About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

A quoi rêvent les jeunes filles?

Paris
Théâtre des Bouffes du Nord
03/08/2004 -  
Robert Schumann : Sonate pour violon et piano n° 1, opus 105
Johannes Brahms : Scherzo «FAE»
Graciane Finzi : Et si tout recommençait
Karol Szymanowski : La Fontaine d’Aréthuse, opus 30 n° 1
Henryk Wieniawski : Etude-caprice, opus 18 n° 3
Serge Prokofiev : Cinq mélodies, opus 35 bis
Pablo de Sarasate : Zigeunerweisen, opus 20

Charlotte Bonneton (violon), François Dumont (piano)


La «Fondation Accenture» s’investit notamment dans le mécénat musical, d’une part en organisant une fois par an un «événement» parisien mettant en scène, en partenariat avec Harmonia Mundi, le Festival Juventus et le Théâtre des Bouffes du Nord, un «Jeune talent Accenture» (ainsi, la saison dernière, la soprano Annette Dasch), d’autre part en «parrainant» de jeunes musiciens durant trois années (le Trio Wanderer puis Xavier Phillips en ont été les précédents «filleuls»). C’est la violoniste Charlotte Bonneton qui bénéficie aujourd’hui de ces deux types d’action: non seulement elle se voit offrir la possibilité de donner un récital aux Bouffes du Nord, mais elle sera soutenue pendant les trois prochaines années, afin de parfaire sa formation et de produire un disque. Si les modalités de sélection des artistes ne sont malheureusement pas indiquées, force est de constater, à la lumière de ce concert, qu’elles sont efficaces.


Elève de Jean-Michel Danet (Conservatoire de Grenoble) puis de Jean Lenert (Ecole de musique d’Aulnay-sous-Bois, Schola cantorum), Charlotte Bonneton, bien que n’ayant pas encore dix-sept ans (elle les fêtera le 29 avril prochain), n’est plus tout à fait une inconnue. Après deux récitals au Festival de Montpellier en juillet dernier puis à Radio France en novembre, elle s’apprête à donner treize fois, d’ici le mois prochain, le Concerto en mi mineur de Mendelssohn avec l’Orchestre national de Metz-Lorraine puis avec l’Orchestre du Mont-Blanc. Surtout, elle vient d’ajouter à un palmarès déjà estimable un deuxième prix au Concours Wieniawski de Lublin (septembre 2003).


Accompagnée par le pianiste François Dumont – sur lequel aucune information n’est hélas fournie, alors qu’il s’acquitte plus qu’honorablement de sa tâche – et sous l’œil attentif de Cédric Tiberghien, elle a choisi un programme fort bien agencé (sans doute, c’est de bonne guerre, à partir de celui de ses récitals précédents et des concours qu’elle a travaillés), dont elle joue d’ailleurs une grande partie par cœur et qui, par sa variété, fait briller les multiples facettes d’un talent déjà manifeste.


Dès la Première sonate (1851) de Schumann, la Grenobloise affirme une personnalité qui tranche sur les produits souvent trop lisses des concours internationaux. D’une grande liberté, au prix de quelques imperfections et imprécisions, elle investit remarquablement l’instabilité de climat qui marque l’œuvre, grâce à son sens de la narration et à sa fougue, qui tourne parfois même à la brusquerie, au détriment de la sonorité.


Suite historiquement et stylistiquement on ne peut plus logique, le Scherzo de Brahms pour la Sonate «FAE» (1853), coécrite avec Schumann et A. Dietrich pour leur camarade Joseph Joachim, dont la devise était «Frei aber einsam» («libre mais solitaire»), soit, en abrégé, «FAE» (Brahms devait lui-même se qualifier de «Frei aber froh», «libre mais joyeux»). Le romantisme de la première manière du compositeur, alors seulement âgé de vingt ans, trouve dans la jeune violoniste un archet autoritaire et vigoureux, parfaitement en phase avec l’esprit de ce torrent musical.


Créée par Charlotte Bonneton et François Dumont en novembre dernier à Radio France, Et si tout recommençait (2003) de Graciane Finzi est une pièce d’une durée de dix minutes, qui comprend une introduction, un thème et cinq variations, se concluant effectivement par un retour à l’atmosphère initiale. Magnifiquement conçue pour le violon, elle met plus particulièrement en valeur la justesse des aigus, le lyrisme, et la finesse de l’interprète.


Les Mythes (1915) de Szymanowski demeurent encore suffisamment rares pour que l’on soit en droit de regretter que seul le premier des trois mouvements, La Fontaine d’Aréthuse, ait été donné, surtout quand c’est avec cette conjugaison d’intensité et de raffinement qui fait tout le prix de cette musique. Dans la troisième des huit Etudes-caprices (1863) pour violon seul de Wieniawski, les petits accrocs ne dissimulent pas l’essentiel, c’est à dire une véritable assurance et une main gauche d’une redoutable solidité.


A l’attention de Pavel Kochanski, par ailleurs dédicataire des Mythes de Szymanowski, Prokofiev adapta en 1925 les cinq Mélodies sans paroles qu’il avait destinées cinq ans plus tôt à la cantatrice Nina Kochitz. Il est dommage qu’on n’entende pas plus souvent ces courts morceaux d’allure populaire, qui permettent d’apprécier une conduite très sûre des phrasés.


Conclusion quasi obligée, l’épisode pyrotechnique, en l’espèce les Airs bohémiens (1878) de Sarasate, sera également, une fois n’est pas coutume, hautement poétique, tant la violoniste parvient à faire ressortir, sans jamais larmoyer, le caractère expressif de la première partie. De même, en bis, le thème du film La Liste de Schindler (1993) de Steven Spielberg, une musique de John Williams immortalisée par Itzhak Perlman, est joué avec une intelligence confondante.



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com