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Petrenko, Livermore, Buratto : le trio gagnant d’un adieu berlinois Baden-Baden Festspielhaus 04/12/2025 -
12, 15, 20* avril 2025
Giacomo Puccini : Madama Butterfly Eleonora Buratto (Cio-Cio-San), Jonathan Tetelman (Pinkerton), Tassis Christoyannis (Sharpless), Teresa Iervolino (Suzuki), Didier Pieri (Goro), Giorgi Chelidze (Le Bonze), Lilia Istratii (Kate Pinkerton), Jasurbek Khaydarov (Commissaire impérial), Aksel Daveyan (Yamadori)
Ceský filharmonický sbor Brno, Petr Fiala (chef de chœur), Berliner Philharmoniker, Kirill Petrenko (direction musicale)
Davide Livermore (mise en scène), Giò Forma (scénographie), D‑Wok (vidéos), Mariana Fracasso (costumes), Fiammetta Baldiserri (lumières)
13*, 19 avril 2025
Serge Rachmaninov : Concerto pour piano n° 3, opus 30
Richard Strauss : Eine Alpensinfonie, opus 64
Leif Ove Andsnes (piano)
Berliner Philharmoniker, Klaus Mäkelä (direction)
13, 14, 15 mars (Berlin), 14* avril (Baden‑Baden) 2025
Leos Janácek : Osud : Suite (arrangement Frantisek Jílek)
Ludwig van Beethoven : Concerto pour piano n° 5 « L’Empereur », opus 73
Béla Bartók : Concerto pour orchestre, Sz. 116
Seong-Jin Cho (piano)
Berliner Philharmoniker, Jakub Hrůsa (direction)
18*, 21 avril 2025
Ludwig van Beethoven : Symphonie n° 9 en ré mineur, opus 125
Katharina Konradi (soprano), Beth Taylor (alto), Sebastian Kohlhepp (ténor), Tareq Nazmi (basse)
Rundfunkchor Berlin, Gijs Leenaars (chef de chœur), Berliner Philharmoniker, Kirill Petrenko (direction)
 (© Christiane Haumann Frietsch)
Treize années durant, les Berliner Philharmoniker auront investi chaque printemps le Festspielhaus de Baden‑Baden, dans le cadre d’une « transplantation » du Festival de Pâques de Salzbourg qui aura finalement tourné court. A partir de l’an prochain, la prestigieuse phalange berlinoise retrouvera Salzbourg, renouant ainsi avec les origines identitaires d’un festival fondé là‑bas en 1967 par Herbert von Karajan. Une décision prise après de longues négociations, au cours desquelles l’autorité de Nikolaus Bachler, intendant du Festival de Pâques de Salzbourg nommé depuis 2020, aura vraisemblablement pesé de tout son poids.
Baden-Baden, de son côté, se voit contraint d’amorcer une nouvelle phase. Le festival pascal s’y ouvrira désormais à d’autres orchestres, pour différents concerts et toujours une production d’opéra, mutation comparable à celle que Salzbourg avait dû opérer par nécessité à partir de 2014. Pâques 2026 marquera ainsi le début de ce nouveau chapitre, avec plusieurs concerts de l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam dirigés par Klaus Mäkelä, et trois représentations d’une production de Lohengrin, mise en scène par Johannes Erath et dont la direction musicale sera confiée à Joana Mallwitz, à la tête de l’Orchestre de chambre Mahler, avec dans les rôles principaux Rachel Willis‑Sørensen (Elsa) et Piotr Beczała (Lohengrin), donc assurément une modification totale des perspectives.
Mais revenons au bilan de cette longue parenthèse berlinoise dans la station thermale badoise, période luxueuse mais marquée, il faut bien le reconnaître, par relativement peu de productions lyriques inoubliables. Parmi les vrais sommets, on retiendra certainement le Tristan et Isolde sombre et tourmenté mis en scène par Mariusz Trelinski en 2016, et Le Chevalier à la rose de 2015, intelligemment modernisé par Brigitte Fassbaender, tous deux sous la baguette inspirée de Simon Rattle, ainsi que la torrentielle Elektra dirigée par Kirill Petrenko en 2024, en dépit d’une scénographie marginalement compromise par quelques idées contestables.
