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Pari gagné Lille Opéra 05/11/2010 - et 14, 17, 19, 22, 25, 27, 30* mai, 1er, 4 juin (Lille), 12, 14, 17, 19 octobre (Caen) 2010 Georges Bizet : Carmen Stéphanie d’Oustrac (Carmen), Gordon Gietz (Don José), Olga Pasichnyk (Micaëla), Jean-Luc Ballestra (Escamillo), Eduarda Melo (Frasquita), Sarah Jouffroy (Mercédès), Renaud Delaigue (Zuniga), Régis Mengus (Moralès), Loïc Félix (Le Dancaïre), Raphaël Brémard (Le Remendado), Christophe Ratandra (Lillas Pastia)
Chœur maîtrisien du Conservatoire de Wasquehal, Pascale Diéval-Wils (direction), Chœur de l’Opéra de Lille, Yves Parmentier (chef de chœur), Orchestre national de Lille, Jean-Claude Casadesus*/Nicolas Krüger (direction)
Jean-François Sivadier (mise en scène), Alexandre de Dardel (décors), Virginie Gervaise (costumes), Philippe Berthomé (lumières), Johanne Saunier (chorégraphie)
(© Frédéric Iovino)
L’Opéra de Lille a beaucoup misé sur cette nouvelle Carmen coproduite avec le Théâtre de Caen : dix représentations, soit plus que d’habitude, possibilité de suivre la représentation du 14 mai sur grand écran à Lille, Arras, Dunkerque et Valenciennes ainsi que sur France Inter et le site internet de France 3 Nord-Pas de Calais, et valeurs sûres. Parmi celles-ci figure Jean-François Sivadier qui y a abordé l’opéra en 2004 avec Madame Butterfly, essai suivi de Wozzeck (2007) et de brillantes Noces de Figaro au début de la saison dernière.
Ce spectacle tout aussi prenant baigne dans le même esprit, reposant moins sur le visuel – décors constitués notamment de structures en bois mobiles et modulables – que sur le théâtre. Voilà un bel exemple de ce qui se fait de mieux avec des moyens somme toute réduits. Ce qui caractérise Carmen s’y retrouve, en particulier grâce à des lumières chaudes d’Espagne et des costumes plutôt d’époque bien que les enfants du Chœur maîtrisien du Conservatoire de Wasquehal semblent sortir tout droit d’un établissement scolaire. Le metteur en scène gère l’espace et le temps avec lisibilité, imagination et bon sens, sans recourir à des options radicales ou ni brouiller les pistes. Un divertissement qui tient la route, grand public – sans que cela doive être pris dans un sens péjoratif – et idéal pour qui souhaite découvrir le chef-d’œuvre de Bizet sans risquer de tomber dans la caricature.
(© Frédéric Iovino)
Caricatural : qui oserait qualifier de la sorte la Carmen de Stéphanie d’Oustrac qui l’incarne avec assurance pour la première fois ? Cette mezzo-soprano qui compte, actuellement, dans le paysage lyrique français en possède les moyens (timbre, diction, chant cambré) mais également la sensualité, le sex appeal et, détail crucial, le regard brûlant. Voix quelque peu anonyme mais endurante et correctement menée, Gordon Gietz cerne son Don José avec acuité. Olga Pasichnyk compose, comme il se doit, une Micaëla très « fille à marier » et déploie une ligne vocale certes peu puissante mais finement ornée tandis que l’Escamillo vaniteux et viril de Jean-Luc Ballestra s’impose davantage dans la seconde partie.
La réussite d’une distribution repose également sur les rôles secondaires, tous tenus sans faiblesse par de jeunes artistes, à commencer par le fier Zuniga de Renaud Delaigue, les Frasquita et Mercédès sucrées d’Eduarda Melo et Sarah Jouffroy, le Moralès de Régis Mengus ainsi que les amusants Dancaïre de Loïc Félix, Remendado de Raphaël Brémard et Lillas Pastia de Christophe Ratandra. Autre valeur sûre, et toujours aussi fringant, Jean-Claude Casadesus officie à la tête d’un Orchestre national de Lille bien éveillé. Sa direction s’avère néanmoins presque trop civilisée, cette musique supportant sans peine davantage d’exaltation, mais elle prend garde à la transparence et à l’équilibre avec le plateau sur lequel évolue un Chœur de l’Opéra de Lille en bonne forme.
Sébastien Foucart
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