About us / Contact

The Classical Music Network

Strasbourg

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Strasbourg
Palais de la Musique et des Congrès
12/18/2008 -  et le 19 décembre 2008*
Georg Friedrich Haendel : Concerto grosso en ré mineur N° 5 Op. 3
Josef Haydn : Concerto pour violoncelle Hob. VIIb. 1 en ut majeur
Ludwig van Beethoven : Symphonie N° 2 en ré majeur


Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Heinrich Schiff (violoncelle et direction)




La présence de l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg étant simultanément requise en fosse à l’Opéra du Rhin pour les représentations des Nozze di Figaro, c’est une formation inhabituelle que l’on peut découvrir à l’occasion de ce concert. La plupart des pupitres sont certes tenus par des membres titulaires, mais leur répartition différente et le nombre majoritaire de jeunes instrumentistes donne l’impression d’assister au concert d’un orchestre nouveau, voire d’une identité sonore particulière.


La présence au pupitre d’Heinrich Schiff, plus connu pour ses talents de concertiste que de chef d’orchestre, n’est pas non plus étrangère à ce changement de climat. Physique trapu voire arrondi, allure amusante de bon vivant en costume noir ample et gilet cramoisi, œil vif et apparente bonhomie complice : le public est d’emblée intrigué, et l’orchestre semble, lui, tout à fait captivé. Les tempi sont allants, les attaques franches, une intense vivacité est perceptible partout, et la Deuxième Symphonie de Beethoven, éternelle mal aimée des programmes de concert (on peut quand même se demander pourquoi) devient tout particulièrement vivante et attractive. Au prix certes de manques d’homogénéité, de couleurs parfois crues, voire de multiples imperfections, mais à aucun moment ces détails ne dérangent vraiment tant la vision d’ensemble et la sincérité d’une telle interprétation paraissent justes.


Parler d’imperfections à propos du Concerto pour violoncelle de Haydn relève en revanche de l’euphémisme. En même temps que sa partie soliste Heinrich Schiff dirige l’orchestre auquel il tourne le dos, et cette activité n’a rien de symbolique. Tous ces gestes en l’air et ces larges mouvements d’épaule sont certes précis, utiles, voire plutôt plaisants à regarder, mais ils requièrent une part importante de l’énergie et de l’attention que l'interprète devrait accorder en principe à son jeu. Et du moins en ce qui concerne l’exécution des soli et des cadences, on assiste davantage à une expérience jusqu’au-boutiste qu’à une prestation sécurisante. Mais là encore, tant pis, car si le soliste fonce à un train d’enfer (même assez nettement plus vite que l’orchestre sur certains traits) il garde miraculeusement le contrôle, et finalement tout passe et rien ne casse. Et si les détails n’y sont plus (sauf dans un bel Adagio, très bien chanté), tout est ce qui est essentiel est admirablement en place, voire ponctué avec une autorité qui coupe court à tout pinaillage. Très beau moment de recueillement aussi avec la Sarabande de la Deuxième Suite de Bach donnée en bis et écoutée dans un remarquable silence : un violoncelle ample, aux sonorités presque brahmsiennes mais dont les longues phrases semblent parfaitement équilibrées, sans jamais abuser d’appuis vigoureux, toujours remarquablement bien gérés.


Pourquoi pas, en entrée de concert, oser un Concerto grosso de Haendel, ce qui cale bien le programme sur l’ensemble d’un large XVIIIe siècle. Ces musiques baroques de grand format échappent de plus en plus au champ d’action de nos phalanges symphoniques, et on peut penser que c’est dommage. Cela dit, le résultat paraît quand même lourd, avec un effectif de cordes généreux qui noie les quelques lignes de vents au point de les faire oublier. Mais en guise d’entrée en matière dans un concert symphonique, ce genre d’absurdité musicologique (car c’en est bien une) doit pouvoir continuer à exister, sous peine de voir ces musiques définitivement enfermées dans des musées, à peine revisités de temps à autre par quelques formations spécialisées. Un grand merci à Monsieur Heinrich Schiff pour toutes ces prises de risque, et pour cette soirée d’une surprenante fraîcheur.



Laurent Barthel

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com