En revanche, beaucoup d’autres productions auront laissé un goût d’inachevé, en raison de distributions vocales parfois insuffisantes mais surtout de mises en scène inabouties, comme La Flûte enchantée de Robert Carsen (2013), Manon Lescaut de Richard Eyre (2014), Parsifal de Dieter Dorn (2018), Otello de Robert Wilson (2019) ou encore La Dame de pique de Moshe Leiser et Patrice Caurier (2022). Et puis deux vrais et douloureux ratages scéniques restent à déplorer : Tosca de Philipp Himmelmann (2017) et la tortueuse Femme sans ombre de Lydia Steier (2023).
Enfin, il y eut l’étouffoir de la pandémie, avec deux projets avortés : Fidelio (2020), dans une mise en scène de Mateja Koleznik – décors déjà construits mais abandonnés en cours de route lors de la débâcle du confinement —, et Mazeppa (2021), initialement confié à Dmitri Tcherniakov, qui ne put finalement être donné qu’en version concertante, lors d’un festival reporté à l’automne.
Un bilan scénique qui s’avère donc contrasté, et une richesse musicale avant tout déterminée par la présence en fosse des Berliner Philharmoniker. Or, à Baden‑Baden, que ce soit sous la direction de Simon Rattle ou de Kirill Petrenko, cet orchestre n’a jamais pu démontrer une véritable identification au monde de l’opéra. L’impression d’une transplantation est toujours restée prégnante : celle d’une phalange certes somptueuse mais qui peine à s’effacer. C’était déjà le cas à Salzbourg sous la direction d’Herbert von Karajan et de ses successeurs, et ce sera vraisemblablement toujours la singularité de cette unique production lyrique annuelle des Berliner Philharmoniker, quel que soit le lieu qui l’accueille : avant tout un moment d’hédonisme sonore singulier. Et c’est aussi pour cette raison, évidemment, qu’on aura veillé scrupuleusement à ne manquer aucune de ces douze éditions « berlinoises » du Festival de Pâques à Baden‑Baden.
 (© Monika Rittershaus)
A l’heure de refermer cette parenthèse, les Berliner Philharmoniker avaient certainement à cœur d’offrir à leur public une ultime réussite. Et de fait, la somptueuse Madame Butterfly signée Davide Livermore aura pleinement répondu à l’enjeu : une apothéose, d’un niveau véritablement festivalier, voire l’une des toutes meilleures productions de cette tranche d’histoire qui s’achève.
Pas d’audace déplacée, ni de violence faite à l’œuvre, mais une lecture avant tout illustrative, le collectif D‑Wok, studio italien spécialisé dans le vidéo‑design, se retrouvant très sollicité, comme à l’accoutumée dans les productions de Davide Livermore. Sur le plateau, une maisonnette japonaise aux parois de papier translucide, structure mobile qui tourne abondamment, mais aussi en fond de scène et sur un bandeau suspendu, de larges écrans LED sur lesquels défilent en fondu‑enchaîné de multiples paysages et ambiances. Ciels d’encre, soleils levants vermillon, papillons numériques dont les couleurs se vaporisent comme des pigments en poudre, incessant ballet de pétales et de lucioles, cités japonaises tantôt futuristes tantôt traditionnelles... A chaque changement musical ou psychologique les écrans proposent un nouveau contexte, comme si la partition déclenchait en temps réel un moteur graphique.
Heureusement, Livermore parvient à structurer cette surabondance par une dramaturgie limpide, que même une transposition dans le Japon moderne et une technique de flash‑back ne viennent pas déstabiliser : le fils de Cio‑Cio‑San devenu adulte, revient au Japon en 1978, accueilli par une Suzuki grisonnante, et les deux confrontent leurs souvenirs épars. Deux temporalités cohabitent dès lors sur le plateau, les silhouettes contemporaines se faufilant parmi les protagonistes d’un passé situé juste après le second conflit mondial. Une dualité qui renforce en fait l’intensité du drame, voire nuance l’éclat parfois trop clinquant des images.
