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Plus humbles que fougueux

Paris
Amphithéâtre Bastille
04/25/2009 -  
Karol Szymanowski : Quatuors n°1, opus 37, et n°2, opus 56
Ludwig van Beethoven : Quatuor n°14 en ut dièse mineur, opus 131

Quatuor Gémeaux : Anne Schoenholtz, Manuel Oswald (violon), Sylvia Zucker (alto), Uli Witteler (violoncelle)


Le Quatuor Gémeaux


Jeune formation suisse, le Quatuor Gémeaux, déjà lauréat de plusieurs concours internationaux, a clos la série des concerts ProQuartet à l’Amphithéâtre Bastille. Commencer par les deux Quatuors de Szymanowski était une heureuse idée : on les entend rarement, surtout dans la même soirée. On voit ainsi que, même s’il n’y a rien de « national » dans le Premier, les deux se rejoignent par un souci commun de rigueur structurelle, une constante chez Szymanowski, grand admirateur du dernier Beethoven – ce qui légitime pleinement leur association dans le programme du Quatuor Gémeaux.


Composé en 1917, créé à Varsovie le 7 avril 1924 – et non pas le 10 mars, comme on le lit dans le programme, le Premier Quatuor donne l’occasion aux quatre instrumentistes de montrer dès le Lento assai-Allegro modertato initial à quel point ils maîtrisent la dynamique et sont en quête de sonorités raffinées, condition nécessaire pour rendre justice à l’univers du compositeur polonais, toujours soucieux de faire « sonner » ses œuvres. Ils n’oublient pas pour autant le lyrisme fiévreux non moins caractéristique de Szymanowski, notamment dans l’Andante semplice, dont le Lento assai exprime peut-être une nostalgie de cet impressionnisme capiteux dont il va bientôt prendre congé. Ce lyrisme, pourtant, semble parfois un peu trop intériorisé, de même que le Vivace final – le quatrième mouvement prévu n’a jamais vu le jour – reste trop sage, voire trop timide, pas assez « alla burlesca », alors que la polytonalité, par les dissonances qu’elle engendre, accentue l’ironie corrosive que Szymanowski met parfois dans sa musique.


Le Second Quatuor, de dix ans postérieur – et non pas de douze – au Premier, composé à Varsovie – et non pas hors de la Pologne, présente les mêmes qualités et les mêmes défauts. Le début du Moderato baigne dans un pianissimo extatique, avant de se hérisser de multiples contrastes, que les interprètes n’exacerbent pas trop, pour les intégrer à l’ensemble : quoi qu’ils jouent, le souci de la maîtrise de la forme constitue pour eux une priorité. Mais ils devraient, comme dans le finale du Premier Quatuor, sortir davantage de leur réserve lorsqu’ils jouent le Vivace scherzando, une des pages les plus mordantes, les plus rageuses presque, de Szymanowski ; cela dit, la justesse des accents, la précision de l’articulation attestent d’un travail très méticuleux sur la partition. La double fugue, servie par leur souci scrupuleux de la conduite des voix, n’appelle guère de réserves, avec, dans le Moderato, une belle progression vers le climax - le sujet initial ne peut venir du début de l’Etude en forme de vocalise, qui n’est pas « strictement contemporaine » mais légèrement postérieure.


Terminer par le Quatorzième Quatuor de Beethoven est audacieux de la part d’un jeune quatuor. Chez les Gémeaux, une sorte de réserve tempère toujours la fougue de la jeunesse : elle devient humilité devant un monument de l’histoire de la musique occidentale, qui parfois s’affadit ici plus qu’il ne s’épure. L’interprétation est soigneusement construite, avec un sens des enchaînements et de la forme, tout semblant converger vers l’Allegro final – on avait aussi cette impression dans le Second Quatuor de Szymanowski. C’est là que les tensions apparaissent enfin dans toute leur force, alors qu’on les cherchait en vain dans les autres mouvements, à commencer par la fugue initiale. Même si les variations de l’Andante ont un certain charme haydnien, si le Presto passe comme l’éclair, les Gémeaux ploient un peu sous le poids du monument. Il y en avait bien d’autres à visiter d’abord, notamment chez Beethoven. Quant à celui-ci, espérons que les auditeurs ne se sont pas perdus : cinq mouvements sur sept sont indiqués sur le programme, l’Andante, ma non troppo e molto cantabile des variations et l’Allegro final étant passés à la trappe.


Retour, pour le bis, à la source première : un Contrepoint de L’Art de la fugue de Bach.


Le site du Quatuor Gémeaux



Didier van Moere

 

 

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