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Sibelius par l’un des siens Paris Philharmonie 04/23/2025 - et 24 avril 2025 Johannes Brahms : Ouverture tragique, opus 81
Richard Strauss : Quatre derniers lieder
Jean Sibelius : Symphonie n° 5, opus 82 Elsa Dreisig (soprano)
Orchestre de Paris, Jukka-Pekka Saraste (direction)
 J.-P. Saraste (© Felix Broede)
Voilà deux ans que Jukka-Pekka Saraste n’avait pas été l’hôte l’Orchestre de Paris. Son dernier programme associe l’Ouverture tragique de Brahms, les Quatre derniers Lieder de Strauss et la Cinquième Symphonie de Sibelius : le chef finlandais y ravive les derniers feux du romantisme, que le compositeur de la Valse triste transcende à travers un renouvellement très audacieux de la forme.
Assez éruptive, l’Ouverture tragique convainc par la franchise des attaques et la netteté des contours, le refus de toute lourdeur. Elsa Dreisig nous fait ensuite oublier les pitoyables Quatre derniers lieder d’Angel Blue aux Champs‑Elysées le mois dernier. Elle possède ce qui manquait à l’Américaine : les mots, si essentiels ici, et une ligne, grâce notamment à la longueur du souffle. Certes on pourrait souhaiter timbre plus rond, médium et grave plus charnus, mais la respiration est là, l’esprit aussi. Après sa fascinante Salomé aixoise, la soprano confirme ses affinités straussiennes. L’orchestre pourrait seulement mieux respirer, se montrer moins sonore et, surtout, plus sensuel... plus straussien, en un mot.
Dans Sibelius, en revanche, Saraste est chez lui – dès la fin des années 1980 il enregistrait une intégrale des Symphonies. Sa Cinquième, aux tempos allants, montre une parfaite maîtrise du temps musical, pierre d’achoppement de beaucoup d’interprétations. Le Tempo allegro moderato donne le ton, abrupt, plus minéral que lyrique, d’une beauté sans concession, qui met les timbres à nu. On ne cherche pas trop, ici, à créer des climats ou des paysages : Saraste n’est pas un visionnaire panthéiste, il conçoit la partition comme une forme pure. Aucune sécheresse pour autant, aucune raideur, la baguette fait danser les trois temps de l’Allegro moderato. Le mouvement lent, aux variations à la fois solidement et subtilement conduites, n’est pas moins remarquable, précédant un final très pulsé, dont le crescendo de la grandiose coda, à l’instar de celui du premier mouvement, est magnifiquement dionysiaque, avec une exultation de tout l’orchestre à son sommet. Superbe.
Didier van Moere
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