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Ambronay, suite : saisissants motets de Mondonville par Marc Minkowski.

Ambronay
Abbatiale
09/25/1998 -  

Abbatiale d’Ambronay
Vendredi 25 septembre
Musiques de la Renaissance : Agricola, Gombert, Penalosa, Manchicourt, Pastrana, Don Ferdinando de las Infantes, Rogier
Ensemble Huelgas, Paul Van Nevel (direction)

Samedi 26 septembre
Mondonville : Motets Dominus regnavit ; Venite exultemus
Charpentier : Messe de minuit
Valérie Gabail, Magdalena Kozenà (dessus), Jean-Paul Fouchécourt (haute-contre), François Piolino (taille), Laurent Naouri (basse-taille)
Les Musiciens du Louvre – Grenoble, Marc Minkowski (direction)

Dimanche 27 septembre
Matinée
Josquin Desprez : Missa Pange Lingua, avec des pièces de Jean Mouton et Loyset Compère
Hillard Ensemble (David James, Rogers Covey-Crump, John Potter, Gordon Jones)

Soirée
Lochon : Oratorio pour la naissance de l’enfant Jésus (1701)
Clérambault : Cantates Le Solitaire ; Abraham, Remords Calmés ; Oratorio L’histoire de la femme adultère, Sonate en trio " L’Anonima "

Monique Zanetti & Viviane Durand (dessus), James Oxley (haute-contre), Pierre Evreux (ténor), Jérôme Corréas (basse)
Les Talents Lyriques, Christophe Rousset (direction)

Le vague titre initial qui annonçait le concert de l’ensemble Huelgas (" Musiques de la Renaissance ") indique bien le flottement qui existe en France quant à cette période trop peu célébrées par nos Muses actuelles. Rares sont les chercheurs français qui explorent ce continent, et les traductions des érudits étrangers sont quasi inexistantes. C’est donc toujours un plaisir de savourer le travail d’orfèvre de Paul van Nevel : délicatesse, volubilité se déclinaient à travers les incroyables pièces de Pierre de Manchicourt (Gloria, Kyrie, Agnus Dei) et Philippe Rogier. Mais ce programme consacré en fait aux Franco-Flamands en Espagne a permis de découvrir deux importants maîtres de chapelle du début de XVIe siècle : si Francisco de Penalosa est chanteur à la chapelle de Ferdinand V, il correspond aussi avec le grand humaniste Lucio Marineo. On le retrouve à Burgos et Séville. Pedro de Pastrana fut également chanteur de la chapelle aragonaise de Ferdinand le Catholique en 1500. Puis il suivit Charles V. Clerc et compositeur, il fut abbé d'un monastère cistercien prés de Valence.

Toutefois la petite merveille ‘inouïe’ de cette soirée était le Sanctus d’Alexander Agricola, qui finissait par une véritable folie des modes symbolisant les hautes sphères célestes. D’un bout à l’autre la qualité des voix fut remarquable.

Mondonville fut redécouvert récemment par le grand public à l'occasion des " Journées " qui lui furent consacrées par le Centre de Musique Baroque de Versailles sous la direction de Jean Duron et Edmond Lemaître. Mais Marc Minkowski a depuis longtemps abordé ce compositeur : d’abord avec Titon et l'Aurore; puis, plus prés de nous avec d'époustouflantes symphonies, en concert et au disque. Il renouvelait ces réussites, ce soir-là, avec les sublimes motets de Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville. Dans ces pages impressionnantes, symbioses de la sinfonia italienne et du verbe français, Minkowski magnifie le côté théâtral par une lecture vive et dynamique qui va jusqu’à transformer l’orchestre jaillissant en voix. Si plastiquement, l’interprétation du Dominus regnavit par William Christie fut plus belle, Minkowski est on ne peut plus convaincant musicalement. Il faut l’avouer : on n’a jamais entendu ça ! Dans ce théâtre sacré articulé autour des phonèmes des voix Minkowski découvre l’enchantement de cette musique. On retrouvera ces caractéristiques qui rendent pleinement justice à l’écriture de Cassanéa dans l’autre motet, Venite exultemus. Les solistes ne sont pas en reste même s’ils sont moins présents que le chœur : on retiendra l’unique Magdalena Kozenà qui réunit les plus hauts talents d’actrice avec une très grande voix.

La Messe de minuit de Marc-Antoine Charpentier (1643-1704) dans tradition de la messe parodique et inspirée de noëls populaires intervenait entre les deux motets. Déjà enregistrée par cet ensemble chez Archiv, on pouvait admirait ici le beau style de Jean-Paul Fouchécourt et l’extrême attention à la langue vocale du grand siècle : cette messe prenait vie comme on dit par ailleurs " prendre langue ". Harmonie et éloquence se liaient à la danse pour réaliser ces ‘diversitez’ originales voulues par Charpentier. C’est donc un concert rare et précieux que proposait là Marc Minkowski et son ensemble.

C’est une toute autre forme de vocalité que nous proposait les Hilliard, mais non moins remarquable par sa perfection formelle. L’endurance de ces quatre chanteurs leur a permis, pendant un long programme, de garder la même maîtrise du souffle, de la résonance, et de l’incroyable cohésion. Leur parfaite lecture d’une grande intériorité, se terminait avec une magnifique pièce de Loyset Compère en l’honneur des musiciens Dufay, Dusart, Bunoys, Caron, de Brelles, Tinctoris, Ockeghem, Josquin Desprez, Corbet, etc.

A la suite des journées Nicolas Clérambault (1676-1749) organisée par le Centre de musique baroque de Versailles conjointement à la sortie du livre de Catherine Cessac, chercheur du Centre, sur ce compositeur (éditions Fayard, Septembre 1998) ; nous pouvions (re)découvrir une personnalité importante du XVIIIème français injustement délaissée. Organiste à l’église Saint-Sulpice et maître de chapelle de Saint-Louis de la Maison royale de Saint-Cyr fondée par Madame de Maintenon, la dernière épouse de Louis XIV. Il succéda, en 1715, à Nivers dans ces deux postes.

Un disque récent consacré entièrement à ce compositeur, proposé par les solistes du Concert Spirituel (CD Naxos), permettait d’écouter deux cantates pour soprano et deux sonates. On retrouvait dans ce concert la remarquable sonate " Anonima " à laquelle les musiciens des Talens Lyriques donnaient une force dramatique peu commune. Malheureusement cette dimension manquait, là où elle aurait dû se trouver en priorité : les cantates. Le concert aurait paru moins terne –surtout après le passage précédent de Minkowski à Ambronay- malgré les passionnantes musiques de Clérambault. La cantate Abraham fut toutefois bien servie, dans ses très beaux " récits " notamment, par le timbre fruité de Monique Zanetti. On aurait aimé entendre plus souvent le timbre large et agréable de James Oxley, futur haute-contre (‘à la française’) très en vue. On ne peut espérer, à l’occasion de ce mouvement, une plus grande présence de Nicolas Clérambault dans les programmes de musique baroque française.
Au total, un très beau week-end pour Ambronay qui ne dément pas, d’année en année, sa grande réputation qui en fait l’un des plus grands festivals de musique dans le monde baroque.

Les concerts critiqués ici ne représentent qu’une part très modeste de l’ensemble des concerts. Le festival se poursuit jusqu’au 16 octobre : renseignements et locations, (00.33.) 04.74.38.74.04. Festival d’Ambronay, Place de l’Abbaye. BP3, 01500, Ambronay.



Frédéric Gabriel

 

 

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