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Les surprises brucknériennes de Riccardo Muti

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
04/10/2008 -  et 9 avril 2008 (Köln)
Joseph Haydn : Symphonie n°99 en mi bémol majeur
Anton Bruckner : Symphonie n°2 en ut mineur

Orchestre Philharmonique de Vienne, Riccardo Muti (direction)


Riccardo Muti a récemment abordé Haydn avec un National peu familier du compositeur autrichien (lire ici). La Philharmonie de Vienne, en revanche, le connaît par cœur : les choses vont de soi, le chef ayant juste à imprimer sa marque. Cette marque, c’est une élégance toute classique, sans surprise, où rien ne pèse ni ne pose. Les philologues, évidemment, s’ennuient. Les autres admirent la perfection un peu lisse de l’orchestre, l’équilibre de la direction. Le premier mouvement anticipe d’abord sur Beethoven, puis arbore un petit côté « gemütlich » bien dans l’esprit d’une certaine tradition viennoise, un peu à la Krips. Dans l’Adagio, Muti veille à galber les courbes, non sans dramatiser heureusement le discours dans la partie médiane. Ni trop lents ni trop rapides, le Menuet et le Finale sont vifs, policés, précis. Un Haydn traditionnel, parfaitement joué et dirigé, plus neutre cependant que celui de Mariss Jansons, qui avait dirigé la Cent quatrième dans les mêmes lieux, en début de saison.


La Deuxième Symphonie de Bruckner, sur laquelle un autre Italien, nommé Carlo Maria Giulini, avait aussi jeté son dévolu à Vienne – avec les Symphoniker -, réserve, pour le coup, des surprises. On trouve en effet ici la verdeur dont certains déploraient l’absence chez Haydn, presque une âpreté à la Gielen. Si l’on s’attendait à un Bruckner poli et policé, « viennois », on a été bien étonné. L’Allegro moderato sonne avec une clarté solaire, très latine, qui fait ressortir toute la modernité de l’écriture, notamment en matière de rythme : Muti s’avère très analytique, ne sacrifiant pas à l’hédonisme, tenant tout d’une main implacable, en particulier dans les crescendos. Cela dit, on perçoit bien les sonorités exceptionnelles de l’orchestre, même si l’acoustique a tendance à les assécher et à les patiner : dans les premières mesures, on écoute, autant que le chant des violoncelles, la beauté et la précision des violons. Le lyrisme, en revanche, domine dans l’Andante, dirigé comme une scène d’opéra, que Muti, jamais statique, volontiers narratif, fait remarquablement avancer : on regrette seulement qu’il n’ait pas choisi la version avec solo de cor à la fin du mouvement, surtout après les moments de grâce prodigués au début par Wolfgang Tomböck junior. Ce mouvement lent séduit aussi par l’éventail de nuances dont les Viennois ont le secret, jusqu’à ce pianissimo des contrebasses avant la reprise, ou ce superbe duo de la flûte et du violon dans les dernières mesures. Dans le Scherzo le chef italien semble déchaîner toute la puissance des ténèbres, comme s’il dirigeait celui de la Neuvième, ce qui renforce le passage à la douceur de la lumière dans le Trio, où le chant des altos déploie des courbes d’une irrésistible séduction. Le Finale a des couleurs et des accents d’apocalypse, d’une noirceur encore obscurcie par la clarté de la direction ; Muti parvient à y résoudre les problèmes formels que pose une certaine maladresse compositionnelle, en particulier celui des enchaînements. Une interprétation inattendue, forte et fascinante.



Didier van Moere

 

 

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