Back
Que la montagne est belle Bagnères-de-Bigorre Argelès-Gazost (Lycée climatique René-Billères) 07/24/2025 - Joseph Haydn : Sonate pour piano n° 46, Hob. XVI:31
Frédéric Chopin : Nocturnes, opus 62 : 1. en si majeur
Johannes Brahms : Fantasien, opus 116
Maurice Ravel : Miroirs : 2. « Oiseaux tristes », 3. « Une barque sur l’océan » & 4. « Alborada del gracioso » – La Valse Seonghyeon Leem (piano)
 S. Leem (© Eyüp Berk Kiliç)
A Piano Pic, les « vedettes », tels Erik Berchot et Mūza Rubackytė, laissent aussi la place aux talents à découvrir. C’est le cas de Seonghyeon Leem (née en 1992), formée à Séoul, Vienne et Leipzig, où elle est désormais elle‑même assistante à la Hochschule. Pour l’occasion, le festival s’est déplacé assez loin de ses bases bagnéraises pour se rendre au lycée climatique René-Billères : doté d’une acoustique très convenable, le gymnase dispose en outre de hautes baies vitrées donnant sur un paysage montagneux à la Friedrich, avec de petits sommets dans les brumes. Ce n’est certes pas le Voyageur contemplant une mer de nuages mais il est des cadres moins inspirants pour un récital.
On passera rapidement – comme la pianiste, qui ne respecte aucune des reprises – sur la Quarante‑sixième Sonate (v. 1770) de Haydn, propre, mais trop sèche et raide, pour ne se débrider quelque peu que dans le Presto final. Le Premier des Nocturnes de l’Opus 62 (1846) de Chopin change quelque peu la donne : délicatement ouvragé, il bénéficie de davantage de couleur, mais l’expression demeure ordinaire et étale, et l’ambitus dynamique assez réduit. Dans les Fantaisies opus 116 (1892) de Brahms, le Steinway donne enfin sa pleine mesure, même si le climat manque généralement de chaleur et de sentiment, sans doute pour partie en raison d’un jeu toujours très articulé et animé par un constant souci de clarté. Cela dit, l’Intermezzo (Adagio) au centre du recueil est particulièrement réussi et on peut également admirer la finesse du dernier Intermezzo (Andantino teneramente).
En seconde partie, Seonghyeon Lee salue le cent cinquantième anniversaire de la naissance de Ravel, un compositeur dont on peut penser qu’elle a eu la chance de le travailler avec Jacques Rouvier, qui fut l’un de ses maîtres à Salzbourg. Les Miroirs (1905) de Ravel sont hélas tronqués, puisque privés de leurs première (« Noctuelle ») et dernière (« La Vallée des cloches ») pièces. Elle commence donc par des « Oiseaux tristes » presque abstraits, dans une réalisation magnifique quant aux timbres comme au toucher. En revanche, s’il fallait décrire « Une barque sur l’océan » à la manière de la météo marine, on parlerait d’une houle très modérée. Appliqué mais non sans accidents, l’« Alborada del gracioso » décrit une nuit plus tiède que brûlante. Enfin, La Valse (1920) est restituée avec un trait d’une grande netteté – aucun risque de flou impressionniste, décidément, avec cette pianiste – mais semblant davantage portée par un souci de bien faire que par une nécessité expressive, manque de fluidité, d’élan, de naturel, de vénénosité et de maléfices capiteux, et il faut attendre l’apocalypse finale pour qu’elle sorte un peu de son quant‑à‑soi.
Le bis conduit d’apocalypse en apothéose, avec l’arrangement (1928) par Guido Agosti (1901‑1988) du Final de L’Oiseau de feu (1910) de Stravinski.
Le site de Seonghyeon Leem
Simon Corley
|