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Musique au vert

Millau
Eglise de Sainte-Eulalie de Cernon
08/05/2010 -  
Johannes Ciconia : Le ray au soleyl – Una panthera
Joël Merah : Epitaphes 3, 12 et 14 (création)
Arvo Pärt : Spiegel im Spiegel
Franz Schubert : Sonate pour piano n° 23, D. 960: Andante sostenuto – Quatuor n° 14 «Der Tod und das Mädchen», K. 810

Erica Brookhyser (mezzo), Christoph Sökler (baryton), Yura Lee (alto), Blaise Déjardin (violoncelle), Jean-Sébastien Dureau (piano), Quatuor Elias: Sara Bitlloch, Donald Grant (violon), Martin Saving (alto), Marie Bitlloch (violoncelle)




Chaque festival possède son caractère, à des degrés divers, mais celui du Larzac n’en manque pas! Il le doit bien entendu à une région magnifique, bien éloignée des clichés – agitation antimilitaire des années 1970, leaders paysans à la forte moustache «démontant» joyeusement des fast foods yankees et faucheurs de plants d’OGM, étendues désertiques livrées à une poignée de babas cool post-soixante-huitards éleveurs de moutons et producteurs de roquefort. Mais ce sont avant tout ses fondateurs trentenaires qui insufflent un esprit particulier à cette manifestation: deux directeurs artistiques, les pianistes Jean-Sébastien Dureau et Vincent Planès, et une directrice, Julie Pelat, monteuse pour le cinéma «dans le civil», qui retrouve ainsi ses racines familiales. Car il s’agit, bien plus que d’un festival de musique de chambre, de «rencontres», celles d’une vingtaine de jeunes musiciens, en deux vagues d’une semaine chacune, dans le confort quasi monacal de la bergerie de Louradou, à 700 mètres d’altitude, entre les vallées du Cernon et de la Sorgues, au cœur du parc naturel régional des Grands Causses: un phalanstère musical qui leur offre l’occasion de faire réellement connaissance, de travailler ensemble de manière approfondie, mais aussi d’entreprendre une sorte de retraite spirituelle, loin de tout mais avec des horizons à perte de vue.


Pour le public, la partie émergée de l’iceberg consiste, du 2 au 14 août, en huit concerts, dont la moitié se tient en l’abbatiale de Nant, à Millau et à La Cavalerie. Mais on comprend aisément que les organisateurs aient d’emblée installé leur «quartier général» à Sainte-Eulalie-de-Cernon, où prennent place les quatre autres concerts: non seulement le village, commanderie des Templiers remise, à la dissolution de l’ordre (1312), entre les mains des Hospitaliers de saint Jean de Jérusalem jusqu’à la Révolution, offre un cadre privilégié, mais sa petite église se caractérise en outre par un immense et rare mérite pour un édifice religieux, celui d’une acoustique naturelle et peu réverbérée.


A mi-parcours de cette de cette sixième édition, la première partie du programme intitulé «La Jeune fille et la Mort» est consacrée à une création de Joël Merah (né en 1969), qui est cette année le compositeur en résidence. Exposant sa démarche aux spectateurs, il indique avoir pour projet de mettre en musique les quatorze Epitaphes de Fernando Pessoa (1888-1935). Pour l’heure, il en a écrit trois, pour mezzo, baryton, sextuor à cordes et piano, d’une durée de moins de dix minutes – on a toutefois l’impression qu’il y en a même quatre. En tout état de cause, il les insère dans un déroulement soigneusement choisi, entre plusieurs pièces d’époques très diverses, conformément au souci exprimé par Vincent Planès de sortir les artistes contemporains de leur ghetto: deux pages du Liégeois Johannes Ciconia (vers 1370-1412), représentant de l’ars subtilior, arrangées par ses soins, mais aussi Miroir dans le miroir (1978) de Pärt joué depuis le fond de l’église, tandis que les deux dernières Epitaphes s’enchaînent directement avec le mouvement lent de la Vingt-troisième sonate pour piano (1828) de Schubert. Les textes – chantés ou non – de l’écrivain portugais sont projetés sur un voile clair tendu au-dessus du chœur, à la fois dans leur version originale (anglaise) et dans leur traduction française. Le tout forme un ensemble de trois quarts d’heure qui ne met pas nécessairement en valeur l’œuvre du compositeur français, bien chantée par la mezzo américaine Erica Brookhyser, mais plombée par les dix minutes soporifiques de Pärt qui, entre dépouillement expressif et escroquerie esthétique, paraissent durer une éternité.


Après l’entracte, le Quatorzième quatuor «La Jeune fille et la Mort» (1824) de Schubert vient d’autant plus naturellement que la dernière Epitaphe de Merah faisait référence à une adolescente de quatorze ans. Le Quatuor Elias en donne une interprétation très forte, engagée en même temps que rigoureuse, entière mais pas à l’emporte-pièce, avec les tripes mais aussi avec la tête, trouvant sans cesse de nouvelles réserves d’énergie: malgré quelques maniérismes et imprécisions du premier violon, la hargne, la tension et l’urgence ne remettent en cause ni le soin apporté à la sonorité, ni la remarquable cohésion de cette formation britannique associant... deux (sœurs) françaises violoniste et violoncelliste, un violoniste écossais et un altiste suédois.


Le site du festival et des rencontres de musique de chambre du Larzac
Le site de Sainte-Eulalie-de-Cernon
Le site du Quatuor Elias
Le site d’Erica Brookhyser
Le site d’Arvo Pärt



Simon Corley

 

 

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