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Attila enflamme la Fenice Venezia Teatro La Fenice 05/16/2025 - et 18*, 20, 22, 24 mai 2025 Giuseppe Verdi : Attila Michele Pertusi (Attila), Vladimir Stoyanov (Ezio), Anastasia Bartoli (Odabella), Antonio Poli (Foresto), Andrea Schifaudo (Uldino), Francesco Milanese (Leone)
Coro del Teatro La Fenice, Alfonso Caiani (préparation), Orchestra del Teatro La Fenice, Sebastiano Rolli (direction musicale)
Leo Muscato (mise en scène), Federica Parolini (décors), Silvia Aymonino (costumes), Alessandro Verazzi (lumières)
 (© Michele Crosera)
La Fenice de Venise présente une nouvelle production d’Attila (1846) de Verdi, le neuvième opéra du compositeur et le deuxième (sur cinq) écrit pour la Sérénissime. Œuvre parmi les plus courtes du maître de Busseto, la partition est indubitablement marquée par l’urgence et la fougue. Œuvre patriotique aussi, Attila va droit au cœur des Vénitiens puisque l’ouvrage raconte la naissance de leur ville – les rescapés du « fléau de Dieu » allant se réfugier sur les îlots de la lagune – sans parler du contexte politique de l’époque de la création, lorsque Venise était occupée par les Autrichiens.
Si Attila est sans conteste l’un des plus beaux personnages de basse jamais écrit par Verdi, la véritable protagoniste de l’œuvre est Odabella, un rôle de soprano dramatique édifiant par sa puissance, sa virtuosité et l’étendue de la tessiture, plus meurtrier encore qu’Abigaille de Nabucco. La Fenice a réussi à rassembler une distribution vocale de tout premier ordre. Malgré un timbre qui a perdu un peu de son lustre avec les années, Michele Pertusi incarne un magnifique Attila, avec sa forte présence scénique, avec son expressivité de tous les instants, sculptant avec soin chaque phrase et chaque mot, et avec son chant noble et élégant ; il compose un chef des Huns féroce et violent mais aussi tourmenté et émouvant. Anastasia Bartoli est une Odabella vocalement stupéfiante : le timbre est puissant et extrêmement bien projeté, les vocalises sont ciselées avec précision, les aigus sont lumineux et les graves particulièrement sonores, sans mentionner un abattage scénique des plus convaincants. Vladimir Stoyanov impressionne par son chant noble et racé, avec un superbe legato. Antonio Poli incarne un Foresto ardent et passionné, plein de fougue et de jeunesse, quand bien même son chant manque quelque peu de nuances.
Le Chœur de La Fenice est confondant d’équilibre, de précision et d’engagement ; ses très nombreuses interventions en font un personnage à part entière. A la tête de l’Orchestre de La Fenice, Sebastiano Rolli sait rendre à merveille toute la fougue, l’urgence et la puissance de la partition, même s’il a tendance à se laisser emporter et que sa direction pèche parfois par manque de raffinement. La mise en scène de Leo Muscato est très statique, les chanteurs se contentant le plus souvent d’interpréter leurs airs sur le devant de la scène, les bras levés au ciel. La production convainc néanmoins par de somptueux jeux de lumières et par de nombreuses ombres chinoises, dans une atmosphère sombre et mystérieuse, telle que décrite dans le livret, dans un décor représentant une forêt parsemée de troncs d’arbres. Au rideau final, applaudissements enthousiastes pour tous les protagonistes de ce spectacle captivant.
Claudio Poloni
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