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Gstaad célèbre la vie et les vivants

Gstaad
Tente du festival
08/30/2025 -  
Giuseppe Verdi : Messa da Requiem
Eleonora Buratto (soprano), Elīna Garanca (mezzo-soprano), Piero Pretti (ténor), Roberto Tagliavini (basse)
Chor der Oper Zürich, Orchester der Oper Zürich, Gianandrea Noseda (direction)




C’est l’éternelle question : le Requiem de Verdi est-il une œuvre religieuse ou le vingt‑neuvième opéra du compositeur ? Pour le chef Gianandrea Noseda, la réponse est claire : Verdi était athée et son Requiem n’est pas donc pas une messe des morts mais bien une célébration de la vie et des vivants, comme il l’a d’ailleurs expliqué après son concert à Gstaad. Le maestro a ainsi opté pour une lecture particulièrement théâtrale et dramatique de l’ouvrage, exacerbant les contrastes et la dynamique, alternant tempi particulièrement rapides et passages longuement étirés, exigeant des musiciens de l’Orchestre de l’Opéra de Zurich des crescendi saisissants pour passer en quelques secondes du triple pianissimo au triple fortissimo, avec des déflagrations à faire se réveiller les défunts dans le Dies iræ. La présence des trompettes dans toute la salle a participé de ce concept. Gianandrea Noseda s’est parfois laissé emporter par sa fougue et son énergie, si bien que l’orchestre n’a pas toujours pu éviter de couvrir les solistes. Etonnant, quand on sait que le chef a dirigé à Zurich un Ring que l’on pourrait qualifier de chambriste, tant tous les détails musicaux et vocaux étaient parfaitement audibles. Ou peut‑être est‑ce dû à l’acoustique ingrate de la tente sous laquelle se déroulent les concerts symphoniques à Gstaad, une acoustique qui atteint clairement ses limites pour les grandes formations ? Quoi qu’il en soit, cette exécution a été particulièrement spectaculaire et saisissante.



(© Larissa Davidson)


Des quatre solistes vocaux, la soprano Eleonora Buratto est celle qui a le mieux épousé la conception du chef, offrant notamment un Libera me des plus stupéfiants, débutant par des accents énergiques et véhéments avant de se terminer sur un pianissimo à peine audible. Elīna Garanca est, quant elle, restée beaucoup plus placide, mais a séduit par sa voix chaude et parfaitement homogène, faite de velours et de miel, ainsi que par la noblesse et la profondeur de son chant. Les deux voix féminines se sont mariées à merveille. Timbre caverneux et abyssal, Roberto Tagliavini a scandé des « Mors » sépulcraux et effrayants. Remplaçant au pied levé un collègue souffrant, le ténor Piero Pretti s’est lancé avec vaillance dans un Ingemisco qui a semblé un peu trop raide et appliqué avant de déployer pleinement sa voix par la suite. On mentionnera aussi la magnifique prestation du Chœur de l’Opéra de Zurich, qui a largement contribué à la réussite de cette soirée, laquelle restera dans les annales de l’édition 2025 du Festival Menuhin de Gstaad. D’ailleurs, le long silence qui a précédé les premiers applaudissements est un signe qui ne trompe pas : le public a été conquis par ce Requiem volcanique.


Le Festival Menuhin de Gstaad a débuté traditionnellement par des concerts de musique de chambre dans les magnifiques petites églises disséminées tout autour de la célèbre station suisse, avant de se terminer par des concerts symphoniques. Le Requiem de Verdi aura été le dernier concert sous tente programmé par Christoph Müller, directeur de la manifestation, qui va quitter Gstaad au terme de cette édition 2025 pour reprendre les rênes, à compter de l’été 2026, des Settimane musicali Ascona. En vingt‑quatre ans, Christoph Müller aura réussi à transformer le Festival Menuhin, initialement axé sur la musique de chambre, en un événement multiforme, incluant des concerts symphoniques et de la musique contemporaine. Ces trois dernières années, il a instauré des cycles thématiques (« Humilité » en 2023, « Transformation » en 2024 et « Migration » en 2025) s’inscrivant dans un mouvement global de réflexion et d’engagement. Il a surtout lancé, en 2008, la Gstaad Academy, intégrant plusieurs disciplines (voix, piano, cordes, musique baroque et orchestre amateur), dont le fleuron est la Gstaad Conducting Academy, créée en 2014 et devenue depuis une référence européenne dans la formation de jeunes chefs d’orchestre. Sous sa direction, le Festival a enregistré une hausse significative de la fréquentation, passant de 14 000 à quelque 28 000 visiteurs. Dès l’été 2026, le Festival Menuhin sera dirigé par le violoniste Daniel Hope, dont la mère a été l’assistante de Menuhin. Par ailleurs, une salle devrait remplacer la tente en 2030 si tout va bien, une perspective des plus réjouissantes.


Le site du Festival Menuhin de Gstaad



Claudio Poloni

 

 

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