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Rachmaninov maître de l’orchestre Paris Théâtre des Champs-Elysées 12/18/2025 - Serge Rachmaninov : Les Cloches, opus 35 – Symphonie n° 3, opus 44 Marina Rebeka (soprano), Pavel Petrov (ténor), Alexander Roslavets (basse)
Chœur de Radio France, Agnieszka Franków-Zelazny (cheffe de chœur), Orchestre national de France, Cristian Măcelaru (direction)
 C. Măcelaru (© Christophe Abramowitz)
Deuxième concert du cycle Rachmaninov de l’Orchestre national de France dirigé par Cristian Măcelaru. Il commence par les grandioses Cloches de 1913, pour soprano, ténor, baryton et chœur mixte, sur un poème d’Edgar Poe traduit par le symboliste russe Constantin Balmont, l’inspirateur du Roi des étoiles de Stravinsky. S’y déclinent un peu les quatre âges de la vie humaine – on dirait presque les quatre saisons –, qui recoupent les mouvements de la symphonie traditionnelle. On y retrouve aussi le Dies iræ grégorien omniprésent chez le compositeur russe.
Solide et précis, le chef roumain restitue la puissance visionnaire de la symphonie chorale à la tête d’un National des bons soirs, avec un magnifique cor anglais dans le Lento lugubre final, et d’un Chœur de Radio France bien préparé par Agnieszka Franków-Zelazny. On souhaiterait néanmoins plus de mystère et de sensualité pour les noces du Lento, délicatement phrasées par une Marina Rebeka dont le timbre a perdu un peu de sa rondeur. Pavel Petrov a assez de métal et de vaillance pour affronter le chœur tout au long de l’Allegro initial, tandis qu’Alexander Roslavets, au mordant ténébreux, semble chanter un opéra de Moussorgski – ou cet ignoble Boris Izmaïlov de Lady Macbeth de Mzensk qu’il interprète en ce moment à la Scala, ce qui ne messied pas aux « lugubres cloches de fer » du Lento lugubre. Le diabolique Presto, effrayante vision d’un incendie d’apocalypse, où les solistes laissent la place au chœur, est remarquablement tenu.
Cristian Măcelaru déploie les mêmes qualités dans la Troisième Symphonie. Dès le début, on apprécie des vents aux belles couleurs et des cordes homogènes – l’orchestre, cependant, n’atteint pas le niveau de l’Orchestre de Paris entendu la veille. La direction offre une lecture unitaire, sans excès d’emphase, avec une belle maîtrise du temps musical. Elle paraît néanmoins plus robuste qu’inspirée. Le thème lyrique des violoncelles, par exemple, du Lento - Allegro moderato initial pourrait respirer plus largement. On souhaiterait aussi des climats plus caractérisés, plus suggestifs, dans l’ensemble de la partition, dont le final, au fugato impeccable, manque un peu de contrastes. Quoi qu’il en soit, ce concert a montré à ceux qui en douteraient encore que Rachmaninov est également un maître de l’orchestre. Prochain concert le 21 mars, avec la Deuxième Symphonie.
Didier van Moere
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