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Splendeurs sonores

Paris
Théâtre Mogador
03/02/2005 -  et 3 mars 2005
Albert Roussel : Symphonie n° 3, opus 42
Oliver Knussen : Concerto pour violon (création française)
Ludwig van Beethoven : Symphonie n° 7, opus 92

Pinchas Zukerman (violon)
Orchestre de Paris, Christoph Eschenbach (direction)


Alors qu’Albert Roussel peine trop souvent à trouver la place qui lui revient légitimement à l’affiche, il faut se réjouir de l’intérêt que Christoph Eschenbach manifeste pour sa musique et, surtout, des réelles affinités qu’il paraît entretenir avec elle, d’autant qu’après la Seconde suite de Bacchus et Ariane (voir ici) en juin dernier, la Troisième symphonie (1930) est venue confirmer la formidable santé de l’Orchestre de Paris. Il est vrai que l’œuvre, composée à la demande de Koussevitzky pour le cinquantième anniversaire de l’Orchestre symphonique de Boston, s’apparente quasiment à un concerto pour orchestre et permet à tous les pupitres de s’en donner à cœur joie. Sans la subjectivité et les (merveilleux) excès d’un Münch ou d’un Bernstein, et sous l’œil attentif et expert de Jean-Claude Casadesus, Eschenbach opte pour une approche équilibrée, qui replace la partition dans un cadre plus (néo)classique que romantique. Dès lors, il rend justice au caractère robuste et musclé du discours, sans pour autant verser dans la lourdeur et obtenant même une précision, une transparence et une légèreté particulièrement sensibles dans le Scherzo. Roussel sied tellement bien au chef et à l’orchestre qu’il reste à souhaiter qu’ils s’intéressent prochainement à un univers voisin, également marqué par la personnalité de Münch, celui d’Arthur Honegger.


Créateur et destinataire du Concerto pour violon (2002) d’Oliver Knussen, commande conjointe des orchestres de Pittsburgh et de Philadelphie, Pinchas Zukerman en assurait la première française. Face à un orchestre relativement restreint – bois et cuivres par deux (avec cependant trois flûtes et trois cors), timbales, deux percussionnistes, harpe, claviers et cordes – et souvent en retrait, l’écriture permet au soliste de déployer à l’envi un lyrisme expansif qui convient on ne peut mieux au timbre chaleureux et à l’archet puissant du violoniste israélien. D’excellente facture et d’un abord assez aisé, trois mouvements enchaînés (dix-huit minutes) – dont l’intitulé pourrait rappeler ceux du Concerto de Stravinski, même si le propos n’a en rien la prétention d’un «retour aux sources» baroques – se succèdent: un Récitatif conflictuel et expressionniste, une Aria langoureuse et une Gigue dont le mouvement perpétuel ramène, pour conclure, aux tintements des cloches tubulaires qui avaient ouvert le premier mouvement.


Roussel, par un style à la fois ramassé et volontaire dont sa Troisième symphonie rend si bien compte, a parfois été comparé à Beethoven, dont, tout au long de la saison, l’Orchestre de Paris propose une intégrale des symphonies. Son directeur musical s’en est réservé quatre, dont la Neuvième, en ouverture (voir ici), et la Septième (1812), dont Yutaka Sado avait, voici seulement dix-huit mois, offert une lecture passionnante (voir ici). Maintenant la balance égale entre l’apollinien et le dionysiaque, Eschenbach, s’il bénéficie de qualités instrumentales toujours aussi exceptionnelles et joue à plein de la disposition «viennoise» de sa formation (seconds violons à droite, contrebasses au fond), semble se satisfaire de ce plaisir sonore plutôt que de chercher à émouvoir ou à convaincre. Mais comment faire pour autant la fine bouche ou la sourde oreille, tant ce choix est pleinement revendiqué (soixante-cinq cordes, quatre cors) et superbement assumé (ne seraient-ce que ces basses qu’aucune autre phalange parisienne ne peut sans doute égaler)? La tendance, fugace mais récurrente, à s’appesantir de façon théâtrale sur certains détails du texte ainsi que la lenteur de certains tempi – Vivace initial manquant quelque peu d’élan, Trio du Scherzo délibérément grandiose – pourront irriter, mais nul ne pourra contester la haute tenue de l’Allegretto – point trop alangui, quant à lui – ou la véhémence de l’Allegro con brio final et, globalement, la splendeur de la réalisation qui, une fois n’est pas coutume, parvient même à défier l’acoustique de Mogador.



Simon Corley

 

 

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