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L’arrangeur arrangé

Paris
Salle Pleyel
11/18/2008 -  
Maurice Ravel : Gaspard de la nuit (orchestration Marius Constant)
Modeste Moussorgski : Tableaux d’une exposition (orchestration Maurice Ravel)

Jean-Philippe Collard (piano)
Orchestre Colonne, Laurent Petitgirard (direction)


J.-P. Collard (© Stéphane de Bourgies)


Situation inhabituelle, et même incongrue: le piano est installé au milieu devant le podium du chef, comme de coutume pour un concerto, mais soliste et orchestre ne joueront jamais ensemble. Ce n’est pas d’une provocation à la Cage qu’il s’agit ici, mais d’une expérience déjà précédemment réalisée au disque que, par une initiative originale, l’Orchestre Colonne, pour sa troisième soirée d’abonnement de la saison, a voulu transposer au concert: permettre l’audition comparée de pages célèbres, dans leur version originale pour piano puis dans leur version orchestrée.


Regroupées au besoin par deux ou par trois, les dix pièces des Tableaux d’une exposition (1874) de Moussorgski alternent donc sous les doigts de Jean-Philippe Collard et sous la baguette de Laurent Petitgirard, bien sûr dans l’orchestration (1922) de Ravel. Avec une grande vivacité («Gnomus», «Tuileries») que ne laisse pas supposer sa fausse nonchalance, le pianiste engage dans certaines pièces («Promenades», «Bydlo», «Baba Yaga», «La Grande Porte de Kiev») un véritable corps-à-corps avec la musique: s’encourageant de la voix, il en sort le plus souvent victorieux. A l’orchestre également, ça passe plus souvent que ça ne casse, avec par exemple un tuba ténor superbe de justesse et de legato dans «Bydlo».


En première partie, l’arrangeur devenait l’arrangé, puisqu’étaient confrontées la version originale de Gaspard de la nuit (1908) et son orchestration (1990) par Marius Constant, créée et enregistrée en son temps par Petitgirard. Occasion aussi de faire apparaître les parentés entre ces deux œuvres d’inspiration extramusicale que sont Les Tableaux et Gaspard: notes répétées du «Vecchio castello» et du «Gibet», portraits fantastiques de «Gnomus» et «Scarbo», ...


Ravel a orchestré lui-même bon nombre de ses partitions, mais pas Gaspard, peut-être la plus «pianistique» qui soit. Le travail de Constant ne se montre guère plus ravélien que celui de Ravel n’était moussorgskien, malgré quelques réminiscences de timbres: flûte de Daphnis à la fin d’«Ondine», contrebasson du Concerto pour la main gauche au début de «Scarbo». Quant au fameux si bémol du «Gibet», il est confié, de façon assez prévisible, à une cloche tubulaire, parfois renforcée par une seconde cloche, mais bien que dépourvu de cette facilité descriptive, le piano est-il moins suggestif pour autant?


Collard demeure quant à lui fidèle à l’esprit de Ravel, d’un goût parfait, sans exagérer l’expression ni demeurer excessivement sur la réserve. Et l’on peut regretter que les récitals se fassent rares à Pleyel, car depuis l’inauguration de la nouvelle salle, l’instrument sonne magnifiquement, sauf peut-être, en raison de l’orientation du couvercle, pour les spectateurs des tribunes du chœur.


Associant enfin piano et orchestre à l’issue de ce copieux programme, le bis constitue avant tout un hommage à deux personnalités récemment disparues: celui de Jean-Philippe Collard à son maître Pierre Sancan et celui de Laurent Petitgirard à son confrère de l’Institut Serge Nigg. Plutôt qu’un extrait de l’une des versions pour piano et orchestre des Tableaux réalisées par Lawrence Leonard ou Emile Naoumoff, ce sera un Finale d’anthologie du Concerto en sol (1931) de Ravel, servi par des musiciens dispensant une belle énergie communicative.


Le site de l’Orchestre Colonne



Simon Corley

 

 

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