Quelques belles fulgurances jalonnent l’action : la nuit de noces, où un double masqué de Butterfly vient s’immiscer afin de subir l’étreinte brutale de Pinkerton, ce qui renforce la violence du moment ou encore l’effondrement final, quand le drapeau américain tombe comme un suaire sur le corps de Cio‑Cio‑San, tandis que la maison se mue en cage translucide, plaçant l’héroïne au centre d’un cube de lumière glaciale. Livermore ne franchit ici heureusement jamais la ligne jaune : son goût de la surcharge frise certes l’excès, mais n’y bascule jamais.
De toute façon, même quand les écrans s’embrasent ou s’obscurcissent de nuées, c’est dans la fosse que couve le véritable incendie. Les Berliner Philharmoniker insufflent à la soirée une pulsation tour à tour chambriste et orageuse. Chaque solo de bois se détache tel un idéogramme, les pupitres de vents rivalisent de subtilité avec les cordes, mais peuvent aussi s’épancher en tutti dévastateurs, et le « chœur à bouche fermée », placé dans les coulisses, flotte comme un souffle, laissant juste affleurer le timbre plaintif, à peine perceptible, d’une viole d’amour. Jamais la tension dramatique ne faiblit, Petrenko sculptant la moindre syncope, n’hésitant ni à suspendre le temps sur les respirations de Cio‑Cio‑San, ni à nous broyer cruellement les nerfs lors de climax fatidiques.
Eleonora Buratto est une Cio-Cio-San idéale : timbre lumineux, projection sans effort, technique solide, même si le timbre accuse ici ou là une relative usure. « Un bel dì, vedremo », articulé sur un fil de souffle, se lève comme une prière frémissante avant de s’épanouir en torrent d’espoir ; au suicide, la voix se réduit à un vacillement, fendant le cœur d’une salle qui retient son souffle au point que l’on pourrait y entendre un papillon voler. Face à cette titulaire à la fois sincère et sophistiquée, Jonathan Tetelman campe un Pinkerton d’une insolente santé; aigus d’un volume impressionnant, médium homogène, sourire carnassier : plus l’éclat se fait solaire, plus l’égoïsme du personnage transparaît, en un contrepoint moralement glaçant. Teresa Iervolino, Suzuki de velours, conjugue pudiquement compassion et droiture, Tassis Christoyannis, Sharpless aux cheveux d’argent, marque humainement chacune de ses répliques, quant aux comprimari, ils sont tous luxueusement distribués, le Goro insinuant de Didier Pieri, le sobre Yamadori d’Aksel Daveyan et le Bonze cauchemardesque de Giorgi Chelidze. Somme toute un sans‑faute, a fortiori pour un ouvrage aussi piégeux, qui se doit de vous laisser trois heures plus tard le cœur en miettes.
 K. Petrenko (© Monika Rittershaus)
Le charisme de Kirill Petrenko se déploie à nouveau lors de deux exécutions de la Neuvième Symphonie de Beethoven, le Vendredi Saint, puis dès le lundi de Pâques à 11 heures, donc au lendemain même de la dernière Madame Butterfly : un véritable marathon pour le chef et les musiciens, malgré la relative brièveté du programme. Un concert dont pourtant seul le quatrième mouvement laisse une empreinte indélébile. Petrenko, homme de théâtre, y canalise l’énergie avec une autorité galvanisante : contrôle rigoureux de la masse chorale, écoute extrême d’un remarquable quatuor se solistes, gradation irrésistible des dynamiques jusqu’à l’exultation finale... Au‑delà de cette clarté évidente d’un texte musical toujours restitué avec une précision maniaque, une telle fédération de toutes les forces en présence, vu la portée humaniste du sujet, et a fortiori en ce moment, bouleverse profondément.
