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Voyage à l’ancienne Aix-en-Provence
Grand Théâtre de Provence
11/03/2009 - et 4 (Paris), 6 (Rennes) novembre 2009
Marc-Antoine Charpentier: Suite extraite de « Médée »
Henry Purcell: Suite extraite de « The Fairy Queen »
Antonio Vivaldi: Concerto pour cordes en ut mineur RV 119
Pietro Locatelli: Introduzione Teatrale en ré majeur
Johann Sebastian Bach: Cantate « Ich armer Mensch » BWV 55
Carl Philipp Emanuel Bach: Symphonie en sol, Wq. 183/4, H. 666
Orchestre français des jeunes baroque, Paul Agnew (chant et direction)
(© Agnès Mellon)
Constitué sur le même modèle que le déjà bien éprouvé Orchestre français des jeunes, son pendant « baroque » réunit les meilleurs diplômés des conservatoires français pour une session de travail annuelle, en résidence actuellement à Aix-en-Provence, sous la houlette cette fois du chef écossais Paul Agnew: bien que davantage connu dans le monde comme une des plus belles voix de haute-contre, la direction d’orchestre a été sa vocation première. Parmi plusieurs programmes préparés pour être donnés en tournée, celui proposé au Grand Théâtre brille par sa variété, puisqu’il ambitionne d’opérer un tour de l’Europe baroque sur une durée d’un siècle. Ce beau voyage a été présenté par Paul Agnew dans un français charmant, avec autant d’humour que de pédagogie.
La Suite de Médée, tirée du dernier opéra de Marc-Antoine Charpentier, avec ses pittoresques entrées et airs de démons ou de fantômes, puis sa grande Passacaille conclusive, fut dirigée avec beaucoup d’élégance. Néanmoins, l’effectif inhabituellement important de l’ensemble, avoisinant les quarante musiciens, ne se traduit pas par la puissance sonore escomptée. En outre, le nombre très élevé de violons par rapport aux autres instruments semble entrainer un déséquilibre sonore, avec un manque d’assise, les instruments graves paraissant peiner à s’épanouir dans l’acoustique un peu sèche du Grand Théâtre. De même les timbres savoureux des vents d’époque s’avéraient souvent trop discrets. Peut-être ces jeunes artistes ne bénéficient-ils pas en matière d’instruments anciens des meilleurs exemplaires, sans doute très onéreux. Pour autant, la Suite de The Fairy Queen de Purcell a exhalé sa poésie féerique. Le Concerto pour cordes de Vivaldi fut enlevé avec beaucoup d’entrain et de dynamisme dans ses mouvements extrême. En revanche, la volonté du chef de demander au premier violon d’improviser sur les quelques accords dépouillés du mouvement lent ne produisit pas un résultat très harmonieux.
Le sommet émotionnel du concert fut atteint lorsque Paul Agnew chanta tout en dirigeant la Cantate BWV 55, avec une expressivité poignante, sa voix subtile se mêlant amoureusement avec les instruments lors d’un poignant duo avec la flûte traversière en bois sur « Erbarme dich », et lors d’un merveilleux trio avec la flûte et le hautbois, tous impeccables.
La vaste Introduzione Teatrale en ré majeur de Locatelli est une œuvre riche et luxuriante, mais ses strates et sa complexité contrapuntique ont mis à mal la précision d’intonation des jeunes musiciens, qui ont manifestement encore besoin de s’aguerrir. Toutefois, d’une façon surprenante et quasi miraculeuse, en abordant le style classique de la Symphonie en sol majeur de C.P.E. Bach, l’orchestre s’est comme transmué, retrouvant soudain un équilibre, une homogénéité qui lui manquaient jusqu’à présent. Les violons nous ont alors ravi par une sonorité beaucoup plus fine et légère. Les musiciens semblaient prendre vraiment beaucoup de plaisir dans les mouvements vifs (comme le public !), en réussissant à restituer toute la grâce et le charme spirituel de ces pages typiques du genre galant, comme les accents plus sombres et expressifs de l’Adagio, de quoi faire oublier les quelques moments plus approximatifs de ce concert somme toute fort plaisant, qui montre une belle pépinière d’instrumentistes prometteurs.
Le site de l’Orchestre français des jeunes baroque
Philippe van den Bosch
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