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Sobriété et détails

Geneva
Grand Théâtre
12/13/2023 -  et 15, 17*, 19, 21, 23, 26 décembre 2023
Richard Strauss : Der Rosenkavalier, opus 59
Maria Bengtsson (La Maréchale), Michèle Losier (Octavian), Matthew Rose/Wilhelm Schwinghammer* (Le Baron Ochs von Lerchenau), Bo Skovhus (Monsieur de Faninal), Mélissa Petit (Sophie de Faninal), Giulia Bolcato (Demoiselle Marianne Leitmetzerin), Thomas Blondelle (Valzacchi), Ezgi Kutlu (Annina), Omar Mancini (Un ténor italien), Stanislas Vorobyov (Un commissaire de police), William Meinert (Un notaire), Denzil Delaere (Un aubergiste), Louis Zaitoun (Le majordome de la Maréchale), Marin Yonchev (Le Majordome de Faninal), Rémi Garin (Un marchand d’animaux), Iulia Elena Surdu (Une modiste), Mayako Ito, Elise Bédenès, Vanessa Laterza (Trois orphelines), Josè Pazos, Georgi Stredkov, Peter Baekeun Cho, Igor Gnidii (Laquais de la Maréchale, Garçons d’auberge), Seong Ho Han (Quatrième garçon d’auberge), Vladimir Kazakov, Aleksandar Chaveev, Dimitri Thikonov (Hommes de Lerchenau), Sebastià Peris (Un policier)
Chœur du Grand Théâtre de Genève, Maîtrise du Conservatoire Populaire de Genève, Alan Woodbridge (direction des chœurs), Orchestre de la Suisse Romande, Jonathan Nott (direction musicale)
Christoph Waltz (mise en scène), Annette Murschetz (décors), Carla Teti (costumes), Franck Evin (lumières)


(© Magali Dougados)


En 2013, alors qu’il dirigeait l’Opéra des Flandres, Aviel Cahn, actuel directeur du Grand Théâtre de Genève, était à la recherche d’un « coup » en matière de mise en scène. Il pense alors à Christoph Waltz, dont il sait qu’il a toujours été très attiré par l’opéra. Par l’intermédiaire d’un ami commun, il prend contact avec l’acteur germano-autrichien, inoubliable et sadique colonel SS dans le film Inglorious Basterds de Quentin Tarantino, pour lui proposer de faire ses débuts lyriques en mettant en scène Le Chevalier à la rose de Richard Strauss. Le célèbre acteur accepte sans hésiter une seconde. Dix ans plus tard, après avoir dans l’intervalle mis en scène Falstaff et Fidelio, il reprend à Genève sa production du Rosenkavalier. Comme on pouvait s’y attendre de la part d’un comédien, Christoph Waltz a particulièrement soigné la direction d’acteurs, avec des gestes, des mouvements et des regards réglés au cordeau. Mille et un détails soulignent la richesse de la caractérisation des personnages, par exemple l’embarras et l’émotion clairement perceptibles chez Octavian et Sophie lorsqu’ils se rencontrent pour la remise de la rose. L’intrigue est parfaitement lisible et compréhensible ; elle se déroule dans un décor unique des plus sobres : une pièce délimitée sur trois côtés par des parois blanches, avec à peine quelques accessoires (un lit à baldaquin pour le premier acte, quelques fauteuils pour le deuxième, des tables et des chaises pour le dernier). Christoph Waltz a clairement axé son travail sur la psychologie des personnages et les subtiles interactions entre eux. Le spectacle est rehaussé par les splendides costumes de Carla Teti, traditionnels et modernes tout à la fois, à l’instar de la production. Un célèbre joaillier genevois a prêté plusieurs bijoux portés par la Maréchale et Sophie et a créé spécialement la fameuse rose, sertie de rubis et de diamants noirs, apportant une touche glamour au spectacle. Une production épurée et détaillée, claire et intelligente, les mélomanes genevois sont gâtés pour les fêtes de fin d’année.


D’autant que la distribution vocale réunie sur le plateau du Grand Théâtre est de haut niveau et parfaitement homogène. Elle est menée par l’Octavian passionné et à la forte présence scénique de Michèle Losier, avec une voix très bien projetée et un superbe legato. En Sophie ingénue et tendre, Mélissa Petit fait merveille avec sa voix claire et lumineuse, ses aigus atteints avec une facilité déconcertante et ses vocalises susurrées. Maria Bengtsson incarne une Maréchale élégante et au port altier, intériorisée et sensible, dont le chant délicat exprime bien les tourments de la vie, quand bien même il manque quelque peu de volume. Les voix des trois femmes se marient idéalement dans le magnifique trio final. Pour une fois, le baron Ochs n’est pas la caricature du vieil aristocrate vulgaire et libidineux puisqu’il est incarné ici par un Wilhelm Schwinghammer à la silhouette élancée et fine ainsi qu’à la noble prestance ; l’interprète séduit aussi par son chant raffiné et bien conduit. Malgré l’usure de la voix, Bo Skovhus est un Faninal de belle allure, tant scéniquement que vocalement. Les très nombreux rôles secondaires sont tous excellents, à commencer par les irrésistibles Valzacchi et Annina chantés respectivement par Thomas Blondelle et Ezgi Kutlu, sans oublier le chanteur italien d’Omar Mancini, accoutré comme Farinelli, avec casque et plumes. Le seul (léger) bémol de la soirée vient de la direction musicale de Jonathan Nott, à la tête de l’Orchestre de la Suisse Romande : l’interprétation est parfois brouillonne et pas toujours précise (des répétitions supplémentaires auraient été bienvenues), mais globalement l’orchestre ne manque ni de soyeux ni de légèreté. Un spectacle de fêtes idéal, ou presque.



Claudio Poloni

 

 

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