About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Présences japonaises

Paris
Cité de la musique
05/11/2008 -  
Akira Nishimura : Corps d’arc-en-ciel (création)
Jean-Luc Darbellay : Mégalithe (création française)
Jean-Louis Agobet : Sectio (création)
Pierre Boulez : Dérive 1
John Adams : Chamber symphony

Olivier Darbellay (cor)
Tokyo Sinfonietta, Yasuaki Itakura (direction)


Deux des quatre concerts du dernier week-end de «Présences 2007-2008» ont été confiés au Sinfonietta de Tokyo et à Yasuaki Itakura, son directeur musical. Si l’on peut vivement regretter le choix qui a été fait, tout au long de ces trois journées, d’installer les formations de plain-pied dans la grande salle, privant ainsi le parterre d’une visibilité satisfaisante, la venue de ce cousin de notre Intercontemporain, créé en 1994, a notamment permis de découvrir deux compositeurs japonais, au-delà des rares noms connus du public français: Toshi Ichiyanagi le samedi, Akira Nishimura (né en 1953) le dimanche. Celui-ci avait même réservé à ce concert parisien la création de Corps d’arc-en-ciel, qui trouve son inspiration dans la façon dont le bouddhisme tibétain décrit la transformation du corps en un «arc-en-ciel miroitant, qui s’élève vers le ciel et disparaît».


Cette transfiguration comprend une introduction et sept mouvements (enchaînés), représentant les couleurs de l’arc-en-ciel, mais aussi les «phases de la métamorphose du corps en lumière». Sans surprise, mais avec talent, Nishimura tire des seize musiciens des sonorités irisées. Gagnant en activité durant ces dix-sept minutes, le propos ne se complaît pas exclusivement dans la contemplation et, comme des trouées dans la brume, les textures parfois un peu confuses laissent la place à quelques soli (flûte, hautbois, harpe) dont le traitement évoque le timbre des instruments traditionnels japonais.


Jean-Luc Darbellay (né en 1946) fait fort justement observer que le cor «est très rarement utilisé en tant que soliste dans le répertoire contemporain». Mais il n’a sans doute pas encore été servi par une personnalité aussi forte et charismatique que ne le furent Mstislav Rostropovitch pour le violoncelle ou Maurice André pour la trompette. Le compositeur suisse, en tout cas, n’a pas eu à chercher bien loin sa motivation, puisque son fils est corniste solo à l’Orchestre symphonique de Berne et à l’Orchestre de chambre de Bâle.


Jean-Jacques Justafré a créé ses Echos pour cor obligé et orchestre au cours de l’étape montpelliéraine de Présences, en décembre dernier, mais c’était cette fois-ci la première présentation en France de Mégalithe (2001), un titre qui trouve son origine dans une commande du musée d’archéologie de Neuchâtel pour son inauguration, mais aussi dans le caractère de «l’instrument le plus ancien du monde, l’instrument magique, l’instrument qui ouvre des espaces (en plein air comme dans l’orchestre!), l’instrument naturel (le coquillage, l’arbre creux, l’algue australienne séchée), l’instrument vecteur de signaux sonores». Vingt minutes d’un seul tenant qui dissimulent en réalité la forme traditionnelle d’un concerto en trois mouvements: massif et tellurique; suspendu entre le frôlement des gongs et les trémolos des cordes; vif et violent, avec, comme il se doit, avant la coda, une longue cadence mettant en valeur les qualités d’Olivier Darbellay.


Comme Jean-Luc Darbellay, Jean-Louis Agobet a été programmé au cours de l’une des précédentes étapes de Présences, avec la création, en janvier à Toulouse, de son Exo pour deux sopranos et orchestre. Ecrite pour le Sinfonietta de Tokyo, Sectio se veut «une pièce d’ensemble à la manière d’une dédicace à chacun de ses membres»: entre une introduction et une séquence conclusive, se succèdent ainsi sans interruption quatorze petits concertos de moins d’une minute, soit un pour chacun des instrumentistes, au risque d’une agglomération décousue et fragmentée. De fait, certaines sections retiennent davantage l’attention – trompette en sourdine jazzy, cor lyrique, alto en pizzicati, violoncelle vindicatif, clarinette volubile – mais le compositeur entend également évoquer dans cette pièce une... agglomération, «Tokyo, ville composite, parfois labyrinthique, formée d’un assemblage de quartiers, qui s’entrecroisent et tous dotés d’une atmosphère unique».


Après ces créations données en présence de leur auteur, le Sinfonietta de Tokyo a souhaité, dans une seconde partie nettement plus brève, illustrer le «grand répertoire» contemporain et montrer son ouverture d’esprit en associant les contraires. Dans Dérive 1 (1984) de Boulez, la méticulosité des interprètes réussit sans doute mieux à la seconde partie qu’au raffinement extrême de la première.


Présences a offert aux auditeurs toulousains Harmonielehre d’Adams, dont une autre partition, la Symphonie de chambre (1992), entretient aussi des liens ambigus avec Schönberg: faisant appel à un effectif inspiré de la (première) Kammersymphonie, l’Américain superpose de façon provocatrice et agressive les débuts de la seconde Ecole de Vienne et l’esprit des dessins animés de Tex Avery. Plus rationnel que détraqué, le Sinfonietta de Tokyo semble trop appliqué pour rendre justice à l’humour et au swing des «Mongrel airs», mais la froideur des échos néoclassiques à la Hindemith de l’«Aria with walking bass» et la trépidation de «Road runner» lui conviennent bien mieux, couronnant un concert qui aura remporté tout au long un très vif succès public.


Le site de Jean-Luc Darbellay
Le site de Jean-Louis Agobet
Le site de John Adams



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com