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Promenade chez Vivaldi

Paris
Châtelet
01/23/2005 -  
Airs tirés d’opéras d’Antonio Vivaldi : Semiramide, L’Olimpiade

Philippe Jaroussky (contre-ténor)
Ensemble Matheus
Jean-Christophe Spinosi (direction)

Pour la troisième fois cette saison, Jean-Christophe Spinosi investit le théâtre du Châtelet pour un magnifique concert dédié entièrement à son compositeur de prédilection: Antonio Vivaldi. Philippe Jaroussky le rejoint pour interpréter une série d’airs tirés d’opéras qui commencent à devenir de plus en plus connus grâce, en partie, à eux.



Le concert débute par un air de Semiramide “Vincerà l’aspro mio” que les musiciens interprètent en créant une ambiance assez effrayante, relayés en cela par le martèlement vocal de Philippe Jaroussky. Très bien mais les choses sérieuses commencent véritablement avec le deuxième air “Sol da te” de l’Orlando furioso, opéra dans lequel le contre-ténor avait remporté un immense succès au Théâtre des Champs-Elysées en 2003. Cette partition, du plus grand Vivaldi, requiert un chanteur exceptionnel avec de multiples nuances dans la voix et un flûtiste non moins excellent qui rivalise de virtuosité et de délicatesse avec lui. Le pari est entièrement tenu ici avec Philippe Jaroussky et Jean-Marc Goujon qui s’allient pour faire de ce passage, un moment riche d’émotion, un de ces rares moments dans la musique où le temps semble s’arrêter.
Philippe Jaroussky se montre bien plus à l’aise dans les airs doux, tendres que dans les airs vifs même si vocalement et techniquement, c’est absolument parfait. L’air “Fara la mia spada” de Tigrane est bien chanté mais procure beaucoup moins d’émotion que les autres. Même remarque pour les deux airs de L’Olimpiade, “Mentre dormi” et “Gemmo in un punto”. Le premier est un modèle de calme et de douceur et le chanteur se montre attentif au texte pour mettre en valeur les “i piacer”. Dans “Gemmo”, il accentue fortement les différents “f” des mots pour densifier davantage l’air et le rendre encore plus effrayant et percutant.
La voix de Philippe Jaroussky est diaphane aujourd’hui et il met ses aigus au service de la musique. De plus en plus ce technicien exceptionnel devient un musicien et habite les personnages, les airs, ce qui n’était pas forcément le cas au début de sa carrière. La facilité avec laquelle il vocalise, tire des sons émouvants de sa gorge est confondante au point que l’on en oublie une projection parfois un peu hétérogène. Ses aigus sont d’une pureté étonnante et ses graves commencent à s’épaissir même si l’air d’Orlando, “Nel profondo”, chanté en bis, le met parfois à mal mais il s’en sort en contrastant avec des aigus somptueux et en s’amusant à changer de variation à chaque reprise: jolis échantillons de tous les ressorts et de toutes les capacités de sa voix. Le plus beau chez cet artiste est sans conteste ses legato comme dans le début de l’air de Giustino.


Jean-Christophe Spinosi est particulièrement en forme et mène son orchestre à vive allure, comme toujours, mais sans jamais oublier la portée dramatique et c’est ce qui est si remarquable chez lui: la vitesse et l’énergie ne sont pas une fin en soi, elles sont un moyen par lequel il parvient à raconter une histoire, même à travers une ouverture. Les couleurs des instruments sont magnifiques: les violons qu’ils pleurent au début du deuxième mouvement de l’ouverture de La Fida ninfa ou qu’ils meurent dans la Sinfonia de l’Orlando Furioso, que le chef dirige de manière très aiguisée, sont splendides. La claveciniste est également excellente et son instrument est très présent dans l’air de Giustino pour contribuer à peindre la douleur du personnage. A plusieurs reprises dans le concert, Jean-Christophe Spinosi a terminé originalement les phrases en étendant à l’extrême l’avant-dernière note pour finir sur un dernier accord en pianissimo. Cet effet est absolument saisissant!



Une fois de plus, Vivaldi est embelli, redécouvert par des artistes exceptionnels qui ne ménagent pas leurs efforts pour servir cette musique. Cette petite promenade matinale dans l’univers du prêtre roux confirme son inépuisable inspiration et son génie à tirer des larmes au public. Une belle initiation pour découvrir ensuite les intégrales des opéras!





A noter:
- On peut retrouver ces deux artistes dans deux intégrales de Vivaldi, La Verita in Cimento et Orlando Furioso chez Naïve.
- Philippe Jaroussky vient de sortir un nouveau récital chez Virgin consacré aux cantates virtuoses de Vivaldi mais cette fois avec l’ensemble Artaserse.


Manon Ardouin

 

 

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