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Ultima verba Paris Salle Pleyel 10/13/2006 - Jean-Louis Florentz : Qsar Ghilâne, opus 18
Serge Prokofiev : Concerto pour piano n° 3, opus 26
Serge Rachmaninov : Danses symphoniques, opus 45
Alon Goldstein (piano)
Orchestre national d’Ile-de-France, Yoel Levi (direction)
La suite des «Paris de la musique» coïncidait avec le premier concert public parisien de l’Orchestre national d’Ile-de-France cette saison, lequel marquait en même temps sa première apparition dans la nouvelle Salle Pleyel. 2006-2007, toujours avec Yoel Levi, chef principal depuis septembre 2005, s’annonce sous d’excellents augures, entre deux passages dans la fosse du Châtelet pour Le Chanteur du Mexico: mélange des genres (Brad Mehldau, Pink Martini), chefs atypiques (Laurence Equilbey, Leon Fleisher, …) et solistes de valeur (Patrizia Ciofi, Jean-Frédéric Neuburger, …) irrigueront ainsi toute la région, sans oublier les thématiques originales et les raretés qui inspirent les programmes des sessions de musique de chambre du lundi à l’Auditorium Saint-Germain.
L’un des enjeux de cette soirée essentiellement russe, baptisée «Danses symphoniques», était de savoir comment l’orchestre allait se comporter face au juge impitoyable qu’est devenu Pleyel depuis sa réouverture. La reprise de Qsar Ghilâne (2003) – dernière partition achevée par Jean-Louis Florentz, disparu le 4 juillet 2004 dans sa cinquante-septième année, quelques mois après la création de cette commande de l’Ensemble orchestral de Paris (voir ici) – aura en tout cas bénéficié d’une acoustique à la fois analytique et généreuse: vingt minutes somptueuses au cours desquelles on se demande quand même parfois si le chatoiement instrumental ne finit pas par constituer une fin en soi, avec un propos qui ne cesse de tourner sur lui-même de façon un peu narcissique. Dirigeant par cœur, Yoel Levi peut compter sur de solides qualités individuelles, notamment la trompette à la fois précise et lyrique de Nadine Schneider.
Dans le Troisième concerto pour piano (1921) de Prokofiev, la grande surprise, c’est que ce n’est pas principalement le soliste qui tient la vedette, mais l’accompagnement, très présent, tour à tour alerte et poétique. Plutôt que de passer en force comme on le fait souvent dans cette musique, le pianiste israélien Alon Goldstein (né en 1970) privilégie la subtilité, ici ou là un rien maniérée, bien davantage dans la manière d’un divertissement néoclassique que d’un cheval de bataille moderniste. En bis, le Troisième des six Moments musicaux (1824) de Schubert est tout aussi souriant et détaché.
A l’égal de Qsar Ghilâne pour Florentz, les Danses symphoniques (1940) de Rachmaninov furent ses ultima verba, brillant triptyque, particulièrement de nature à mettre en valeur la virtuosité d’une formation, qui a tendance à éclipser ses trois symphonies. Et il a effectivement fière allure sous la baguette de Yoel Levi, avec finesse et élégance, plus dans l’esprit de Tchaïkovski que de Mahler, sans forcer le trait, faisant sans cesse chanter et respirer l’œuvre. Même si sa couleur n’est pas toujours idéale, l’orchestre fait preuve d’une belle cohésion tout en confirmant qu’il dispose d’excellents solistes, à commencer par Ann-Estellle Médouze au violon, mais aussi Marianne Legendre au cor anglais.
Le site de l’Orchestre national d’Ile-de-France
Simon Corley
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