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Embrouillamini à Napoli

Lausanne
Opéra
10/06/2023 -  et 8, 11, 13, 15 octobre 2023
Gioachino Rossini : Il turco in Italia
Luis Cansino (Selim), Salome Jicia (Donna Fiorilla), Giulio Mastrototaro (Don Geronio), Francisco Brito (Don Narciso), Mikhail Timoshenko (Prosdocimo), Marion Jacquemet (Zaida), Pablo Plaza (Albazar)
Chœur de l’Opéra de Lausanne, Antonio Greco (préparation), Orchestre de Chambre de Lausanne, Michele Spotti (direction musicale)
Emilio Sagi (mise en scène), Javier Ulacia (assistant à la mise en scène), Daniel Bianco (décors), Pepa Ojanguren † (costumes), Nadia Balada (assistante aux costumes), Eduardo Bravo (lumières)


(© Jean-Guy Python)


Pour l’ouverture de sa dernière saison à la tête de l’Opéra de Lausanne, Eric Vigié a choisi de programmer Il turco in Italia de Rossini. Créé en 1814 à Milan, alors que le compositeur avait à peine 22 ans, l’ouvrage ne remporte qu’un succès mitigé. On est bien loin du triomphe de L’Italienne à Alger, une année plus tôt à Venise, auquel Le Turc en Italie est souvent comparé. Après quelques représentations en Italie puis à Londres et à New York, l’œuvre tombe dans l’oubli dès 1855. Un très long oubli puisqu’elle ne sera exhumée qu’en 1950, avec dans le rôle féminin principal une certaine Maria Callas, qui fera pour l’occasion la démonstration éclatante – mais rare – de sa veine comique. Ce purgatoire de près d’un siècle explique sans doute pourquoi l’ouvrage ne connaît toujours pas aujourd’hui le succès d’autres œuvres du Cygne de Pesaro.


Il turco in Italia raconte l’histoire d’un pacha, Selim, qui débarque à Naples et tombe instantanément amoureux de Fiorilla, une jeune femme frivole et sensuelle qui accumule les conquêtes, n’en déplaise à son mari Don Geronio et à son amant Don Narciso. Durant son séjour napolitain, Selim croise Zaida, une esclave qui avait vécu dans son harem. Constatant que celle‑ci a encore des sentiments pour lui et que, réciproquement, il en a aussi pour elle, il décide finalement de repartir en Turquie avec elle.


Le metteur en scène Emilio Sagi – un fidèle de l’Opéra de Lausanne – a transposé l’action dans les années 1950, sur une place d’une ville italienne qui pourrait être Naples. Il a su très habilement recréer l’atmosphère animée de la vie de tous les jours avec force détails : des ruelles étroites, des étals de marché, du linge suspendu aux fenêtres, une trattoria avec ses tables et ses chaises et une nuée de bicyclettes et de vespas, sans oublier un tram. Des clichés de carte postale, certes, mais de bon goût, avec pour résultat un spectacle parfaitement fluide, haut en couleur et particulièrement vivant, grâce aussi aux costumes bariolés des protagonistes et des choristes. Le metteur en scène a clairement privilégié les tableaux d’ensemble à la caractérisation des personnages, ne ménageant aucun temps mort, si bien qu’on ne s’ennuie pas une seule seconde.


A la tête de l’Orchestre de chambre de Lausanne, le jeune chef Michele Spotti aborde l’Ouverture de manière particulièrement vive et alerte. Par la suite, le maestro n’aura de cesse de souligner les couleurs, les nuances et les contrastes de la partition, offrant une lecture virevoltante et dynamique de l’ouvrage, avec un sens évident de la théâtralité. La distribution réunie sur le plateau de l’Opéra de Lausanne fait preuve d’une belle cohésion. Elle est emmenée par Giulio Mastrototaro, qui se délecte avec brio des longues tirades de Don Geronio, mari cocu mais terriblement attachant. Dans le rôle du poète Prosdocimo, qui s’inspire de la vie quotidienne des personnages pour écrire sa prochaine pièce, Mikhail Timoshenko fait forte impression avec son indéniable présence scénique et son timbre bien projeté. Si son chant manque quelque peu de raffinement, Luis Cansino campe un Selim cocasse et extravagant. Malgré son timbre nasal, Francisco Brito incarne un Don Narciso des plus pétillants. Dans le rôle redoutable de Fiorilla, Salome Jicia séduit par ses vocalises précises et acérées, quand bien même les aigus sont parfois stridents. Au rideau final, le public fait une véritable ovation à tous les participants au spectacle. Dommage cependant qu’un grand nombre de fauteuils soient restés vides pour cette soirée d’ouverture. Les absents ont eu tort, comme toujours.



Claudio Poloni

 

 

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