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Au sommet de son art

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
02/09/2004 -  
Edvard Grieg : Sonate pour violon et piano n° 3, opus 45
Serge Prokofiev : Sonate pour violon et piano n° 2, opus 94 bis
Béla Bartok : Rhapsodie pour violon et piano n° 1, sz. 86
Johannes Brahms : Sonate pour piano et violon n° 3, opus 108

Vadim Repin (violon), Itamar Golan (piano)


Tout au long d’un récital au programme dont la variété accroissait le caractère périlleux, Vadim Repin aura à nouveau sidéré par une maîtrise phénoménale de l’instrument et du discours: une solidité et une précision jamais prises en défaut, un archet tour à tour acéré, généreux ou effleurant tout juste la corde, une puissance et une justesse irréprochables jusque dans l’extrême aigu. Et si certains de ses confrères s’en tiennent là, ce qui suffirait peut-être déjà à notre bonheur, le violoniste russe, sans se refuser le luxe d’une sonorité ample, qui est aussi celle de son Stradivarius «Ruby» (1708), va bien au-delà d’une perfection froide et démonstrative ou d’une virtuosité exhibitionniste et dévoyée. Difficile de ne pas penser ici par exemple aux excès dans lesquels verse parfois désormais Maxim Vengerov, son camarade d’études chez l’incontournable Zakhar Bron (voir ici, ici et ici).


Dans la Troisième sonate pour violon et piano (1887) de Grieg – décidément à l’honneur à Paris, avec, en trois jours, son Concerto pour piano (voir ici) et sa Suite Holberg (voir ici) – Repin restitue à la fois la véhémence du propos et sa fragilité (Allegro molto ed appassionato). Sa qualité de phrasé, au prix d’une légère tendance au portamento expressif, lui permet de rendre justice au lyrisme simple et sans mièvrerie de l’Allegretto espressivo alla romanza et il conclut par un Allegro molto spectaculaire mais sans débordements.


Malgré une aisance apparente, Repin met encore plus nettement en valeur ses moyens techniques dans la Seconde sonate pour violon (1943-1944) de Prokofiev, avec une finesse de toucher qui sait subitement se muer en une attaque aussi exacte qu’énergique. On le sent ici tellement dans son élément que cette sonate semble couler de source sous ses doigts et se dérouler avec une évidence tranquille, et ce, quelle que soit la nature de ses climats successifs.


Plus exigeante, la seconde partie maintient un niveau exceptionnel. On pourra certes préférer, dans la Première rhapsodie pour violon et piano de Bartok (1928), un style plus rugueux et des déhanchements un rien moins contrôlés, mais si Repin la conçoit en un sens comme une pièce de genre, presque à la manière de Tzigane de Ravel, c’est pour y faire preuve d’autant plus de raffinement.


C’est dans un esprit toujours apollinien qu’il aborde la Troisième sonate pour violon et piano (1886-1888) de Brahms, culminant dans un Adagio d’une simplicité et d’une droiture exemplaires. Cependant, comme libéré et abandonnant, du coup, cette posture fermement campée sur ses jambes qui – comme d’ailleurs son jeu – rappelle tant Oïstrakh, il prend à bras-le-corps le Presto agitato final, qui évoque ainsi le Brahms fougueux des œuvres de jeunesse davantage que celui la maturité. Le piano très symphonique et généralement plus fantasque d’Itamar Golan s’accorde parfaitement à cette vision.


Trois bis de près de vingt minutes viennent enfin régaler le public de cette pyrotechnie musicale sans laquelle un récital ne saurait sans doute prendre fin. Mais, ici comme ailleurs, si le pianiste s’autorise quelques clins d’œil appuyés, Repin, quant à lui, conserve un chic à toute épreuve, que ce soit dans la Carmen Fantasy (1946) de Waxman ou dans le Tambourin chinois de Kreisler.



Simon Corley

 

 

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