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Les miniatures d’Andsnes

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
03/14/2008 -   et 6 (Köln), 10 (London), 26 (Copenhagen), 28 (Rotterdam), 30 (Amsterdam) mars, 1er (Milano), 4 (Roma), 11 (Graz), 13 (Wien), 15 (Bruxelles), 17 (Regensburg) avril 2008
Johann Sebastian Bach : Toccata en mi mineur, BWV 914
Ludwig van Beethoven : Sonate n° 13 «Quasi una fantasia», opus 27 n° 1
Jean Sibelius : Commodo (extrait de «Kyllikki»), opus 41 n° 3 – Elegiaco, opus 76 n° 10 – Le Bouleau, opus 75 n° 4 – Barcarola, opus 24 n° 10
Edvard Grieg : Ballade, opus 24
Claude Debussy : Brouillards – Le Vent dans la plaine – Les Collines d’Anacapri – Des pas sur la neige – La Puerta del vino – Ce qu’a vu le vent d’ouest – Bruyères – La Sérénade interrompue – Canope – Ondine – La Terrasse des audiences du clair de lune (extraits des Premier et Second livres de Préludes)

Leif Ove Andsnes (piano)


Leif Ove Andsnes fêtera ses trente-huit ans le 7 avril prochain, mais cela fait longtemps qu’il s’est imposé comme l’un des pianistes avec lesquels il faut compter, ce que son récital donné dans le cadre de la série «Piano aux Champs-Elysées» de Jeanine Roze a permis de confirmer: un programme placé sous le sceau de l’originalité et de la liberté – tant par les formes choisies (toccata, fantaisie, ballade, prélude) que par leur agencement – mais aussi sous celui de la miniature, la plus longue dépassant à peine le quart d’heure et étant elle-même un assemblage de brèves variations.


D’une grande variété d’époques et de genres, la première partie débute par la Toccata en mi mineur (BWV 914) de Bach: souple et rythmé à la fois, le jeu d’Andsnes refuse l’uniformité stylistique – entre fantaisie baroque, rigueur classique et expression romantique – sans pour autant paraître éclectique, l’ensemble demeurant fermement construit. Toujours servie par une technique sûre mais jamais démonstrative, cette manière plus élégante que débridée préside également à la Treizième sonate «Quasi una fantasia» (1801) de Beethoven, gracieuse, mais assez avare de contrastes et d’effusions.


Alors que Sibelius s’est fait connaître par ses œuvres orchestrales, sa musique de chambre ou même ses pages chorales, son corpus pianistique reste assez largement ignoré. Les quatre courtes pièces sélectionnées par Andsnes apportent hélas un début d’explication à ce mystère: aussi plaisantes, voire brillantes, soient-elles, on peine en effet à croire que certaines d’entre elles, entre teintes folkloriques et ambiances salonardes, sont postérieures à la Quatrième symphonie, car leur langage ne va guère au-delà de celui de Tchaïkovski ou de Grieg. C’est d’ailleurs de «pièces lyriques» que le compositeur finlandais qualifie les trois morceaux de Kyllikki (1904), où il puise à nouveau son inspiration dans le Kalevala au travers du personnage de Lemminkäinen, mais dont le pianiste ne présente curieusement que la dernière. Il y joint un Elegiaco, dixième des treize pièces de l’Opus 76 (1914), Le Bouleau, avant-dernière des cinq pièces de l’Opus 75 (1914), et une Barcarola, dernière des dix pièces de l’Opus 24 (1903), qui n’apportent pas grand-chose à la gloire de Sibelius.


En revanche, il fait découvrir une partition importante de son compatriote Grieg, s’attachant ainsi à démontrer qu’il n’a pas écrit que des cahiers de Pièces lyriques: si elle ne combat pas dans la même catégorie que les Diabelli, les Etudes symphoniques ou les différents cycles brahmsiens, la Ballade en forme de variations sur un chant populaire norvégien (1875) associe avec bonheur exercice académique, hommages sans plagiat (Chopin, Liszt, …) et saveurs du terroir dont témoignent certaines modulations ou rythmes.


La seconde partie butine parmi les Préludes de Debussy, non pas un livre entier, pas même douze, mais onze – «Préfère l’impair»: cinq du Premier livre (1910) et six du Second livre (1912), dans un désordre soigneusement étudié. Exempte de narcissisme ou d’hédonisme, la perfection qu’atteint le pianiste norvégien force l’admiration, à commencer par le magnifique étagement des plans sonores (La Sérénade interrompue). A chaque instant, la netteté du trait est équilibrée par un toucher velouté, satiné ou soyeux, comme l’on voudra, presque immatériel tant il évite tout effet percussif, sans céder pour autant aux facilités de ce flou «impressionniste» que Debussy abhorrait: Brouillards et Ondine ne sont ainsi... ni brumeux, ni humides.


Sans excès de froideur, cette vision pourra toutefois sembler chiche en aspérités, en abîmes et en arrière-plans, en poésie et en atmosphères entêtantes (La Terrasse des audiences du clair de lune), tandis que les griffures colorées de La Puerta del vino manquent un peu d’éclat. Mais cette lecture dépourvue d’affectation, osant tout aussi bien un dépouillement recto tono qu’assumant un véritable plaisir digital, trouve plus particulièrement à s’illustrer dans ces préludes secrets et moins fréquentés, tels Bruyères ou Canope.


Et, sans cesse, une distinction que l’on ne prend pas en défaut – même peut-être quand il le faudrait... – mais qui se fissure quelque peu dans le Presto final des quatre pièces du recueil Dans les brumes (1912) de Janacek. En attendant de retrouver le public du Théâtre des Champs-Elysées le 26 mai prochain pour un récital en compagnie de l’un de ses partenaires d’élection, le violoniste Christian Tetzlaff, Andsnes offre au public, en guise de second bis, la Sonate en ut dièse mineur K. 247 (1753) de Scarlatti.


Le site de Leif Ove Andsnes



Simon Corley

 

 

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