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Un enchantement visuel

Prague
Státní opera
10/28/2023 -  et 29* octobre, 3, 11, 12 novembre (Praha), 7, 9, 10, 12, 13, 14, 15, 16, 17 décembre (Torino) 2023
La Belle au bois dormant
Márcia Haydée (chorégraphie, d’après Marius Petipa, et mise en scène), Piotr Ilyitch Tchaïkovski (musique)
Ayaka Fujii*/Irina Burduja (Aurore), Patrick Holecek*/Federico Levoli (Désiré), John Powers*, Danilo Lo Monaco (Carabosse), Nana Nakagawa*/Nina Fernandés (Fée des Lilas), Radek Vrátil (Le Roi Florestan), Miho Ogimoto (La Reine), Mathias Deneux*/Alexey Afanasiev (Le maître de cérémonie Catalabutte), Romina Contreras*/Haruka Iguchi (Fée de la Beauté), Nina Fernandés*/Alexandra Pera (Fée de la Sagesse), Olga Bogoliubskaia*/Martelle Cho (Fée de la Grâce), Federica Bona*/Noemi Boisnon (Fée de l’Eloquence), Evgeniya Victory Gonzalez*/Aya Okumura (Fée de la Force), Jakub Groot*/Sami Gossart (Prince de l’Est), Daniel Leger*/Fraser Roach (Prince de l’Ouest), Danilo Lo Monaco*/Robert Jerjen (Prince du Nord), Oleg Ligaj*/Paul Tudor Moldoveanu (Prince du Sud), Maéj Sust*/Oleg Ligaj (Ali Baba), Haruka Iguchi*/Nana Nakagawa (Rubis), Martelle Cho*/Diana Alonso (Saphir), Nina Fernandés*/Theodora Lehu (Emeraude), Federica Bona*/Alexandra Pera (Topaze), Kristyna Némecková*/Giusi D’Angelo (Le Chat blanc), Marco Piraino*/Jonás Dolník (Le Chat botté), Alexandra Pera*/Aya Okumura (Princesse Florine), Robert Jerjen*/Roger Duart (L’Oiseau bleu), Alice Petit*/Anna Novotná (Le Petit Chaperon rouge), Paul Tudor Moldoveanu*/Veaceslav Burlac (Le Loup), Sarah Schäfer*/Anna Dal Costello (Blanche‑Neige), Balet Národního divadla
Orchestr Státní opery, Václav Zahradník (direction musicale)
Jan Dörner (lumières), Pablo Núnez (décors, costumes)


(©  Serghei Gherciu)


Il est finalement peu de productions qui sonnent comme une évidence, vous laissant littéralement sonné et ravi tout au long du spectacle : ainsi de La Belle au bois dormant imaginée en 1987 par Márcia Haydée pour le Ballet de Stuttgart et reprise depuis comme une traînée de poudre à travers le monde. D’emblée, l’ancienne danseuse étoile brésilienne affiche son intention de donner davantage d’épaisseur dramatique au livret du deuxième ballet (1889) de Tchaïkovski : l’ajout d’un rôle comique confié au Maître de cérémonie, farfelu et autocentré, permet de se délecter de plusieurs saynètes piquantes en arrière‑plan, parallèlement aux scènes dansées. Ce personnage, interprété par un désopilant Mathias Deneux, permet ainsi d’offrir quelques moments de respiration dans l’alternance un rien répétitive de divertissements dansés au début, en brossant subtilement la frivolité et l’insouciance des puissants, avant l’arrivée de Carabosse. Si l’on est peu sensible à cet humour cocasse, il est possible de ne pas prêter attention à cette « mouche du coche », qui ne prend jamais le pouvoir sur l’action principale.


Toujours attentive aux moindres détails de l’inflexion musicale, Haydée parvient à tisser un récit plus fourni entre les différents personnages, notamment lors de la ronde des quatre prétendants d’Aurore, qui rivalisent d’attention à son égard. La scène du quadruple baiser, puis du quadruple salut, donne à voir toute l’imagination de la chorégraphe dans l’exploration géométrique de l’espace, autour de nombreuses entrées symétriques à contretemps, à l’élan virevoltant. C’est là l’occasion de démontrer toute la virtuosité technique ébouriffante d’Ayaka Fujii en Aurore, très touchante, avant son duo de grande classe avec le Prince engagé de Patrick Holecek.


Le rôle de Carabosse est renforcé par la présence physique de John Powers, qui s’impose par son envergure aux bras démesurés, embrassant tout l’espace autour de lui, aussi bien horizontalement que verticalement. Dans un premier temps, sa danse mi‑sensuelle mi‑inquiétante balaye ses rivaux un à un, au moyen de sa sinistre cape noire : c’est là un fil rouge merveilleusement réutilisé ensuite, que ce soit dans le jeu avec le rideau de scène pour épier Aurore grandissante, ou dans la confrontation aérienne et mouvante entre ses sbires et le Prince. Pour autant, cette agitation n’a aucun effet sur la Fée des Lilas, qui réduit l’aura maléfique par une autorité sereine et confiante, sans artifices ni effets. L’interprétation de Nana Nakagawa dans ce rôle est ainsi un modèle de grâce lumineuse, sans aucune ostentation.


La dernière partie du spectacle est tout aussi réussie, en emportant le spectateur dans un festival de couleurs, à l’esprit bon enfant lors de la présentation des différents personnages de contes de fée. L’alternance de moments gracieux (splendide Oiseau bleu) et de passages comiques (entre Blanche‑Neige et ses sept « enfants nains » ou encore l’hilarant duo des chats) donnent une vitalité toujours soutenue.


Enfin, on se délecte tout du long de la mise en place « naturelle » du moindre élément de décor, le tout s’insérant naturellement dans le mouvement chorégraphique d’ensemble. Que dire, aussi, de l’exceptionnelle inventivité des costumes, qui osent des couleurs et matières inattendues (entre pastels, fleurs et dentelles), avec un goût exquis. De quoi ressortir avec des étoiles pleins les yeux, et ce d’autant plus que la direction de Václav Zahradník (hormis un début un peu trop vif) est un régal d’inventivité narrative, tout en fouillant les détails de la partition avec beaucoup d’esprit et de finesse.



Florent Coudeyrat

 

 

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