Le prix à payer ? Trois autres mouvements moins répétés, et au cours desquels on compte beaucoup, et sans doute trop, sur l’expérience acquise. En temps réel, Petrenko tente encore de faire passer de multiples messages, en termes de phrasés et de nuances, alors que tout ceci devrait aller bien davantage de soi. Ces ajustements tardifs troublent les réflexes collectifs au point de déstabiliser une petite harmonie parfois incertaine et de toute façon relativement masquée par un effectif de cordes très nourri. On a plutôt l’impression d’assister, du moins lors de ce premier concert, à une répétition générale de luxe. Il est vrai que les tempi choisis, particulièrement véloces (mais pas davantage que ceux d’Abbado en son temps), ne facilitent pas non plus la mise en place rigoureuse de tous les détails. Et puis on s’avoue aussi un peu déçu par un Adagio tellement rapide qu’il peine à respirer à l’aise. On y attend vainement ces trouées de lumière où le ciel devrait s’ouvrir, alors que la battue, obstinément pressée, maintient l’horizon trop bas.
 K. Mäkelä, L. O. Andsnes (© Monika Rittershaus)
Deux autres programmes symphoniques encore, plus de nombreux concerts de musique de chambre, le menu de ce Festival de Pâques est comme toujours pantagruélique, une pléthore voulue d’ailleurs dès le début par les Berliner Philharmoniker à Baden‑Baden, mais qui impose des cadences difficiles à tenir. On remarquera du reste à partir de l’an prochain, à Salzbourg, une réduction discrète mais significative de la voilure, et sans doute pour d’assez bonnes raisons. Maintenir une qualité absolue sur tous les fronts reste difficile, même pour un orchestre d’élite, a fortiori quand s’enchaînent soir après soir des programmes lourds.
En tout cas, Klaus Mäkelä n’a pas choisi non plus la parcimonie. Fort de son intimité avec la Symphonie alpestre de Richard Strauss, qu’il programme volontiers lors de ses débuts dans chaque salle, le chef la dirige ici avec une maîtrise technique éclatante, battue d’une précision implacable et intentions lisibles au premier coup d’œil. Le voyage se déploie comme un vaste panorama de granit et de lumière, monumentale fresque montagnarde assurément impressionnante, mais qui peut franchir occasionnellement un certain mur du son. Une exécution certes modèle mais où la jeunesse du chef transparaît encore dans une gestion globalement insuffisante des dynamiques, l’impeccable soufflerie berlinoise se voyant parfois lâchée sans bride. Un véritable torrent d’air se rue de temps à autre dans la salle, spectaculaire mais excessif. On aurait aimé que Mäkelä, à l’exemple d’un Karajan autrefois, sculpte davantage ces déferlements pour leur donner plus de rondeur et de second degré, au‑delà de la seule puissance de cartes postales grandioses. Mais le potentiel est bien là, et l’affinage viendra. Parmi la génération de « baby‑chefs » obstinément promus aujourd’hui, Mäkelä apparaît certainement comme le plus solide et le plus prometteur.
Une maîtrise évidente aussi dans l’accompagnement du Troisième Concerto de Rachmaninov, d’une sécurité rythmique à même de mettre le soliste parfaitement à l’aise, en aplanissant toutes les difficultés et en ménageant aussi aux pupitres de vents de beaux espaces de poésie, dont les splendides solos de cor de Yun Zeng, d’une inoubliable beauté (une recrue encore récente, mais de haut vol). Exécution pianistique par ailleurs exemplaire, l’une des plus belles jamais entendues de ce concerto impossible, parce que, justement, tout y paraît à hauteur de l’exécutant, du fait de possibilités techniques illimitées, et ce presque sans effort apparent. Tout juste peut‑on relever chez Leif Ove Andsnes, dans les passages les plus ardus, une véritable concentration d’athlète, le regard ne perdant aucun détail du clavier de vue, ni à gauche ni à droite, et l’effort des deux bras restant parfaitement synchronisé avec un rythme respiratoire perceptiblement accéléré. Un grisant mélange de musicalité et d’impact physique, qui laisse s’épanouir le lyrisme naturel de cette musique à la fois sans aucune limite mais sans aucun débordement intempestif non plus. Assurément du grand art, que l’on retrouve en bis dans une exécution de la Deuxième des Etudes‑Tableaux de l’Opus 33, d’une précision et d’une implacabilité de flux quasiment ravéliennes.
