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Dans un rêve Paris Théâtre Mogador 03/06/2004 - Maurice Ravel : Introduction et allegro
Ernest Chausson : Concert, opus 21
Roland Daugareil (violon), Eric Le Sage (piano)
Marie-Pierre Chavaroche (harpe), Vincent Lucas (flûte), Pascal Moraguès (clarinette), Serge Pataud, Angélique Loyer (violon), Ana Bela Chaves (alto), Emmanuel Gaugué (violoncelle)
Dans le cadre de ces samedis au cours desquels un musicien de l’Orchestre de Paris conçoit un programme auquel il associe quelques-uns de ses collègues ainsi que des artistes invités, la harpiste Marie-Pierre Chavaroche proposait, sous l’intitulé – quelque peu énigmatique, en forme d’oxymoron – de «Grandes miniatures à la française», deux œuvres de musique de chambre écrites pour des formations atypiques. Compte tenu du temps imparti à ces fins de matinée (cinquante minutes sans entracte), on regrettera vivement qu’il ait fallu renoncer au Quintette de Jean Cras, initialement annoncé: non seulement il aurait permis à la harpiste de se mettre plus longuement en valeur, mais il aurait offert une synthèse intéressante des deux grands courants de la musique française représentés par ailleurs («impressionnisme» chez Ravel et influence franckiste chez Chausson).
Mais c’est bien la seule réserve qu’appelle ce concert. Car dans l’Introduction et allegro (1905) de Ravel, les solistes de l’Orchestre de Paris obtiennent un mélange idéal de moelleux et de finesse, un rien suranné, comme dans un rêve, qui fait tout le prix de cette pièce, servie en outre par une cadence de harpe que Marie-Pierre Chavaroche restitue de façon miraculeuse.
Le plat de résistance, pas vraiment une «miniature», était le Concert (1891) de Chausson. Ici, rien de cette lourdeur que l’on associe parfois au franckisme, mais une grâce fauréenne, une retenue bien française, où l’essentiel est suggéré plutôt qu’exprimé. La Sicilienne est ainsi délicate à souhait et le Grave évite tout pathos inutile, ce qui n’empêche pas les mouvements extrêmes de laisser place à l’énergie (Décidé, saisi à bras-le-corps dès les trois notes initiales du piano) ou à la danse (Très animé final). Dans ce mélange de pudeur et d’intensité, le violon élégant et vibrant de Roland Daugareil et le piano plus impétueux d’Eric Le Sage s’illustrent tout particulièrement.
Simon Corley
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