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A la découverte de Psyché

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
04/10/2003 -  et 11 avril 2003

Serge Prokofiev : Concerto pour piano n° 2, op. 16
César Franck : Psyché


Elisabeth Leonskaïa (piano), Isabella Rossellini (récitante)
Chœur de Radio France, Philip White (chef de chœur)
Orchestre national de France, Kurt Masur (direction)

Deux esthétiques en contraste total, mais un programme passionnant, servi par des interprètes inspirés.


Moins de trois mois après l’interprétation qu’en livrèrent Tzimon Barto et Christoph Eschenbach (voir iciici), le Deuxième concerto de Prokofiev est à nouveau à l’affiche à Paris. C’est sans doute le propre des très grandes œuvres que de pouvoir susciter des lectures différentes, voire opposées, tant Elisabeth Leonskaïa en a une approche manifestement antinomique de celle du pianiste américain. Plutôt que de se livrer à l’exercice - vain, mais souvent payant - consistant à transformer le clavier en punching-ball, elle s’attache, sans la moindre concession ni fioriture, à mettre en valeur tout ce que la partition recèle de subtilité, de finesse, de légèreté, de legato et, bien entendu, de lyrisme. C’est ainsi que, de façon assez inhabituelle, l’on se retrouve parfois plus près de Debussy que de Rachmaninov. Surprenant, le résultat n’en est pas nécessairement moins prenant, plus humain que surhumain, plus fragile qu’énergique, reflet d’un drame intérieur davantage que d’une tempête extérieure. Elément-clé du dispositif, faisant de l’orchestre un acteur à part entière de ce concerto, Kurt Masur dessine un accompagnement particulièrement réussi, tantôt à la pointe sèche, tantôt soulignant le raffinement et la transparence de l’instrumentation.


Bien loin de ces tourments futuristes, Psyché n’est pourtant antérieure que d’un quart de siècle... Mais c’est bien d’un autre univers qu’il s’agit, même si certaines préoccupations d’ordre spirituel pourraient établir un lien entre les deux compositeurs. Rarement donné en concert dans son intégralité (trois quarts d’heure), le «poème symphonique» de Franck, dédié à Vincent d’Indy, fait appel à un chœur mixte, qui intervient à trois reprises. Aux paroles chantées, qui auraient été écrites par le propre fils du compositeur, s’ajoute - à l’initiative de Masur, au cours son séjour new-yorkais - une partie narrative, intervenant, outre dans un prologue qui lui est exclusivement confié, entre les sept épisodes des trois parties. Précédant de peu la Symphonie en ré mineur mais d’une instrumentation plus chatoyante, Psyché porte indéniablement la marque wagnerienne - Parsifal et Tristan, bien sûr, mais aussi La Walkyrie - tout en annonçant déjà la Symphonie en si bémol de Chausson ou même Bacchus et Ariane de Roussel (Le sommeil de Psyché).


Ceci étant, Franck n’y demeure pas moins reconnaissable entre tous, à la fois dans les enchaînements harmoniques inattendus et dans les caractéristiques expressives: de la narration mythologique, le compositeur, comme s’il avait voulu justifier le surnom (ou le cliché) de «Pater seraphicus» qui lui est attaché, retient en effet l’aspect mystique plus que la dimension charnelle, la musique oscillant entre extase frémissante et bons sentiments. Hormis deux ou trois piliers du répertoire (Symphonie, Sonate pour violon et piano, Prélude, choral et fugue), Franck reste d’ailleurs assez largement négligé et l’on se demande pourquoi une musique aussi étonnante et visionnaire que Ce qu’on entend sur la montagne, par exemple, n’est pas jouée plus souvent. Isabella Rossellini récite les textes de liaison entre les épisodes, encombrée d’un accent certes léger, mais persistant. Masur, de son côté, réalise un remarquable travail, à l’avantage de l’Orchestre national de France, qui passe sans peine de la plénitude à l’évanescence.



Simon Corley

 

 

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