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Il était une nouvelle fois une mère et son fils

Bruxelles
La Monnaie
12/03/2023 -  et 5, 7, 9, 12, 13, 15, 17*, 19 décembre 2023
Nikolaï Rimski-Korsakov : Le Conte du Tsar Saltan
Ante Jerkunica (Tsar Saltan), Svetlana Aksenova (Tsaritsa Militrisa), Stine Marie Fischer (Tkatchikha), Bernarda Bobro (Povarikha), Carole Wilson (Babarikha), Bogdan Volkov (Tsarevitch Guidon), Olga Kulchynska (Princesse-Cygne, Lyebyed), Alexander Vassiliev (Skomorokh, Marin), Nicky Spence (Messager, Marin), Alexander Kravets (Vieil homme, Marin)
Chœurs de la Monnaie, Emmanuel Trenque (chef des chœurs), Orchestre symphonique de la Monnaie, Timur Zangiev (direction musicale)
Dmitri Tcherniakov (mise en scène, décors), Elena Zaytseva (costumes), Gleb Filshtinsky (vidéo, lumières)


(© Forster)


En juin 2019, cette production du Conte du Tsar Saltan (1900) avait enchanté : à l’instar de Laurent Pelly pour Le Coq d’or, Dmitri Tcherniakov avait brillamment mis en scène ce fabuleux opéra de Rimski-Korsakov. Après Strasbourg, la voici de nouveau à l’affiche de la Monnaie en cette fin d’année.


Plaisir renouvelé. Le metteur en scène a intelligemment réussi à mêler la réalité à l’imaginaire en recréant sur un plateau, qui se prolonge, grâce à des passerelles, dans la salle, l’univers de ce conte si profondément russe tout en le rendant proche de nous. Il est vrai que le concept, qui conserve toute son originalité et sa pertinence, parle beaucoup à notre époque : l’autisme, l’imaginaire, la solitude. Impossible de les oublier après les avoir vus : les costumes aux couleurs pastels qu’Elena Zaytseva a imaginés pour tous ces personnages ressemblant à d’amusantes poupées constituent un pur ravissement. Ils s’insèrent admirablement dans la scénographie lorsqu’apparaissent les vidéos d’animation imaginées dans l’esprit de ces illustrations typiquement russes, comme celles d’Ivan Bilibine.


Nous admirons aussi, une fois plus, la direction d’acteur, preuve que Dmitri Tcherniakov demeure bien plus qu’un créateur d’images. Le charme de cette scénographie pleine de finesse et d’humour agit donc encore, avec le tonneau pris dans les flots, l’apparition de la Princesse-Cygne, le surgissement de la cité de Ledenetz, le – fameux – vol du bourdon qui taquine les sœurs et Babarikha, autant d’excellentes idées d’utilisation de la vidéo, quatre ans plus tard. Avec le recul, toutefois, les traits autistiques de Guidon paraissent un peu trop caricaturalement prononcés, surtout à la fin qui tire un peu en longueur, moins à cause du jeu des interprètes que de la tournure du livret au terme duquel Tcherniakov opte pour une teneur douce‑amère qui nous avait un peu échappé la première fois.


La Monnaie a réuni la même distribution avec des chanteurs russes et ukrainiens, ce qui revêt aujourd’hui une signification particulière. La représentation témoigne de l’étroite connivence entre les interprètes, en particulier entre Bogdan Volkov et Svetlana Aksenova. Lui reprend avec un jeu scénique sensible et un chant d’une grande finesse le personnage de Guidon, un véritable rôle de composition dans cette mise en scène. Elle séduit à nouveau en Militrisa, une figure tendre et sensible pour laquelle la soprano met au service un art du phrasé et de l’expression irréprochable.


Ante Jerkunica, fort présent à la Monnaie cette saison, pour L’Or du Rhin cet automne et pour La Walkyrie cet hiver, se montre toujours aussi sobre et juste en Saltan qui ne manque pas d’impressionner par sa voix grave. Toujours aussi convaincantes, Stine Marie Fischer et Bernarda Bobro reprennent Tkatchikha et Povarikha, aux côtés de la vénérable Carole Wilson qui campe, avec truculence et un métier qui ne doit plus être prouvé depuis longtemps, une Babarikha au mauvais caractère. Nous tombons plus aisément cette fois sous le charme d’Olga Kulchynska, parfaite de voix et de présence, en Princesse-Cygne. Les autres rôles sont bien tenus, avec même le retour discret de Nicky Spence, lui si formidable en Loge en octobre.


Emmené avec vigueur et imagination par Timur Zangiev, qui dirige pour la première fois à la Monnaie, l’orchestre charme par ses splendides sonorités. Le chef délivre une lecture intense et chaleureuse de cette partition remarquablement rendue dans tous ses détails et son éclat. Nous souhaitons enfin souligner davantage la contribution absolument remarquable des choristes dont les interventions participent à l’attrait de cet ouvrage. Quant à la conclusion, elle reste identique : que la Monnaie monte sans plus tarder La Légende de la ville invisible de Kitège.



Sébastien Foucart

 

 

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