietro, valet), Susanne Grobholz, Ilker Arcayürek, Shinya Kitajima, Patrick Vogel, Aaron Agulay, Thomas Tatzl (chanteurs de madrigaux)
Orchestre de l’Opernhaus de Zurich, Marc-André Dalbavie (direction musicale)
Moshe Leiser, Patrice Caurier (mise en scène), Christian Fenouillat (décors), Agostino Cavalca (costumes), Hans-Rudolf Kunz, Christophe Forey (lumières)


(© Hans Jörg Michel)


Enfin une création accessible à toutes les oreilles, susceptible d’attirer le grand public, et non pas uniquement une poignée de critiques férus de musique contemporaine. L’Opernhaus de Zurich a eu la main heureuse en commandant un opéra à Marc-André Dalbavie: Gesualdo est une réussite sur toute la ligne, alliant une partition d’une grande force dramatique et un livret à la poésie raffinée.


Carlo Gesualdo (1566-1613) est connu autant pour ses madrigaux (après une période d’oubli, sa musique a refait surface au début du XXe siècle, influençant notamment Stravinski) que pour les scandales qui ont émaillé son existence, plus particulièrement le double meurtre de sa première femme et de l’amant de celle-ci, pour lequel il n’a d’ailleurs jamais été condamné. Autres temps, autres mœurs. Quoi qu’il en soit, ce personnage au destin hors du commun a déjà inspiré plusieurs compositeurs, parmi lesquels Alfred Schnittke (Gesualdo, 1994) et Salvatore Sciarrino (Luci mie traditrici, 1996). Le Français Marc-André Dalbavie (né en 1961) et son librettiste, le romancier et essayiste Richard Millet, se sont intéressés non pas au double assassinat commis par Gesualdo, mais aux dernières années de la vie de celui-ci, lorsque, reclus dans son palais, en proie à ses obsessions, réalisant que même la musique ne lui permet plus de donner un sens à sa vie, il attend la mort en tyrannisant sa famille.


Premier ouvrage lyrique de Marc-André Dalbavie, Gesualdo a pour thème principal la solitude, solitude d’un homme admiré pour son art, mais sombrant dans la folie, «un trou noir qui dévore et détruit son entourage», pour reprendre les propos de Moshe Leiser, qui signe la mise en scène de la création zurichoise avec son partenaire Patrice Caurier. Gesualdo présente une narration linéaire classique, avec un livret aux accents poétiques et une musique le plus souvent tonale, où la tension ne se relâche jamais et où la déclamation occupe une place importante dans l’écriture vocale. Par ailleurs, Dalbavie, qui dirige lui-même sa partition, a intégré dans sa musique des madrigaux de Gesualdo, superbement interprétés par six chanteurs sur scène. Au final, l’ouvrage n’est pas sans rappeler Pelléas et Mélisande.


La création mondiale à Zurich a bénéficié du remarquable travail scénique réalisé par le tandem Patrice Caurier/Moshe Leiser, qui a mis l’accent sur la direction d’acteurs et la caractérisation des personnages, dans le beau décor intemporel et sombre de Christian Fenouillat, dans lequel les ombres jouent un rôle important. Le plateau vocal, d’un excellent niveau, est dominé par le Gesualdo à la fois torturé et despotique de Rod Gilfry, une incarnation forte à peine diminuée toutefois par des craquements dans la voix clairement perceptibles tout au long de la représentation. Dans les rôles respectifs de la servante sensuelle et de l’épouse austère et mortifiée, Hélène Couture et Liliana Nikiteanu sont tout aussi exemplaires. A cela s’ajoute un très bon français de la part de chacun des solistes. On attend désormais avec impatience une reprise ailleurs, notamment en France.



Claudio Poloni

 

 

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