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L’humeur noire de Beethoven

Paris
Salle Pleyel
05/18/1999 -  
Ludwig van Beethoven : 11 Bagatelles op. 119 ; 6 Bagatelles op. 126 ; 33 Variations sur un thème de Diabelli op. 120
Maurizio Pollini, (piano)

Devant d’abord être consacré aux trois dernières sonates de Schubert, le récital de Maurizio Pollini représentait une sorte de post-scriptum à l’intégrale des sonates de Beethoven donnée à Pleyel, il y a un ou deux ans. Le jeu de Pollini a changé, et sa clarté d’antan a laissé place à un jeu tout en contrastes, au niveau du tempo et de la dynamique. Ses basses et son medium sont magnifiques, mais ses aigus semblent parfois un peu courts dans les forte (il faut dire que l’extrême aigu du piano était désaccordé). Ses doigts sont toujours aussi sûrs. Les passages rapides sont souvent trop rapides, transformant la musique en brouillard sonore, dans lequel seule une bonne connaissance des oeuvres permet de reconnaître les notes. On peut le voir comme un travail sur la résonance, mais aussi comme un excès. Les passages lents sont en revanche expressifs et habités. Les 11 Bagatelles ne nous ont pas toujours convaincues, à cause d’une trop grande instabilité rythmique (peut être due au trac), qui empêchait la musique respirer. Les 6 Bagatelles étaient plus naturelles, même si Pollini ne se départit jamais d’une certaine raideur. Les Variations Diabelli étaient plus à la mesure du pianiste gargantuesque qu’a toujours été Pollini. Il ne nous a pas déçus. L’attitude de Pollini au piano (c’est-à-dire son ascétisme, sa manière de jouer sans chercher à séduire, comme si sa véritable peur n’était pas d’être face à une Salle Pleyel bondée mais plutôt de ne pas être à la hauteur de la musique) a fait merveille. On peut critiquer certains passages, trouver qu’il manque de souplesse, que certaines oppositions sont trop brutales, etc. Au final, ce ne sont que des broutilles. Car la musique était là. Jamais la tension ne baisse d’un iota. Au contraire, plus Beethoven que jamais, Pollini nous mène vers l’explosion, en refusant toute légèreté, tout sourire. Les dernières variations furent un sommet d’intériorité et d’expressivité, au point de nous donner le sentiment que tout a été dit, qu’il devenait impossible de continuer. En se levant, Pollini semble éprouvé par l’escalade. Il salue son public, mais on sent qu’il est (toujours) ailleurs.



Stéphan Vincent-Lancrin

 

 

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