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Révélations

Prades
Abbaye Saint-Michel de Cuxà
08/03/2005 -  
Joseph Haydn: Quatuor n° 78 «Lever du soleil», opus 76 n° 4 (+)
Maurice Ravel: Schéhérazade (extrait) (#)
Igor Stravinsky: Trois poésies de la lyrique japonaise (&)
Toru Takemitsu: Entre-temps (~)
Maurice Delage: Quatre poèmes hindous (§)
Claude Debussy: Prélude à l’Après-midi d’un faune (arrangement Hanns Eisler) (^)

Daphné Touchais (&), Karen Vourc’h (§) (soprano), Juliette Mars (#) (mezzo), Benoît Fromanger (# & §) (flûte, piccolo), Juliette Hurel (& § ^) (flûte), Jean-Louis Capezzali (~ § ^) (hautbois, cor anglais), Réa Vallois (& §) (clarinette), Julien Hervé (& § ^) (clarinette, clarinette basse), David Grimal (& § ^), Cécile Agator (& § ^) (violon), Paul Coletti (& §), Bruno Pasquier (^) (alto), Christian-Pierre La Marca (& § ^) (violoncelle), Niek de Groot (^) (contrebasse), Michel Ventula (^) (percussion), Jung-Wha Lee (§) (harpe), Denis Weber (^) (harmonium), Christian Ivaldi (#), Frédéric d’Oria-Nicolas (& ^) (piano), Quatuor Aquila (+ ~): Vassili Voronin, Dmitri Feinschmidt (violon), Pawel Mroczkowski (alto), Timothy Archbold (violoncelle)
Michel Lethiec (& §) (direction)


Sous le titre «Est-Ouest», l’Abbaye Saint-Michel de Cuxà accueillait un concert à la double finalité: thématique, le centre de ce court programme s’intéressant aux relations musicales entre l’(Extrême-)Orient et l’Occident, mais aussi festive, marquant le cinquantième anniversaire de l’ADAMI. A cette occasion, la société de gestion collective des droits des artistes-interprètes, qui consacre à la création, à la diffusion et à la formation professionnelle un quart de ce qui est perçu au titre de la copie privée, mettait en valeur une partie de ces actions, qui ont bénéficié à 6 000 artistes, pour un montant de 10,75 millions d’euros en 2004: bourse accordée au Quatuor Aquila et, surtout, neuvième édition (2005) des «révélations classiques», qui ont distingué cinq lauréats instrumentistes et cinq lauréats lyriques.


Parmi ces dix jeunes musiciens, les trois cantatrices étaient plus particulièrement mises en vedette au cours de la soirée; en même temps, un ensemble mené par Michel Lethiec, avec un crayon en guise de baguette, mêlait aux «anciens» du festival quatre des cinq «révélations» instrumentales: Julien Hervé (clarinette), Cécile Agator (violon), Christian-Pierre La Marca (violoncelle) et Frédéric d’Oria-Nicolas (piano). Et les trois autres lauréats – Romain Leleu (trompette), Sébastien Droy (ténor) et Marc Scoffoni (baryon) – avaient eu droit, en compagnie de leurs sept camarades, à leur moment de gloire au cours d’un premier concert organisé en fin d’après-midi dans l’église de Codalet.


Constitué l’année dernière par deux Russes, un Polonais et un Australien, étudiant tous quatre en Allemagne, mais chacun dans une ville différente (Cologne, Berlin, Hanovre, Brême), le Quatuor Aquila a très rapidement vu les bonnes fées se pencher sur son berceau: sélection 2004 de l’European chamber music academy de Hanovre dirigée par Hatto Beyerle, cours avec le Quatuor Szymanowski, don de copies d’instruments par le luthier Christian Ericsson, soutien de diverses fondations, enregistrements à la NDR, bourse de l’ADAMI, invitation au Festival Pablo Casals, combien de formations ont-elles démarré leur carrière dans des conditions aussi favorables?


Dans le Soixante-dix-huitième quatuor «Lever du soleil», quatrième de l’opus 76 (1797) de Haydn, les Aquila compensent par la vigueur et la fermeté de la pensée des défauts de finition ainsi qu’une sonorité aigre et sèche, manquant de poids et de rondeur, notamment en raison d’un vibrato délibérément parcimonieux. Rugueuse plus que gracieuse, cette approche offre toutefois, par son inventivité, de bonnes raisons d’espérer dans l’évolution de ce quatuor.


Les «révélations» de l’ADAMI sont ensuite venues illustrer l’influence d’une certaine idée de l’Asie sur les compositeurs du début du siècle dernier. Luxueusement entourée de Benoît Fromanger et Christian Ivaldi, la mezzo Juliette Mars fait preuve d’une belle ampleur dans La Flûte enchantée, deuxième des trois mélodies de Shéhérazade (1903) de Ravel. Avec une diction moins soignée, la soprano Daphné Touchais applique aux trois brèves Poésies de la lyrique japonaise (1913) de Stravinsky une finesse peut-être acquise dans sa fréquentation du répertoire baroque.


Créés le même jour que les Poésies de Stravinsky mais s’inscrivant bien plus dans l’esthétique de Schéhérazade, les Quatre poèmes hindous (1912) de Maurice Delage (1879-1961), dont deux sont d’ailleurs respectivement dédiés à Ravel et à Stravinsky, méritent très largement d’être redécouverts. La soprano Karen Vourc’h plaide en tout cas brillamment en leur faveur, jouant d’un timbre pur et parfaitement maîtrisé pour surmonter les difficultés de la partition, notamment le périlleux passage a capella de la deuxième mélodie (Lahore), à la «couleur locale» très affirmée.


En début de seconde partie, avec Entre-temps (1986), fidèlement restitué par Jean-Louis Capezzali et le Quatuor Aquila, Takemitsu, situé plus que tout autre au point de jonction entre deux mondes, ne pouvait fournir de meilleur exemple du rôle de la musique occidentale, notamment française, dans le dialogue entre les cultures européenne et asiatique. En ce sens, le Prélude à l’Après-midi d’un faune (1892) de Debussy, donné, comme en 2003, dans un arrangement pour onze instruments (flûte, hautbois, clarinette, piano, harmonium, percussion, quatuor à cordes et contrebasse) réalisé par Hanns Eisler pour l’«Association pour les exécutions musicales privées» mise sur pied par Schönberg en 1918, proposait une judicieuse conclusion. Faute de chef, les musiciens s’écoutent et se regardent sans doute plus attentivement qu’à l’habitude pour assurer l’équilibre entre les pupitres et la mise en place. Les vents, depuis le solo initial de Juliette Hurel, sont particulièrement à l’honneur, d’autant que Jean-Louis Capezzali, lors des rappels, reçoit l’hommage de ses partenaires qui lui souhaitent, en musique, un joyeux anniversaire.



Simon Corley

 

 

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