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Connexions hispano-russes

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
05/18/2004 -  
Jacques Castérède : Intrada giocosa
Mikhaïl Glinka : Souvenir d’une nuit d'été à Madrid
Piotr Ilyitch Tchaïkovski : Concerto pour violon, opus 35
Rodion Chedrine : Carmen-Suite

Alexander Markov (violon)
Ensemble orchestral de Paris, John Nelson (direction)


Comme de coutume cette saison, le concert de l’Ensemble orchestral de Paris, entre deux représentations d’Alcina de Haendel à l’Opéra Garnier (voir ici), débutait par la création d’une courte pièce introductive. C’est cette fois-ci à Jacques Castérède qu’avait été commandée une Intrada giocosa, qui tient toutes les promesses de son titre: de caractère festif et exubérant, fondée sur la répétition jusqu’à l’enivrement d’un court motif entraînant, d’allure populaire, elle rappelle Ibert, Roussel, Milhaud ou même Martinu, lui-même auteur d’une Sinfonietta giocosa. Par sa tonalité ensoleillée, méditerranéenne en somme, elle constituait une excellente entrée en matière pour une soirée conçue autour des influences espagnoles dans la musique russe.


Si elle n’est pas la première du genre – on peut notamment penser à Boccherini – Souvenirs d’une nuit d’été à Madrid (1848/1851) de Glinka appartient à ces «espagnolades» qui allaient faire florès dans la seconde moitié du XIXe siècle, à commencer, en Russie même, par le Capriccio espagnol de Rimski-Korsakov. On se réjouit que le compositeur russe soit enfin représenté au concert par une autre œuvre que l’incontournable ouverture de son opéra Rouslan et Ludmilla, car cette brève rhapsodie (dix minutes), moins connue que sa Jota aragonaise, est restituée avec finesse et mordant sous la direction de John Nelson.


Curieusement, même s’il fut composé en Suisse, le Concerto pour violon (1878) de Tchaïkovski n’est pas sans liens avec l’Espagne, car l’idée d’écrire un concerto pour violon naquit de l’admiration éprouvée pour la… Symphonie espagnole de Lalo. Autre parenté plus anecdotique: Alexander Markov, violoniste américain d’origine russe, l’interprète avec des poses de toréador, en phase avec une approche qui en souligne exclusivement la dimension extérieure et larmoyante, d’un narcissisme hystérique qui semble animé par le souci de servir la subjectivité du virtuose davantage que la pensée du compositeur. Très friand de grand son, de vibrato et de glissades – sans être au demeurant, toujours très précis ni démontrer une sonorité exceptionnelle – le soliste leste chaque note d’une masse d’intentions et avance par à-coups, entre pianissimi à peine audibles et coups de boutoir subits, de telle sorte que le discours est privé de toute cohérence. L’orchestre, parfaitement à l’unisson, ne fait pas non plus dans la subtilité, mais avec un enthousiasme communicatif.


La cadence du premier mouvement prend l’aspect d’un véritable Caprice de Paganini, mais il est vrai que Markov en est un spécialiste reconnu. Il donnera d’ailleurs en bis les toujours spectaculaires Introduction et variations sur la corde de sol (1819) sur «Dal tuo stellato soglio» (extrait de Moïse en Egypte de Rossini), accompagné par les seules cordes (sans les contrebasses), mais avec l’aide du chef d’orchestre, qui, pour parachever le côté «Barnum» de l’affaire, prête lui-même la main, au sens propre, pour effectuer, à un moment crucial, un pizzicato sur le violon du soliste.


Carmen aura successivement inspiré des paraphrases à Eduard Strauss, Pablo de Sarasate, Ferruccio Busoni, Franz Waxman et, en Russie, Rodion Chedrine, sous la forme d’une Carmen-Suite (1967), qui est en réalité une musique de ballet pour un orchestre réduit aux cordes et aux percussions. En trois quarts d’heure, la plupart des thèmes – célèbres (Habanera, Toréador, La fleur que tu m’avais jetée) et moins célèbres – de l’opéra sont adaptés, transformés ou même défigurés dans un esprit parodique, le mouvement intitulé Boléro reprenant même… la Farandole de L’Arlésienne. Les musiciens rendent justice tour à tour au premier degré (mélo)dramatique, qui sonne parfois si typiquement russe (Toréador et Carmen, glacé comme du Chostakovitch), mais aussi à l’ironie de la partition.


C’est également l’Espagne – tant par le chef (Jesus Lopez Cobos) que par le programme (notamment Falla) – qui sera à l’affiche du prochain concert de l’Ensemble orchestral, le 26 mai prochain au Théâtre des Champs-Elysées.



Simon Corley

 

 

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