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Une féerie humoristique !

Marseille
Opéra
12/23/2009 -  et 27, 29, 31 décembre 2009, 3 janvier 2010
Jules Massenet: Cendrillon

Julie Boulianne (Cendrillon), Marie-Ange Todorovitch (Madame de la Haltière), Liliana Faraon (La Fée), Julie Mossay (Noémie), Diana Axentii (Dorothée), Frédéric Antoun (Le Prince Charmant), François Le Roux (Pandolfe), Christophe Fel (Le Roi), Patrick Delcour (Le Surintendant des plaisirs), François Castel (Le Premier Ministre)
Chœur de l’Opéra de Marseille, Pierre Iodice (chef de chœur), Orchestre de l’Opéra de Marseille Cyril Diederich (direction musicale)
Renaud Doucet (mise en scène et chorégraphie), André Barbe (décors et costumes), Guy Simard (lumières)


(© Christian Dresse)



Cendrillon de Massenet a été bien oublié, malgré le succès mondial connu à la suite de sa création en 1899, puisqu’il fut donné à Milan, La Nouvelle-Orléans, Buenos Aires, Chicago et New York dans les années qui suivirent. Exhumé en 1978 pour le seul enregistrement discographique intégral existant à ce jour, avec tout de même Frederica von Stade et Nicolai Gedda, il revient depuis timidement à l’affiche. C’est donc un événement rare auquel nous conviait l’Opéra de Marseille, en reprenant cette délicieuse production de l’Opéra de Montréal.


Le metteur en scène et chorégraphe Renaud Doucet et le concepteur des décors et costumes André Barbe ont décidé de ne pas tenter de restituer l’atmosphère de féerie soutenue par force machineries et trucages voulus par Massenet, et de transposer l’intrigue dans une ambiance de comédie musicale américaine des années 50, afin de manifester le paradoxe de ces mythes persistants de l’Amour Romantique et du Prince Charmant au milieu des sociétés démocratiques et matérialistes travaillées par la volonté d’émancipation des femmes.


Le premier acte se passe dans une cuisine, au milieu de gigantesques appareils électroménagers rose bonbon, avec des soubrettes tout aussi roses sur des fonds vert pomme. Cendrillon dort dans une cuisinière, la Fée sort d’un poste de télévision, assistée d’une cohorte de « Monsieur Propre » immaculés. Le bal de l’acte II se déroule dans une sorte de dancing cubain aux néons criards, où des ambassadeurs d’opérette s’acoquinent avec des mafiosos dans le jury d’un drolatique concours de miss s’exerçant à démontrer leur art des œufs en neige ou de l’emmaillotage des nourrissons ! Tous les décors et costumes font se rencontrer Walt Disney et Salvador Dalí dans une atmosphère surréaliste et onirique. Les symboles sont pertinents, et la mise en scène, toujours inventive, humoristique et rythmée, ne cesse de nous mener de surprises en amusements, voire en éclats de rire !


De fait, du point de vue théâtral, ce spectacle est un enchantement constant, d’autant que les lumières savent aussi s’estomper pour créer des moments de pure poésie, comme le rêve de Cendrillon. Néanmoins, son parti pris comique fait un peu passer l’émotion musicale au second plan. La partition de Massenet, certes agréablement troussée et fonctionnelle, ne retient pas toujours l’attention, concurrencée comme elle l’est ici par l’action scénique, hormis lors de quelques beaux moments lyriques, comme les duos d’amour, ou lors du sublime Intermezzo symphonique. Cyril Diedrich a mené ses troupes d’une manière habile et irréprochable. L’orchestre a semblé souvent un peu discret, mais on a pu le remarquer dans de touchants moments de délicatesse rêveuse, où il a fait « patte de velours » avec beaucoup de raffinement. En vérité, on éprouve l’envie de savoir ce que donnerait cette musique dans le cadre de la féerie plus conventionnelle rêvée par le compositeur, et sans être phagocytée par une scénographie essentiellement comique et très prenante.


Le plaisir fut néanmoins d’autant plus complet que la distribution vocale est apparue de bon niveau, avec des voix certes relativement menues, mais bien adaptées aux rôles et à la salle. On a pu goûter une prononciation et une diction impeccables de la part de tous les protagonistes, agrément rare que permet une équipe presque entièrement francophone. Dans le rôle-titre, la mezzo Julie Boulianne a imposé un timbre pur, quoiqu’un peu acide au début; faisant preuve d’une vraie musicalité, elle est apparue de plus en plus délicieuse, notamment dans ses pianissimos et ses sons filés. Sans déployer beaucoup de volume pour soutenir la ligne de chant, Liliana Faraon (La Fée) a néanmoins été fort séduisante tout au long, avec des vocalises colorature ravissantes. La mezzo Marie-Ange Todorovitch a campé une Madame de la Haltière (la méchante belle-mère !) impeccable, avec beaucoup d’abattage et d’effets comiques. Malgré une voix parfois un peu légère, le ténor Frédéric Antoun a chanté de manière fort élégante le rôle du Prince Charmant, et le baryton François Le Roux a réussi à procurer par son chant une véritable humanité à Pandolfe, le père aimant mais trop faible, malgré son abord et son accoutrement très hilarants. Tous les autres membres de la troupe se sont montrés à la hauteur, pour offrir aux spectateurs ce moment de délicieux enchantement qui convenait à merveille à l’esprit festif de Noël.



Philippe van den Bosch

 

 

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