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Hystérie uniforme

Paris
Cité de la musique
04/08/2010 -  et 20 (Porto), 26, 27 (Strasbourg) septembre, 9 octobre (Saint-Quentin-en-Yvelines) 2008, 26, 27 février (Reims), 1er (Nîmes), 9 avril (Paris) 2010, mars-avril 2011 (Gennevilliers)
Wolfgang Mitterer : Massacre

Elizabeth Calleo (La duchesse de Guise), Valérie Philippin (Le roi de Navarre), Nora Petrocenko (La reine de Navarre, Catherine de Médicis), Jean-Paul Bonnevalle (Henri III), Lionel Peintre (Le Duc de Guise), Stéfany Ganachaud (danseuse)
Wolfgang Mitterer (électronique), Remix Ensemble: Angel Gimeno (violon), Trevor Mctait (alto), António Aguiar (contrebasse), Vitor J. Pereira (clarinette), Ricardo Matosinhos (cor), Simon Powell (trombone), Jonathan Ayerst (piano), Vitor Pinho (clavecin, piano numérique), Mário Texeira (percussions), Peter Rundel (direction musicale)
Ludovic Lagarde (mise en scène, scénographie), Marion Stoufflet (dramaturgie), Sébastien Michaud (scénographie, création lumières), David Bichindaritz et Jonathan Michel (création vidéo), Fanny Brouste (costumes)


(© Philippe Stimweiss)


Au lendemain de Dans la colonie pénitentiaire de Philip Glass à l’Athénée (voir ici), voici, dans le cadre du cycle «Multimédia et temps réel» à la Cité de la musique, Massacre (2003) de Wolfgang Mitterer (né en 1958): une durée d’un peu moins de 80 minutes, un spectacle en anglais, cinq chanteurs et une atmosphère morbide – les ressemblances s’arrêtent là.


Fruit d’une collaboration entre le compositeur autrichien et Stephan Müller, le livret adapte The Massacre at Paris, l’ultime tragédie de Christopher Marlowe (1564-1593). Le massacre en question, c’est celui de la saint Barthélémy (1572), mais les événements retracés dans la pièce vont bien au-delà, jusqu’à l’assassinat du duc de Guise (1588). Bref, l’actualité immédiate, ou presque, pour le génial enfant terrible du théâtre élisabéthain, peu avare de ces excès trash qui, avec une existence aussi courte que tumultueuse et l’hypothèse selon laquelle il aurait en réalité écrit une partie de l’œuvre dramatique et poétique de Shakespeare, en ont fait un mythe autant qu’un auteur. D’où, sans doute, ces références au monde moderne véhiculées par les images se succédant rapidement sur le grand écran installé en fond de scène.


Au-dessus, plus à l’avant, sept petits écrans servent essentiellement à projeter des instantanés saisis par un vidéaste en temps réel, juché sur un tabouret qui se déplace sur un rail sur toute la largeur de l’avant-scène. Silencieux, ses déplacements sont en outre à peine visibles, car l’ensemble du plateau est plongé dans un noir profond, d’où les protagonistes émergent, seuls ou en groupe, pour se planter face au public dans des costumes d’époque conçus par Fanny Brouste et dans des clairs-obscurs d’un grand raffinement signés Sébastien Michaud. Ce dernier réalise également la scénographie, en association avec le metteur en scène Ludovic Lagarde, qui avait revisité Roméo et Juliette de Dusapin à l’Opéra Comique voici tout juste deux ans (voir ici): hormis une épée, un crucifix ainsi que des visages grimés et grimaçants, cette production créée en septembre 2008 à Porto, puis présentée quelques jours plus tard à Musica et reprise ici par T&M d’Antoine Gindt, n’offre qu’un concept bien dans l’air du temps, où l’image prend le pas sur le décor, les accessoires et la direction d’acteurs.


Dans ces conditions, peu importe que l’action, divisée en dix-huit brèves sections, ne soit guère intelligible, malgré le surtitrage en français, ou, du moins, consiste davantage en une série de tableaux marquants qu’en une description raisonnée de ces heures sombres de l’Histoire de France: le symbole, l’épure, tendant vers l’oratorio, y compris au travers de la participation de la danseuse Stéfany Ganachaud, dont le corps sert d’exutoire à la violence des cinq protagonistes. Avec l’Ensemble Remix dirigé par Peter Rundel, ils viennent d’en effectuer un enregistrement qui sera publié chez Aeon: il y a tout lieu de s’en réjouir, car la performance vocale apparaît comme le meilleur atout de cet opéra.


Très tendue, usant (et abusant) des grands intervalles et des cris, l’écriture privilégie les aigus périlleux, pas seulement pour le colorature d’Elizabeth Calleo, mais aussi pour la soprano Valérie Philippin et la mezzo Nora Petrocenko. Chez les hommes, le contre-ténor Jean-Paul Bonnevalle est naturellement sollicité dans le haut de sa tessiture, mais même le baryton Lionel Peintre doit souvent chanter en fausset. Cet extrémisme trouve sa contrepartie dans un accompagnement instrumental très recherché: neuf musiciens, des sons électroniques et des influences très variées pour des bribes de citations, de brusques éclats, un discours pulvérisé, des mouches et moteurs spatialisés, un clavecin très sixties... Ne quittant que trop rarement ce registre à la fois hystérique et décalé, la musique suscite cependant paradoxalement une impression d’uniformité qui finit par atténuer l’impact et aseptiser la crudité du déferlement de haine dépeint par Marlowe.


Le site de Wolfgang Mitterer
Le site d’Elizabeth Calleo



Simon Corley

 

 

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