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Trop d’effets inutiles!

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
06/08/2005 -  Récital Mozart par Patricia Petibon
Wolfgang Amadeus Mozart : Airs de concert et d’opéra, Lucio Silla, Zaïde, Symphonie n°39, Ouverture de Don Giovanni
Patricia Petibon (soprano)
Ensemble Opera Fuoco
David Stern (direction)

Un peu en avance sur les célébrations de l’année Mozart, l’Ensemble Opera Fuoco et la soprano Patricia Petibon rendent hommage au compositeur autrichien avec plusieurs airs de concert, des airs virtuoses tirés d’opéras et quelques pages orchestrales. Un concert en demi-teinte car le résultat ne répond pas complètement aux espoirs placés en ces deux artistes.



Patricia Petibon débute son récital avec l’air “Alma grande e nobil” K. 518. L’air est correctement mené et techniquement il sollicite tous les registres de la soprano: cela pourrait une bonne introduction pour montrer les diverses couleurs de sa voix. Mais si la première partie est bien chantée, il faut attendre la seconde pour que la musicienne se révèle. A partir du moment où le personnage sort ses griffes sur “si voglio vendicar”, la chanteuse apporte une hargne, une rage qui convient à cet air, même s’il dépasse ses capacités vocales dans la mesure où il demande une voix plus lourde et plus corsée.
La soprano interprète ensuite deux airs tirés de ZaÏde, le fameux “Ruhe sanft mein holdes Leben” et “Tiger, wetze nur die Klauen”. Dans le premier air, il faut également attendre la seconde partie pour découvrir une nouvelle Patricia Petibon: elle donne ses notes en pleine voix et donc avec une puissance qu’on ne lui connaissait pas. La voix en devient très jolie, douce, charnue et expressive. En revanche le “Tiger” est assez malmené et dépasse, une fois de plus, les moyens de la chanteuse. Crier le “Tiger” avec du souffle dans la voix, ne suffira jamais à intensifier le langage dramatique! Dommage parce que l’orchestre était particulièrement inspiré dans cet air…
Après l’entracte, Patricia Petibon revient avec manifestement plus de voix pour interpréter “Fra i pensier piu funesti”. A sa décharge, il faut souligner que cet air n’est pas le meilleur écrit par Mozart. Elle s’en sort honorablement avec de jolies inflexions de voix dans l’air mais le récitatif reste complètement décousu. Elle se frotte ensuite au terrible air de Lucio Silla et malheureusement la comparaison avec Natalie Dessay (certes dans un enregistrement studio) n’est pas en sa faveur. Mais plus l’air avance, plus elle semble prendre de l’assurance et mieux réussir les difficultés pyrotechniques. Mais pourquoi briser la ligne de chant dans la montée spectaculaire - mais qui devrait être aussi dramatique - “Ah se il crudel periglio”? Les vocalises sont correctement faites, les notes sont là mais malheureusement on en perd beaucoup… En revanche les notes piquées finales sont laides et pas toujours très justes. Après tant de déception, le “Vorrei spiegarvi” inspirait quelques inquiétudes. Mais la surprise fut bonne! Malgré quelques aigus blanchit, la voix est souple et Patricia Petibon essaie vraiment de donner une âme à cet air. Les notes si difficiles dans les montées suraiguës sont là, très légères mais jolies. En bis, elle offre un autre air de Lucio Silla “Pupille amare” dans lequel la chanteuse et la musicienne se sentent très à l’aise.
Contrairement à ses autres concerts, Patricia Petibon a fait dans le simple et le sobre cette fois: pas de coiffure extravagante, pas d’objets qui n’ont rien à faire sur une scène de théâtre,… Mais elle ne peut s’empêcher d’en faire trop avec sa voix avec des notes beaucoup trop langoureuses, des expressions sur son visage beaucoup trop marquées… Son instrument est assez remarquable, la voix est belle (essentiellement dans le medium), agile mais elle parasite son talent avec un mauvais goût évident. Ce concert a toutefois révélé des problèmes vocaux comme une voix assez métallique, une ligne de chant brisée…


David Stern a une curieuse manière de diriger son orchestre: il a d’excellentes idées mais il ne parvient pas à les lier pour construire une oeuvre cohérente. Les tempi adoptés dans la symphonie sont judicieux, notamment dans le premier mouvement où il laisse les notes se développer. L’interprétation de l’ouverture de Don Giovanni, donnée en introduction du concert, présente les mêmes carences: les premiers accords sont un peu raides, malgré le velours des violons, et David Stern ne prépare pas les transitions. Tout cela reste bien décousu malgré un engagement extraordinaire des jeunes musiciens. Ces réserves s’évanouissent toutefois quand l’orchestre se fait accompagnateur du chant et le chef prête une écoute attentive à Patricia Petibon.


Toutes ces réserves une fois émises, il faut quand même souligner le courage des interprètes de se lancer dans un répertoire aussi lourd et de prendre autant de risques - pas toujours mesurés certes. Malheureusement l’émotion n’a pas été au rendez-vous et la grâce mozartienne n’a fait qu’une apparition bien fugitive. Il existe sûrement des rôles et des airs bien plus passionnants pour Patricia Petibon pour qu’elle n’ait pas besoin de se fourvoyer dans des oeuvres qui ne sont pas pour elle.


Manon Ardouin

 

 

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