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L'éblouissant Falstaff de Laurent Naouri

Lyon
Opéra National
06/24/2004 -  et les 26, 28 et 30 juin, 2, 4, 6 et 8 juillet 2004
Giuseppe Verdi : Falstaff
Laurent Naouri (Falstaff), Patricia Schuman (Alice), Vincent le Texier (Ford), Graciela Araya (Mistress Quickly), Laura Giordano (Nanetta), Yann Beuron (Fenton), Marine Olmeda (Meg Page), Robin Leggate (Docteur Caïus), Peter Hoare (Bardolphe), Jérôme Varnie (Pistolet). Chœur et Orchestre de l’Opéra de Lyon, dir. Gianandrea Noseda.
Mise en scène : Peter Stein. Décors : Lucio Fanti. Costumes : Moidele Bickel. Eclairages : Yves Bernard.

Voilà un certain temps qu’on ne représente plus Falstaff comme une farce dont sir John serait le dindon. Ainsi Peter Stein joue-t-il fort subtilement sur le second degré plutôt que sur la truculence. Dans sa mansarde, le héros ressemble un peu à don Quichotte perdu dans ses rêves, héraut d’un monde disparu, victime d’une bourgeoisie qui, au dernier acte, manque le lyncher. Il ne lui reste plus, à la fin de l’opéra, qu’à monter vers les cintres, pour retrouver son idéal. On ne sait pas non plus si l’on doit rire de Ford, moins ridicule que blessé. Mais l’ultime opéra de Verdi ne vire pas pour autant à la tragédie : le metteur en scène en préserve toute la saveur et, au dernier acte, toute la féerie. Non sans quelque raideur ici ou là, notamment du côté des commères, assez convenues et contraintes à des déplacements un peu mécaniques. Cela dit, on saluera le travail accompli sur la partition, dont la moindre note semble passer sur une scène qui nous ramène volontiers au temps de Shakespeare. En un mot, le spectacle a du rythme.
Laurent Naouri épouse parfaitement les intentions du metteur en scène – à moins que ce ne soit le contraire. Alors qu’on a de plus en plus tendance à distribuer le rôle à des chanteurs blanchis sous le harnais, compensant comme ils peuvent l’usure de leurs moyens, notamment par du parlando hors de propos, son Falstaff est éblouissant de santé et de discipline vocales ; la voix, qui s’est éclaircie et arrondie, est tout à fait celle du personnage. Mais l’on n’est pas moins séduit par la finesse de la caractérisation et le refus de tout histrionisme dans le comique : le triomphant « Alice e mia », par exemple, n’a rien de ce débraillé qu’affectionnent tant de barytons en mal d’effets. On sera plus réservé sur le Ford de Vincent le Texier, certes bon styliste, parfait comédien et interprète subtil, mais toujours handicapé par une émission voilée et des problèmes de projection ; il n’est pas sûr, pour le coup, à en juger par une fin de « E sogno ? o realta ? » très laborieuse, que ce rôle d’authentique baryton Verdi ne soit pas trop aigu pour lui. L’exemplaire Yann Beuron, en revanche, n’a rien perdu, depuis qu’il chante Fenton, de sa fraîcheur, de sa souplesse et de sa rondeur. N’oublions pas non plus les rôles secondaires, parfaitement tenus, jamais trop chargés, à commencer par l’excellent Caïus de Robin Leggate. Les commères sont honnêtes, mais sans emporter vraiment l’adhésion. Charmante Alice, Patricia Schuman a du mal à projeter sa voix, surtout dans le médium. La Mistress Quickly de Graciela Araya, avec ses airs de cuisinière, ne convainc pas totalement, sans doute parce que sa voix reste trop claire et trop légère pour un rôle où il faut un timbre plus opulent. On aurait aimé également une Nanetta moins frileuse et plus charmeuse que Laura Giordano, qui n’a pas su phraser son air avec toute la poésie attendue. Last but not least, Martine Olmeda, au contraire, brûle les planches en Meg Page délicieusement fofolle.
Il reste que Falstaff est un opéra de chef. Gianandrea Noseda s’est montré lui aussi éblouissant, par sa direction pétillante, pleine de verve et de couleurs, transformant la partition en un vrai feu d’artifice, galvanisant un orchestre qu’on ne sent pas toujours aussi heureux de jouer. La saison lyonnaise, qui a connu des hauts et des bas, se termine bien.



Didier van Moere

 

 

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