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Les Brigands ont encore frappé Paris Athénée – Théâtre Louis-Jouvet 12/08/2005 - et 8, 9 (La Rochelle), 12 (Saint-Quentin), 20 (Compiègne), 26 et 27 (Martigues) novembre, 2 (Villefranche-sur-Saône) novembre, 9, 10, 13*, 14, 15, 16, 17, 18, 20, 21, 22, 23, 24, 27, 28, 29, 30, 31 décembre 2005 et 3, 4, 5, 6, 7, 8, 10, 11, 12, 13 et 14 janvier 2006 (Paris), 20 (Saint-Louis), 28 (Privas) janvier, 1er février (Niort), 9, 10 (Lorient), 17 (La Roche-sur-Yon), 19 (Longjumeau), 26 (Caen), 28 (Clermont-Ferrand) novembre, 5 (Caudry), 8 (Privas), 12 (Le Mans), 16 (Les Sables d'Olonne) et 22 (Rueil-Malmaison) décembre 2006 Moïse Simons : Toi c’est moi (adaptation Thibault Perrine)
Gilles Bugeaud (Le garçon de café, Pedro Hernandez), Emmanuelle Goizé (Le speaker, Maricousa), Gilles Favreau/Christophe Grapperon (Robinet), Jennifer Tani (Viviane), Loïc Boissier (Pat), Carl Ghazarossian/Olivier Hernandez (Bob), Marie-Louise Duthoit (Honorine), Lionel Muzin (Pfitz), Francine Romain (Loulou, Bédélia), Camille Slosse (Lily, Carmen)
Stéphan Druet (mise en scène), Florence Evrard (scénographie), Elisabeth de Sauverzac (costumes), Philippe Lacombe (lumières), Alma de Villalobos (chorégraphie)
Elsa Benabdallah/Pablo Schatzman (violon), Laurent Camatte/Maria Mosconi (alto), Annabelle Brey/Vérène Westphal (violoncelle), Cédric Carlier/Nicolas Crosse/Antoine Sobczak (contrebasse), Anne-Cécile Cuniot/Boris Grelier/Bastien Pelat (flûte), Christian Laborie/François Miquel (clarinette), André Feydy/Vincent Mitterrand (trompette), Fabien Cyprien/Frédéric Lucchi (trombone), Pierre Gourier/Guillaume Itier (percussion), Nicolas Ducloux (piano), Benjamin Lévy (direction musicale)
Après Barbe Bleue puis un mémorable Docteur Ox d’Offenbach (voir ici) et un étincelant Ta bouche de Maurice Yvain (voir ici), les Brigands ont encore frappé. Continuant leur progression dans le temps, ils ont cette fois-ci jeté leur dévolu sur Toi c’est moi (1934) de Moïse Simons. Rodée comme de coutume hors de la capitale, cette production arrive à l’Athénée (Théâtre Louis-Jouvet) pour trente représentations, d’où elle repartira pour quelques étapes supplémentaires en province.
La recette de la Compagnie Les Brigands est désormais bien connue: une pièce légère qu’une troupe jeune et motivée s’attache à faire redécouvrir au public, une adaptation instrumentale réalisée par Thibault Perrine pour un petit ensemble (dix musiciens), une direction alerte, pleine de rebond et tranchante de Benjamin Lévy, des rythmes entraînants qui inspirent les chorégraphies d’Alma de Villalobos, une intrigue farfelue qui sert de prétexte à une mise en scène inventive de Stéphan Druet.
Originaire de La Havane, Moïse Simons (1888-1945) mêle la rumba à la tradition française (La leçon de solfège) et aux influences américaines (Tu n’es qu’un salaud). Son écriture, qui démontre une indéniable habileté harmonique, fait mouche: toutes les opérettes ont-elles laissé deux «tubes» à la postérité? Outre la chanson-titre créée par Pills et Tabet, Toi c’est moi renferme en effet Sous les palétuviers, immortalisé par Pauline Carton et René Koval. Cela étant, malgré une première (aux Bouffes parisiens) dont l’affiche fait rêver – aux quatre susnommés se joignaient Ginette Leclerc et Simone Simon ainsi que Marcel Cariven à la baguette – il est difficile de ne pas penser que cette «comédie musicale» en deux actes le cède en finesse, en substance et en ironie par rapport à Ta bouche. Les lyrics sont certes dus à l’inévitable Albert Willemetz, associé à Bertal, Maubon, Mouezy-Eon et Chamfleury, mais le livret boulevardier et grivois de Henri Duvernois manque trop souvent de cette rigueur indispensable au ressort comique.
Du coup, l’attention se porte davantage sur les décors de Florence Evrard, qui cultivent résolument les clichés coloniaux véhiculés par la pièce avant de basculer dans l’onirisme d’une forêt vierge très stylisée. Quant au plan incliné, il n’est pas ici la figure obligée de tout plateau moderne, mais il traduit l’évolution de personnages qui dérapent et se laissent glisser sous l’effet des délices des tropiques. Les costumes d’Elisabeth de Sauverzac subissent une transformation parallèle, depuis les mondanités années 1930 du cabaret parisien jusqu’au délire coloré de la réception chez le résident général.
Côté vocal, un manque d’homogénéité trahit les formations et expériences disparates des dix chanteurs: les plus convaincants demeurent les «anciens» de la compagnie, à commencer par le duo père-fille formé par Emmanuelle Goizé (Maricousa) et Gilles Bugeaud (Pedro), auxquels il convient d’ajouter Loïc Boissier (Pat) mais aussi Marie-Louise Duthoit (Honorine). Ceux qui tentent de faire valoir des voix plus travaillées, plus «opératiques», comme Jennifer Tani (Viviane), Carl Ghazarossian (Bob) ou Francine Romain (Bédélia), passent paradoxalement moins bien la rampe. Mais l’ensemble joue avec conviction, de telle sorte que les deux heures de ce spectacle offrent un moment de détente sans prétention.
Le site de l’Athénée – Théâtre Louis-Jouvet
Simon Corley
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