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Greffe réussie

Paris
Athénée – Théâtre Louis-Jouvet
12/16/2009 -  et 1er (Besançon), 4 (La Rochelle), 8, 9, 10 (Brest), 18*, 19, 20, 22, 23, 26, 27, 29, 30, 31 décembre 2009, 2, 3 (Paris), 8, 9, 10 (Metz), 17 (Calais), 20 (Saint-Quentin), 22 (Arras), 24 (Beauvais), 31 (Lons-le-Saunier) janvier, 28 février (Boulogne-sur-Mer), 2 mars (Bourges) 2010, 5, 6 (Pantin), 8 (Reims), 11 (Compiègne), 13 (Chelles), 18, 19 (Charleroi), 25 (Le Vésinet) mars, 2 (Martigues), 8 (Provins), 12 (Quimper), 15, 16 (Alès), 20 (Thonon-les-Bains), 22 (Les Sables d'Olonne) avril, 10, 11 mai (Oullins) 2011
Claude Terrasse : Au temps des croisades (orchestration Thibault Perrine)
Gilles Bugeaud (Hippolyte), Olivier Dureuil*/Thomas Gornet (Patrick) Anne-Lise Faucon (Karine), Emmanuelle Goizé (Corinne), Olivier Hernandez (Thierry), Flannan Obé (Didier), Charlotte Saliou (Bertrade), Valérie Véril*/Frédérique Moreau de Bellaing (Une servante) Jacques Ville*/Jacques Gomez (Adalbert)
Boris Grelier (flûte), François Miquel (clarinette), Yannick Mariller (basson), Takénori Nemoto*/Pierre Rémondière (cor), Christophe Arnulf (percussions), Pablo Schatzman (violon), Laurent Camatte (alto), Annabelle Brey (violoncelle), Nicolas Crosse (contrebasse), Nicolas Ducloux (piano et chef de chant), Christophe Grapperon (direction musicale)
Philippe Nicolle (mise en scène), Sophie Deck (scénographie), Elisabeth de Sauverzac (costumes), Hervé Dilé (lumières et scénographie), Jean-Marc Hoolbecq (chorégraphie)


(© Elisabeth de Sauverzac)


Pas de fêtes de fin d’année à l’Athénée sans une nouvelle production de la compagnie «Les Brigands»: l’habitude s’en est prise – mais il n’y a rien de plus dangereux que l’habitude. Certes, d’Offenbach à Moïse Simons en passant par Delibes et Maurice Yvain, l’exploration de près d’un siècle de répertoire d’opérette et de comédie musicale a permis jusqu’à présent de limiter le risque d’essoufflement. Mais rien de tel, pour se renouveler et continuer d’aller de l’avant, que du sang neuf, et plus spécialement celui du théâtre de rue, apporté par «La compagnie 26000 couverts».


C’est donc son cofondateur et directeur artistique, Philippe Nicolle, qui met en scène Au temps des croisades (1901), devenu, après un détour par Liège en 1902 pour cause de censure, Péché véniel (1903). Pour cet opéra-bouffe en un acte, Claude Terrasse (1867-1923), beau-frère du peintre Pierre Bonnard et auteur de la musique de scène d’Ubu Roi quelques années plus tôt, inaugurait sa collaboration avec Franc-Nohain (1872-1934), connu pour avoir signé le livret de L’Heure espagnole de Ravel.


De Terrasse, plus célèbre pour La Fille du scaphandrier, également sur des paroles de Franc-Nohain, et, surtout, Le Sire de Vergy, «Les Brigands» ont déjà présenté en 2006 Chonchette (voir ici), dont on retrouve ici la finesse d’écriture. Mais autant cette saynète avait pu paraître gnangnan, autant le récit, dans un XIVe siècle de pacotille, des conséquences sur son épouse et ses chambrières du départ du seigneur pour la croisade laissent libre cours, de droit de cuissage en ceintures de chasteté, à un texte truffé de sous-entendus grivois et à des situations délicieusement lestes.


Co-inventeur, voici quelques années, de la «manif de droite» aux slogans absurdes, Philippe Nicolle a donc de quoi s’en donner ici à cœur joie, dans un esprit potache et déjanté tenant à la fois des Marx Brothers, de Hellzapoppin, des Monty Python, des Deschiens ou même, contexte «historique» oblige, des Visiteurs. Coq-à-l’âne, faux incidents, pseudo-entracte en forme de happening: deux heures de délire sans interruption, fourmillant sans cesse d’idées, même après que le rideau est tombé. L’anachronisme est roi, tirant parti d’un double décalage chronologique: le Moyen-âge vu par la Belle Epoque, la Belle Epoque vue par la nôtre, d’autant que le texte aussi bien que la musique – telle cette apparition du thème de l’oiseau de Pierre et le loup, postérieur de près de quarante ans – ont été quelque peu actualisés.


Les costumes d’Elisabeth de Sauverzac illustrent le même principe, à la fois fidèles aux clichés médiévaux, jusqu’à la moindre poulaine et coupe de cheveux au bol comprise, mais enrichis d’écussons reproduisant des logos de grandes marques ou des panneaux australiens de signalisation routière. Quant au décor de Sophie Deck et Hervé Dilé, il assume de façon éhontée le carton-pâte dont il est fait et auquel les personnages ne font même pas semblant de croire. Le dispositif n’en est pas moins astucieux, en particulier une cheminée on ne peut plus factice qui devient écran de télévision ou toile sur laquelle sont projetées ombres chinoises. Les chorégraphies de Jean-Marc Hoolbecq cultivent un caractère grotesque et volontairement maladroit, dont l’effet hilarant est assuré.


Comme de coutume, la partition d’orchestre a été adaptée par Thibault Perrine pour un petit ensemble, en l’espèce dix musiciens installés sur le plateau, côté jardin, et dirigés au millimètre par Christophe Grapperon. Dix? Neuf et un, plus exactement, car le «musicien-bruiteur» Christophe Arnulf, évoquant le «récitativiste» des spectacles de Christoph Marthaler, ne se contente pas de son pupitre de percussions, mais imite cors de chasse, aboiements, miaulements et hennissements, ricane aux répliques des protagonistes et s’invite sur scène pour se mêler à l’action: illustration parmi tant d’autres de ce que la greffe entre les deux compagnies a parfaitement réussi.


Parmi les chanteurs et acteurs, également au nombre de neuf plus un, il y a d’abord évidemment les piliers des «Brigands»: Emmanuelle Goizé, toujours parfaite en Corinne, Gilles Bugeaud, toujours impayable en Hippolyte, mais vocalement moins sûr, et Olivier Hernandez en Thierry, grand dadais benêt. Il y a aussi les habitués, tels Flannan Obé, excellent Didier, et Anne-Lise Faucon, piquante Karine. Et puis, notamment grâce aux renforts des «26000 couverts», il faut bien sûr désormais compter avec des nouveaux: ils s’imposent bien davantage par leur vis comica que par leur voix, ce qui est plus gênant pour Charlotte Saliou, dans le rôle principal de Bertrade, que pour Valérie Véril, servante à laquelle il ne vaut mieux pas confier le soin de se laisser coiffer, et Jacques Ville, écuyer aussi fidèle que borné.


Le site de la compagnie «Les Brigands»
Le site de la compagnie «26000 couverts»
Un site consacré à Claude Terrasse



Simon Corley

 

 

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