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De fer et d’acier

Bruxelles
Bozar, Salle Henry Le Bœuf
02/02/2024 -  
Serge Prokofiev : Le Pas d’acier, opus 41 : Suite – Concerto pour piano n° 2, opus 16 – Symphonie n° 2, opus 40
Alexander Melnikov (piano)
Belgian National Orchestra, Stanislav Kochanovski (direction)


A. Melnikov (© Julien Mignot)


Pour la troisième fois, Bozar et le Belgian National Orchestra s’unissent pour mettre sur pied un festival consacré à un compositeur. Après Chostakovitch et Rachmaninov, au tour de Prokofiev, du 31 janvier au 4 février, sans lien avec un anniversaire ou une célébration, le compositeur étant décédé il y a bien septante ans, mais l’année passée. Le principe reste inchangé : en plus de conférences données, comme la fois dernière, par Ruben Goriely et Francis Maes, le festival propose des concerts destinés à un public assez large, dont un récital de Florian Noack, de la musique électronique par Gabriel Prokofiev, petit‑fils du compositeur, ou encore un autre par une formation invitée, l’Orchestre symphonique d’Anvers dirigé par Osmo Vänskä. Des musiciens de l’Orchestre symphonique de la Monnaie, conduit par Alain Altinoglu, en plein dans les représentations de La Walkyrie, participent aussi à ce festival, dans Pierre et le loup, avec Axelle Red, le dimanche matin. Le programme, assez copieux, et unique pour tous les événements, comporte deux intéressants textes des conférenciers, mais il vaut mieux le télécharger, car il y a très peu d’exemplaires imprimés à disposition, une des conséquences de notre – contrariante – époque dans laquelle la digitalisation constitue la norme.


La formation nationale se produit deux fois, le vendredi et le dimanche, avec le même chef, Stanislav Kochanovski, et dans un programme différent. Celui du second est assez original : en plus du Premier Concerto pour violon, l’orchestre joue la suite symphonique de Chout, un ballet peu souvent exécuté. Ce vendredi, le concert débute par des extraits d’un autre ballet, aussi commandé par Diaghilev, Le Pas d’acier (1926), musique d’esthétique futuriste, glorification de l’homme et de la machine. Les musiciens, notamment tous les pupitres des cuivres et des bois, affichent sans tarder leur haut niveau de jeu pour rendre justice à cette œuvre bien de son temps, tandis que le chef restitue avec satisfaction le ton dur et agressif de cette suite, ainsi que les couleurs, tellement reconnaissables, de la musique du compositeur.


Suit logiquement le Deuxième Concerto pour piano (1912‑1913) dont l’esprit moderniste paraît assez proche de celui de l’œuvre précédente. Alexander Melnikov en délivre une interprétation concentrée et habitée, d’une incontestable maîtrise et d’une vigoureuse fermeté. Remarquablement intégrée à un orchestre impressionnant d’expressivité et de puissance, cette exécution quasiment irréprochable se distingue par une construction solide et une progression logique, voire implacable, dans la phénoménale cadence du premier mouvement, notamment. Un bref extrait des Visions fugitives termine la prestation de ce pianiste qui, décidément, peine à esquisser un sourire.


La Deuxième Symphonie (1924‑1925), qui suit d’assez près ce concerto dans le catalogue du compositeur, occupe la seconde partie, un choix, de nouveau, parfaitement cohérent, compte tenu du reste du programme, mais aussi particulièrement intéressant. Fondée sur la même structure en deux parties que la dernière Sonate pour piano de Beethoven, cette partition dense et inventive demeure, en effet, moins souvent exécutée que les Première, Cinquième et Sixième Symphonies, cette dernière, d’ailleurs, au programme du concert de l’orchestre anversois le lendemain. Le chef, qui a bien raison de faire applaudir la partition lors des saluts, parvient, à la tête d’un orchestre hautement préparé, comme le prouvent la précision des pupitres et la netteté de la mise en place, à en proposer une interprétation solide et expressive. L’exécution attire l’attention sur ce qui distingue cette énergique et captivante symphonie, sa coupe claire, ses contrastes tranchés, son impact émotionnel, sa modernité, son avant‑gardisme, aussi. Quant aux musiciens, bien sûr les cordes, les cuivres et les percussions, ces derniers ovationnés, s’illustrent brillamment, mais ce sont bien les bois – les hautbois, clarinette, basson, dont les interventions atteignent une beauté ineffable – qui se démarquent le plus.



Sébastien Foucart

 

 

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