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De la beauté

Madrid
Teatro Real, Salle Gayarre
05/06/2010 -  & 7, 8* mai 2010
Salvatore Sciarrino: Vanitas
Marisa Martins (Voix), Riccardo Bini (directeur musical et pianiste), Dragos Balan (violoncelle)
Tiziana Magris (costumes), Peter Van Praet (lumières), Celeste Carrasco (réalisation vidéo), Rita Cosentino (mise en scène et décors)


(© Javier del Real)


On s'est récemment réjoui de l’occasion donnée au public madrilène de voir et entendre l’opéra de Salvatore Sciarrino Luci mie traditrice en version de concert à l'Auditorium National, dans le cycle Musicadhoy, dans une superbe version scénique venue de Salzbourg et signée de Rebecca Horn, au Teatro de La Zarzuela, dans le cadre de Musicadhoy. La petite salle Gayarre du Teatro Real vient d'accueillir pendant trois jours une autre pièce de Sciarrino, Vanitas, d’une beauté également superbe. Sciarrino est un compositeur «post» avant-garde, mais qui très souvent va au-delà de l'avant-garde d’après-guerre. Sciarrino est né en 1947, c'est-à-dire qu'il est au moins vingt ans plus jeune que les avant-gardistes, entre Maderna et Stockhausen. Il excelle dans les gammes dynamiques inférieures, les chuchotements musicaux, et l’insistance sans condition minimale, sans pour autant que cela définisse sa poétique. Le monde poétique de Sciarrino est mystérieux, nuancé, suggestif, et au discours suspendu : un canto, ou un sospeso?
 

Le titre, Vanitas, et le sous-titre, Natura morte, rappellent le pessimisme du Baroque: Sic transit gloria mundi. La pièce est une séquence de chants écrits sur des textes anonymes par des auteurs et poètes du temps jadis. Sur scène, une mezzo soprano, un pianiste, un violoncelliste… C'est tout. Si les dispositifs sont minimaux, les idées, en revanche, ne le sont pas. L'œuvre n'est pas toute récente. Elle a été créée à Milan en 1981 à la Piccola Scala. Et pourtant sa fraîcheur reste intacte, inquiétante, émouvante, en dépit de ressources limitées.
 

Une rose est aussi valable qu’une madeleine pour réactiver une mémoire à la recherche du temps… perdu ou imaginé ? Un espace clos, une mémoire tourmentée; ce n’est pas de la nostalgie, mais plutôt un cauchemar. 
 

Une très belle mise en scène de Rita Cosentino (nouvelle production du Teatro Real), une chambre écornée, endommagée, deux portes, un miroir, un lavabo, des projections vidéo limitées, belles, frappantes. La sagesse théâtrale de l’Argentine Rita Cosentino se développe pleinement malgré des moyens très limités. Mais le talent, lui, semble sans limite. Avant tout, il y a la femme, la mezzo, seule, souffrante peut-être, malata di pasato, malata di poesia, malata del tempo…
 

La soprano argentine Marisa Martins est le protagoniste unique de cette beauté qui n’est petite que par sa durée (55 minutes: tout comme Oedipus Rex de Stravinski, après tout) et par ses moyens. Elle nous laisse en suspens, les textes ont peu d'importance, seulement validés en tant qu'accompagnement, semble-t-il, comme un prétexte pour le texte. Le chant est suspendu, et la chanteuse évolue jusqu'au mystère. Une artiste formidable, bien connue au Teatro Real, affrontant ici un public minoritaire, mais conquis. 
 

Accompagnée par Riccardo Bini et Dragos Balan dans la mise en scène de Cosentino, Marisa Martins remporte un grand succès dans cette petite salle que le Teatro Real utilise généralement pour des concerts de chambre, voire des films présentant les premières de la grande salle.



Santiago Martín Bermúdez

 

 

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