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Europe musicale

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Cité de la Musique
10/12/2007 -  
Bruno Mantovani : Con leggerezza
Marco-Antonio Pérez-Ramirez : Shouting Silences
George Benjamin : At First Light

Jean-Jacques Gaudon (trompette), Pierre Strauch (violoncelle)
Ensemble Intercontemporain, François-Xavier Roth (direction)

Ce deuxième concert de l’EIC s’inscrit dans le cycle « Musique des Lumières Le Triomphe de la raison », le rapport entre la thématique générale et le programme de la soirée apparaissant surtout à travers Fanal (signal lumineux, en allemand) de York Höller et At first light de George Benjamin.


Cela dit, il y a de la lumière dans Con leggerezza, pour ensemble, de Bruno Mantovani (1974) – créé par l’EIC au festival Ars Musica de Bruxelles en 2005. Des fusées sonores se croisent et zèbrent le silence, les percussions déchirent l’atmosphère installée par des valeurs longues : sombre ou jubilatoire, l’œuvre joue, à tous les niveaux – hauteurs, intensités, registres, etc. -, sur les contrastes et les oppositions dialectiques, le compositeur optant pour une « forme éminemment rhapsodique », qui donne parfois l’impression d’une improvisation contrôlée des cinq groupes de cinq musiciens répartis dans l’espace.


Après « cette fantaisie s’inspir[ant] de la légèreté des bulles du champagne », Fanal, pour trompette et ensemble, semble plus tendu, plus lyrique, moins axé sur les seules sonorités, même si York Höller (1944) ne renonce pas à exploiter nombre d’effets inventés par la trompette du vingtième siècle – et brillamment restitués par Jean-Jacques Gaudon, créateur de l’œuvre en 1991 avec l’EIC. La partition relève davantage, évidemment, de l’esprit concertant, soulevant parfois de violentes houles, à l’image de la Révolution française dont elle se veut « un écho ou plutôt un reflet », à travers une trentaine de sections relançant sans cesse le discours. C’est la fin, d’ailleurs, qui est la plus intéressante : tout s’abîme, s’éteint dans des sonorités à peine perceptibles, comme un point d’interrogation. Le musicien semble convoquer une grande partie du vingtième siècle, qu’il mixe et digère, notamment un certain Stravinski, témoignant d’un grand savoir faire, apparemment plus soucieux de synthèse que d’innovation.


Commande de l’EIC, donné en création mondiale, Shouting Silences, pour violoncelle et quatorze musiciens, du Franco-Chilien Marco-Antonio Pérez-Ramirez (1964) semble plus inventif et plus coloré, en particulier sur le plan de l’articulation et des sonorités : fondé sur l’idée du passage, le morceau s’apparente, comme Con leggerezza, à une sorte de fantaisie, mais à une fantaisie illustrant la création perpétuellement renouvelée par un élan vital : le compositeur n’hésite pas à se référer à La Pensée et le mouvant de Bergson, réfutant toute discontinuité, ce qui le distingue finalement de Mantovani. Shouting Silences, magnifiquement défendu par Pierre Strauch, enrichit donc le répertoire du violoncelle contemporain comme le fit par exemple, il y a plus de quarante ans, un Penderecki avec sa Sonate pour violoncelle et orchestre.


At first light de George Benjamin (1960), le plus en vue des musiciens anglais d’aujourd’hui avec Thomas Adès, est l’œuvre la plus ancienne du programme : Simon Rattle – pas encore « sir » - la créa à Londres en 1982. Inspirée de Norham Castle au lever de soleil de Turner – dont trois tableaux inspirèrent également un « essai » au Français Marius Constant en 1961 – l’œuvre se veut « une contemplation de l’aube, une célébration des couleurs et des bruits du petit jour » - on pense, mutatis mutandis, au fameux « J’ai embrassé l’aube d’été » des Illuminations de Rimbaud servant d’épigraphe à la Pastorale d’été d’Honegger. L’élève de Messiaen se reconnaît bien à son sens des couleurs, à son art de la suggestion ou de l’évocation, à la diversité de son univers sonore, luxuriant ou raréfié, à un certain hédonisme qui en fait – là encore, mutatis mutandis - une sorte de Delius contemporain, autrement dit un des plus français des musiciens anglais.


François-Xavier Roth défend les quatre opus avec conviction, les rendant très lisibles par la précision d’une direction qui sait rester souple et restituer les combinaisons de timbres, un rien timide et contraint peut-être devant Shouting Silences, ce dont on ne le blâmera pas : il faut, pour qu’on s’y sente à l’aise, qu’une œuvre soit rodée.



Didier van Moere

 

 

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