About us / Contact

The Classical Music Network

Bordeaux

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Palmarès

Bordeaux
Grand Théâtre
06/29/2005 -  
Wolfgang Amadeus Mozart : Quatuors n° 14, K. 387 (a), 18, K. 464 (b), et 21, K. 575 (c)
Paul Hindemith : Quatuor n° 4, opus 22 (d)

Quatuor Sacconi (a, d): Ben Hancox, Hannah Dawson (violon), Robin Ashwell (alto), Cara Berridge (violoncelle)
Quatuor Carducci (b, d): Matthew Denton, Michelle Fleming (violon), Graham Broadbent (alto), Emma Denton (violoncelle)
Quatuor Ardeo (a, d): Carole Petitdemange, Olivia Hughes (violon), Alice Mura (alto), Joëlle Martinez (violoncelle)
Quatuor Parker (c, d): Daniel Chong, Karen Kim (violon), Jessica Bodner (alto), Kee-Hyun Kim (violoncelle)


Quatre concurrents – deux Britanniques, un Américain et un Français – restaient en lice pour la finale du Concours international de quatuor à cordes: il leur revenait d’abord de choisir parmi sept quatuors de Mozart qui leur étaient présentés (quatre des six dédiés et Haydn et les trois Prussiens), puis de se confronter tous au Quatrième quatuor (1921) de Hindemith (anciennement numéroté Troisième).


Relativement peu connu, bien que Harry Halbreich y entende aussi bien l’annonce de la Musique pour cordes, percussion et célesta de Bartok que l’influence de son Deuxième quatuor, la partition réserve une place de choix à l’alto, ce qui ne saurait étonner de la part du compositeur, qui tint longtemps ce pupitre au sein du Quatuor Amar. Assez développée (environ vingt-cinq minutes) et structurée en cinq mouvements (les deux premiers et les deux derniers étant enchaînés), elle ne se contente pas des provocations modernistes des oeuvres qui l’entourent immédiatement (Sancta Susanna, Kammermusik n° 1), mais préfigure déjà le style plus contrapuntique et plus réfléchi qui sera ensuite celui de Hindemith.


Suivies par un public attentif, venu encore plus nombreux l’après-midi, ces dernières épreuves ont vu se succéder, à raison de deux par demi-journée, quatre ensembles fort différents.


Narcissique


Dans le Quatorzième quatuor (1782) de Mozart, le Quatuor Sacconi, à nouveau instrumentalement très brillant, déploie un jeu maniéré, aux nuances infinies et aux couleurs soignées, mais au rubato envahissant et aux tempi très retenus (Trio du Menuetto, Andante cantabile): cette célébration de l’instant présent, pour séduisante qu’elle soit, a trop tendance à devenir une fin en soi, affaiblissant ainsi la portée du discours. D’une belle netteté de mise en place, le Hindemith des Britanniques sait cependant faire place aux contrastes (raffinement du troisième mouvement, rudesse du quatrième et badinage du Rondo final mit Grazie), même si prévaut le sentiment qu’il est encore possible de faire «parler» davantage la partition.


Le Quatuor Sacconi se voit décerner le prix de la SACEM (5 000 euros) pour la meilleure interprétation, au cours de la deuxième épreuve, des Moments musicaux de Kurtag.


Equilibré


Seconde formation britannique demeurant en course, le Quatuor Carducci a opté pour le Dix-huitième quatuor (1785) de Mozart. Moins tenté de privilégier l’hédonisme, il en donne une lecture de bonne tenue, plus sage qu’inventive, peu ambitieuse en ce sens qu’elle fait songer à la Petite musique de nuit et non à l’un des quatuors dédiés à Haydn, mais bénéficiant d’une respiration tout à fait naturelle et allant toujours de l’avant. Plus convaincants que leurs compatriotes dans le Quatrième quatuor de Hindemith, sinon peut-être dans le mouvement central, les Carducci ouvrent en effet un éventail plus large de teintes, de phrasés et d’expressions, à l’image de l’humour du Rondo final.


Le Quatuor Carducci reçoit le prix du ministère de la culture et de la communication (5 000 euros).


Original


Egales à elles-mêmes, les musiciennes du Quatuor Ardeo animent le Quatorzième quatuor de Mozart grâce à une implication et une urgence dont manquent les autres interprétations. Osant des timbres inattendus, notamment au moyen d’amples variations de vibrato, elles conjuguent leur emportement et leur spontanéité, certes non exempts de dérapages techniques et esthétiques, avec un Andante cantabile d’une grande chaleur, tout en rondeur et en moelleux. Ayant procédé, comme à leur habitude, à l’échange des pupitres de violon, elles abordent le Quatrième quatuor de Hindemith de façon résolument expressionniste et postromantique (Fugato initial), tout en livrant un mouvement central extrêmement subtil, à l’allure de blues fantomatique et détimbré.


Le Quatuor Ardeo est couronné du deuxième prix (10 000 euros) et, à l’unanimité, du prix de la critique musicale (10 000 euros).


Lisse


Dans le fragile Vingt et unième quatuor (1789) de Mozart, le Quatuor Parker s’investit avec la prudence tout-terrain de «bête à concours», même si l’intonation du premier violon aussi bien que du violoncelle – ce dernier mis particulièrement à l’honneur dans cette oeuvre – laisse à désirer. De bon goût, servie en outre par une cohésion indéniable et une sonorité fine, cette approche ne suggère toutefois pas suffisamment d’arrière-plans. Les Américains proposent en revanche le Quatrième quatuor de Hindemith probablement le plus réussi, faisant primer la démesure sur les prémices de néoclassicisme, avec un Fugato de tonalité bartokienne, un deuxième mouvement véhément et lyrique, et un Rondo final très vivant.


Le Quatuor Parker remporte le premier grand prix (20 000 euros) et les trois prix qui y sont automatiquement liés: prix «Mécénat musical Société générale», consistant en l’enregistrement d’un disque chez Zig Zag Territories (représentant 15 000 euros), prix Serge Den Arend offert par l’Association des amis de Mozart et des maîtres classiques (3 000 euros) et prix Moueix (un trophée sculpté par Abram).


Par ailleurs, le jury a décidé d’accorder aux Lettones du Quatuor Difference, éliminées à l’issue de la deuxième épreuve, le prix de l’Académie internationale d’été de musique de chambre de Basse-Saxe, soit trois semaines de cours.


Un millésime – le terme est de rigueur à Bordeaux, six grands crus étant d’ailleurs partenaires du concours – globalement satisfaisant, mais aussi très ouvert, aucun quatuor n’ayant réellement dominé la compétition de la tête et des épaules comme cela a parfois pu être le cas dans le passé. De façon plus surprenante, ces cinq jours bien remplis auront en même temps montré la difficulté de trouver une formation au leadership incontesté et d’un niveau technique homogène, les Ardeo s’étant sans doute révélés, de ce dernier point de vue, les moins décevantes et, en tout état de cause, les plus à même de progresser dans les années à venir.



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com