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Cendrillon sur Broadway Montreal Salle Wilfrid-Pelletier 05/22/2010 - et 26, 29, 31 mai, 3 juin 2010 Jules Massenet: Cendrillon
Julie Boulianne (Cendrillon), Noëlla Huet (Madame de la Haltière), Marianne Lambert (La Fée), Caroline Bleau (Noémie), Mireille Lebel (Dorothée), Frédéric Antoun (Le Prince Charmant), Gaétan Laperrière (Pandolfe), Sébastien Ouellet (Le Roi), Roy del Valle (Le Surintendant des plaisirs), Pierre Rancourt (Le Premier Ministre)
Chœur de l’Opéra de Montréal, Claude Webster (chef de chœur), Orchestre Métropolitain, Jean-Yves Ossonce (direction musicale)
Renaud Doucet (mise en scène et chorégraphie), André Barbe (décors et costumes), Guy Simard (lumières)
(© Yves Renaud)
«30 ans et encore l’enchantement», tel est le slogan adopté par l’Opéra de Montréal pour sa trentième saison. Le moins qu’on puisse dire, c’est que l’enchantement promis est au rendez-vous avec une superbe Cendrillon qui termine en beauté cette saison-anniversaire. Fondée en 1980, la compagnie affiche bon an mal an 5 productions et se veut un tremplin pour les jeunes artistes du cru (ainsi la distribution réunie pour le chef-d’œuvre de Massenet est-elle 100% canadienne), avec çà et là l’engagement de chanteurs étrangers expérimentés devant servir de modèles à la relève du pays. Il y a encore quelques années, 7 spectacles étaient affichés par saison, mais d’importants déficits ont saigné l'institution, qui a dû réduire quelque peu la voilure. Les représentations sont données dans l’immense salle Wilfrid-Pelletier (près de 3000 places), à l’acoustique plutôt ingrate: aux derniers rangs du parterre en effet, il faut parfois tendre l’oreille pour entendre les musiciens et les chanteurs.
Créée en 2003 à l’Opéra National du Rhin, la Cendrillon conçue par Renaud Doucet a notamment été reprise à Karlsruhe et à Marseille l’année dernière (lire ici) avant d’atterrir à Montréal. Le metteur en scène a eu l’heureuse idée de transposer le conte de Perrault dans l’Amérique des années 1950, voyant l’intrigue comme une parabole du rêve américain caressé par les jeunes filles de l'époque: trouver le prince charmant, se marier et vivre heureux dans le confort de la société de consommation naissante, représentée par des appareils électroménagers géants et déformés (magnifiques décors d’André Barbe, qui signe également de somptueux costumes aux couleurs vives). Dans le programme, le metteur en scène se plaît à souligner que ces années-là sont, selon lui, la dernière époque romantique, où les jeunes filles pouvaient encore rêver de devenir princesses et pour certaines - on pense bien évidemment à Grace Kelly - voir leur rêve se réaliser. La TV faisait ses premiers pas, et pour bien souligner qu'on est au cinéma, des figurants vont jusqu’à offrir du pop-corn au public! Le spectacle, jalonné de trouvailles les unes plus drôles que les autres, ne connaît aucun mort; l’action se déroule avec tellement de bonhomie, d’entrain et d’énergie qu’on pense immanquablement à Broadway et à ses célèbres comédies musicales. Face à un tel tourbillon scénique, véritable régal pour les yeux, il est difficile de prêter toute l'attention requise à l’orchestre, placé sous la direction de Jean-Yves Ossonce. Mais on aurait tort de bouder son plaisir devant un spectacle aussi enlevé et inventif, et le public rit d’ailleurs aux éclats. Qui plus est, la distribution est parfaitement rodée et remarquablement homogène. Une mention particulière est à décerner à l’exquise Julie Boulianne, Cendrillon à la ligne de chant pure et expressive.
Claudio Poloni
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