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Vers les beaux jours ?

Paris
Opéra National de Paris - Bastille
11/23/2002 -  28 novembre, 2, 6, 10, 22, 25, 28, 30 décembre
Giacomo Puccini : Turandot
Abdrea Gruber (Turandot), Soile Isokoski / Alexia Cousin les 28, 28 et 30 - 12 (Liu), Vladimir Galouzine (Calaf), Julian Konstantinov (Timur), Charles Burles (Altoum), Franck Ferrari (Ping), Francisco Vas (Pang), Doug Jones (Pong), Yuri Nechaev (Mandarin)
Francesca Zambello (mise en scène), Alison Chitty (décors et costumes), Dominique Bruguière (lumières)
Orchestre et Choeurs de l'Opéra National de Paris, Mark Elder (direction)

La Nature est cruelle envers certains rôles. Qu'on en juge : pas une Turandot acceptable depuis vingt ans, plus de Calaf électrisant depuis quinze. D'agréables Liu, certes, mais loin des splendeurs du chant italien de jadis… Quand voici qu'au détour d'une reprise sans tambours ni trompettes (si l'on peut dire, s'agissant d'une telle partition), surgit une équipe qui ressucite en nous la bonne vieille réaction de plaisir. Nuançons, à vrai dire, concernant Vladimir Galouzine, moyens et tempérament exceptionnels, Hermann et Otello sans rival aujourd'hui, mais dont Calaf marque la limite en terres latines, tant la beauté pleine et lumineuse du timbre, le cantabile soutenu lui font défaut - trop de vibrato et de tensions dans l'aigu, de défauts dans la justesse. Mais Andrea Gruber, débutant in loco, sans afficher l'absolue pureté de timbre et de dessin que nous rêvons à la Princesse de glace (Sutherland au disque, notre impossible modèle) déploie une voix immense et pleine, des raucités d'un grave qui donne le frisson au poignard d'un aigu magnétique. Surtout, elle CHANTE, soignant le phrasé et la dynamique de son air d'entrée et des dialogues avec une attention qui fait ressortir les passages purement sportifs du rôle, comme plus personne ne le fait aujourd'hui. Après Eaglen, Marc et Sweet ici même, ou, horribile dictu, Schnaut à Salzbourg, quel soulagement ! Isokoski joue évidemment une partie moins risquée, ce qui ne l'empêche pas de nous offrir les plus parfaits moments de musique de toute la soirée : tant de naturel assorti à tant d'art dans l'émission, la place de la voix, l'équilibre des couleurs, le soutien parfait de la ligne se rencontrent rarement, et les attaques pianissimo, les aigus filés du troisième acte sont parmi ce qu'on ait entendu de plus beau sur cette scène. Comble de bonheur, l'équipe de soutien est parfaite : Konstantinov bien plus épanoui en Timur qu'en Boris, Burles idéal en Empereur sur lequel le temps ne semble pas avoir de prise, trio à l'italien parfois empêtré, mais d'une remarquable aisance scénique -suivre Doug Jones, excellent ténor de caractère. Voulait-on un bonheur plus rare encore en ces lieux, souvent hantés par des chefs de piètre envergure ? Mark Elder y réussit donc sa meilleure prestation, alliant une formidable discipline (pas un seul décalage avec le chœur un soir de première), le goût des jeux de couleur auquel l'orchestre se prête avec son chatoiement habituel, à une construction très fine et pensée, qui évite d'innoder la salle de décibels pour privilégier des atmosphères quasi-chambristes et ménager une montée progressive de la tension à chaque épisode forte. Du coup, et même si les protagonistes féminines ne sont pas des Duse, la production au modernisme conventionnel et à la gestuelle souvent pataude de Francesca Zambello n'a jamais paru aussi cohérente dans sa gestion d'espaces (une tendresse pour la scène des énigmes façon Star Wars) parfaitement habités par la musique.


Vincent Agrech

 

 

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