 S.-J. Cho, J. Hrůsa (© Monika Rittershaus)
Et puis il y a aussi, comme presque chaque année, le « concert de trop ». Celui qui, malgré l’excellence annoncée de l’orchestre, ne convainc pas, ou pas assez, parce qu’on y a vraiment trop tiré sur la corde, en négligeant le facteur lassitude et fatigue, voire parce que les bons ingrédients n’y sont pas. Jakub Hrůsa est toujours un aussi bon chef, mais il dirigeait encore trois soirs auparavant au Carnegie Hall. Est‑ce bien raisonnable ? De leur côté, les Berliner Philharmoniker ont certes répété et joué plusieurs fois ce programme avec lui dans leur salle en mars dernier, et on a eu à cœur de lui reconstituer globalement la même formation de musiciens, afin de ne pas trop déstabiliser l’ensemble, mais que reste‑t‑il encore du travail initial un mois plus tard ? Plutôt le meilleur dans une belle exécution du Concerto pour orchestre de Bartók, où la vivacité du chef voire l’engagement de tous les pupitres de vents (excellent Giuoco delle coppie) sauvent la mise. En revanche, le début de la suite d’orchestre tirée de l’opéra Osud (Destin) patine, les cordes peinant à trouver d’emblée leur ampleur. De surcroît, cette belle partition paraît hétéroclite, un assemblage qui n’est de toute façon pas de la main de Janácek, et qu’il faudrait davantage reprendre en détail pour parvenir vraiment à le faire sonner, alors qu’ici tout le monde gère surtout l’intendance.
Et enfin il y a ce bien curieux Concerto « L’Empereur », dont le soliste, pourtant nimbé d’une flatteuse aura de « musicien en résidence » à Berlin cette saison, n’a vraiment rien d’impérial. On ne voudrait pas donner l’impression de s’acharner sur Seong‑Ji Cho, que l’on entend pour la quatrième fois maintenant au Festspielhaus de Baden‑Baden en moins de trois ans, toujours dans des concertos, mais on pourrait citer une kyrielle de pianistes mondiaux à même de jouer aujourd’hui ces chevaux de bataille du répertoire de façon plus musicale et intéressante. Une fois posées de classiques flatteuses considérations techniques, à l’égard d’un jeu certes d’une sécurité stupéfiante, encore que marqué par un enfoncement tellement vigoureux des doigts dans le clavier qu’on en entend le bois des touches claquer, reste à s’interroger sur la flagrante absence de musicalité du résultat. Avec un curieux acharnement sur l’avant‑dernière octave supérieure du piano, qui sonne comme un xylophone, des traits rapides inexpressifs, voire une désolante impression de vide créatif. Ne restent pour s’extasier que quelques passages joués ostensiblement pianissimo, qui se fondent de façon intéressante dans la substance de l’orchestre, mais c’est bien peu. En bis, une méconnaissable « La Chasse », pièce finale d’En plein air de Bartók, aussi mécanique et attractive que si elle était jouée au marteau‑piqueur. Donc, un pianiste dont l’omniprésence internationale pose question. Concert après concert, on cherche toujours la clé d’une carrière aussi fulgurante, sans la trouver...
A l’heure du bilan, ces ultimes Osterfestspiele de Baden‑Baden à l’heure berlinoise auront été marqués par une affluence record, avec de nombreuses soirées données à guichets fermés. Dernier sursaut avant un adieu qui ne sera peut‑être qu’un au revoir ? Les Berliner Philharmoniker s’absentent pour cinq ans, mais les mirages de Salzbourg vont‑ils vraiment se concrétiser ? Rappelons le menu : une Tétralogie entière, entrelardée à mi‑parcours par Moïse et Aaron d’Arnold Schoenberg, projet mis en scène par l’aventureux et peu consensuel Kirill Serebrennikov, à raison d’une production par année, et de surcroît, ce à quoi personne ne semble pour l’instant avoir prêté attention, prévu non pas au Grosses Festspielhaus cher à Herbert von Karajan, mais au Manège de rochers (Felsenreitschule), qui n’a pas du tout ni la même acoustique, ni la même jauge. Donc, entregent de Nikolaus Bachler ou pas, on reste curieux de ce qui va réellement se passer au cours des prochains printemps (de toute façon certainement moins cléments météorologiquement qu’à Baden‑Baden) dans la ville de Mozart...
Laurent Barthel
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