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Miraculeux

Paris
Théâtre de la Ville
12/13/2003 -  
Ludwig van Beethoven : Sonate n° 4, opus 102 n° 1
Zoltan Kodaly : Adagio
Bohuslav Martinu : Sonate n° 3, H. 340
Gabriel Fauré : Sonate n° 1, opus 109
Antonin Dvorak : Rondo, opus 94
Leos Janacek : Conte – Presto

Miklos Pérenyi (violoncelle), Dénes Varjon (piano)


Miraculeux.


Face une telle perfection, comment en effet qualifier autrement ce récital donné par Miklos Pérenyi et Dénes Varjon?


Il y a d’abord l’intelligence, la richesse, l’exigence et la variété d’un programme dont chacune des deux parties est construite de façon similaire: une sonate de la dernière manière des deux grands sourds de la musique (Beethoven puis Fauré), une pièce de genre (Kodaly puis Dvorak), une grande œuvre tchèque (Martinu puis Janacek).


Il y a surtout ce que l’on ne peut même plus appeler l’interprétation ou le jeu d’un violoncelliste, mais tout simplement l’art d’un immense musicien. Pérenyi, qui fêtera ses cinquante-six ans le mois prochain, n’a certes pas accompli, à ce jour, la «carrière» d’un Rostropovitch ou même celle de son compatriote Janos Starker. Mais c’est peut-être à ce relatif isolement que nous devons la préservation d’une identité forte, d’un perfectionnisme intraitable, d’une humilité méticuleuse, toutes qualités qui apparaissent dès les premiers instants de la Quatrième sonate (1815) de Beethoven.


Car il fait partie de ceux qui s’effacent, ego aussi bien qu’instrument, devant la partition. Ce n’est certes pas ici le violoncelle des grands élans et du pathos, des raclements et autres grognements. De ce point de vue, et pour poursuivre la comparaison avec ses deux confrères, Pérenyi tient davantage de l’aristocrate Starker que du terrien Rostropovitch: chez lui, le beau son ou la puissance ne constituent pas des fin en soi. Pour autant, son travail sur la texture sonore est véritablement époustouflant, mais il n’est destiné qu’à révéler la vérité de l’œuvre: clarté, transparence, finesse, pureté, le mot exact manque pour définir une qualité aussi immatérielle sans être désincarnée.


Une telle démonstration de force, qui ne connaît pas le moindre relâchement, est-elle uniquement didactique? Une telle précision en devient-elle froide ou sclérosante? Pas le moins du monde: l’Adagio (1905) de Kodaly, d’une grande noblesse d’expression, dépouillé et pudique, dépourvu de la moindre facilité, suffit à le démontrer. Pérenyi ne tombe pas non plus dans le piège consistant à appliquer la même recette à toutes les musiques, ce que la diversité de ce concert permettait précisément d’illustrer: la radieuse Troisième sonate (1952) de Martinu, soutenue par le piano vitaminé et vigoureux de l’excellent Dénes Varjon, exprime ainsi un lyrisme contenu, mais aussi un engagement total, qui en révèlent la parenté avec Dvorak.


Dans la Première sonate (1917) de Fauré, malgré une impression globale d’apesanteur, l’archet ne se contente pourtant pas d’effleurer la corde, car le son se colore ici ou là subtilement, prend une rondeur plus lisse que moelleuse, sans aspérités, idéal, comme débarrassé de toutes ses impuretés. Mais la sensibilité n’en affleure que mieux.


Avec le Rondo (1891) de Dvorak, l’humour pince-sans-rire et la précision alternent avec un lyrisme plus expansif, tandis que le Conte (1910) et le bref Scherzo (dont la genèse pourrait être liée à celle du Conte) de Janacek montrent que Pérenyi sait également faire preuve d’une exceptionnelle force narrative et dramatique. Devant l’accueil enthousiaste d’une salle comble, son visage s’éclaire enfin d’un sourire serein, et il offre en bis la deuxième des Phantasiestücke (1849) de Schumann.



Simon Corley

 

 

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