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Summertime

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Almada (Couvent des capucins)
05/28/2023 -  
Hector Berlioz, Johannes Brahms, Erich Wolfgang Korngold, Alban Berg, Joseph Marx, Alma Mahler, Xavier Montsalvatge et George Gershwin : Mélodies, lieder et songs
Deniz Uzun (mezzo-soprano), David Santos (piano)


D. Santos, D. Uzun (© Emmanuel Andrieu)


Le Festival de Música dos Capuchos à Almada au Portugal (de l’autre côté du Tage, en face de Lisbonne) monte en puissance et gagne en rayonnement depuis qu’il a été repris il y a deux ans par le pianiste portugais Filipe Pinto-Ribeiro, avec la venue d’ensembles et d’artistes de renommée toujours plus internationale. Ce fut le cas avec le concert d’ouverture du festival qui mettait à l’affiche le Quatuor Hermès (jeudi 25 mai), tandis que jusqu’au 23 juin se produiront des artistes et orchestres de l’envergure d’I Solisti Veneti (le 27 mai), de la pianiste danoise Marianna Shirinyan (le 10 juin), de Stephen Kovacevich (le 17 juin), de l’Orchestre de chambre Franz Liszt de Budapest (le 18 juin), et de bien d’autres.


Et pour la troisième édition du festival placé sous sa houlette, le pianiste et directeur artistique – il dirige également le Verao Musical de Lisbonne, qui a lieu en juillet et le Festival international de Musique de Bragance, qui se déroule en octobre – produit toujours les concerts dans le lieu « historique » du festival, une belle salle aménagée à l’intérieur du Couvent des capucins (« Convento dos Capuchos »), mais aussi – et pour la première fois – dans les murs du Théâtre municipal Joaquim Benite, dans le centre historique d’Almada, pour mieux ancrer le festival dans la ville, le Couvent des capucins étant, quant à lui, un peu excentré, sur une colline, face à la fameuse plage de Caparica). C’est dans ce nouveau lieu, en présence de la maire de la ville, que se produisaient, la veille, les fameux Solisti Veneti, accompagnés par la mezzo ukrainienne Lena Belkina, pour un concert axé essentiellement sur Vivaldi, tandis qu’en ce dimanche 28 mai, le concert avait lieu dans le monastère, pour un récital mettant à l’affiche la mezzo allemande (d’origine turque) Deniz Uzun et entièrement consacré à l’été, à travers les plus beaux mélodies et lieder célébrant cette saison propice aux élans passionnés et aux langueurs amoureuses.


D’abord didactiquement présentée (en langue vernaculaire) par l’accompagnateur de la soirée, le pianiste portugais (basé à Berlin) David Santos, la soirée débute avec peut‑être les plus connues de toutes les mélodies « estivales », les célèbres Nuits d’été de Berlioz, dont elle interprète dans un premier temps les deux premiers chants, « Villanelle » et « Le Spectre de la rose », avant de les entrecouper par des lieder allemands dont le mot Sommer figuré dans l’intitulé, pour finir par « Sur les lagunes » et « L’Ile inconnue », deux autres des six mélodies du cycle berliozien, qui concluent ici la première partie du concert. Dans un français impeccable, sans la moindre pointe d’accent germanique, cette chanteuse que nous ne connaissions pas fait office de révélation : à son aise dans tous les registres, elle sait mettre sa voix très homogène, au beau timbre rond et sombre à la fois, au service de l’expression, fine et sensible, assortie de très belles intentions musicales, entre ombres et lumières au fur et à mesure des climats qui se succèdent. Et dans sa propre langue, celle de Goethe, au travers du Sommerabend de Brahms, des Sommertage de Berg, ou encore du Laue Sommernacht d’Alma Mahler, le texte ressort avec encore plus de précision, pour une implication impeccable, et outre une magnifique partie mezzo, elle y étale, pour notre plus grand bonheur, les sombres couleurs de sa partie grave, quand la nostalgie et la langueur l’emportent sur tout le reste.


Et dans une seconde partie, après le français et l’allemand, c’est avec la même aisance et réussite qu’elle s’exprime dans les langues de Cervantès puis Shakespeare, avec d’abord les rares Cinq Chansons nègres (1945) de Montsalvatge (1912‑2002), ce cycle du compositeur catalan qui voulait rendre hommage à l’île de Cuba et aux rythmes afro‑cubains dont nombre d’émigrants avaient atterri sur les côtes catalanes à la fin du XIXe siècle. On peut compter sur le tempérament explosif de la mezzo et sur sa sensualité à fleur de peau pour faire un sort à ces pièces aussi rares qu’envoûtantes, et qui en tout cas font un bel effet sur le public lusophone qui lui fait un bel accueil à la fin du recueil. Et c’est avec quatre songs de Gershwin que se termine la soirée, les célèbre The man I love ou Summertime, ici aussi délivrés avec beaucoup de sensualité et de charme, et en interprétant ces « tubes » de manière violemment syncopée, ce qui permet à l’artiste de vous agripper, pour ne plus vous lâcher, dès les premières mesures. Mais on leur préfère le plus rare Vodka, que Deniz Uzun chante en ayant l’air totalement saoule, avec un humour et une autodérision ravageurs, en insistant sur le mot « vodka » qu’elle prononce à chaque fois avec un fort accent russe, redoublant l’effet comique de cet air, pour lequel elle sort de sa réserve pour nous gratifier de tous ses talents de comédienne. Du coup, c’est sur une scène d’opéra que l’on rêve de l’entendre maintenant, alors qu’elle s’envolait justement le lendemain pour Budapest et son festival Wagner, où elle interprètera les rôles de Fricka et Waltraute dans la Tétralogie. Et bravo, enfin, au pianiste David Santos, qui soutient sa collègue cantatrice aussi chaleureusement qu’indéfectiblement durant tout le concert.


On languit maintenant de revenir pour le concert de clôture du festival qui, le 18 juin au Théâtre Municipal d’Almada, proposera les (également) rares American Four Seasons (2009) de Philip Glass. Le concert sera dirigé du piano par Filipe Pinto‑Ribeiro, aux côtés du violoniste Jack Liebeck, avec l’Orchestre de chambre Franz Liszt de Budapest – rien de moins pour cette création de l’ouvrage au Portugal.


Le site du Festival de musique des Capucins



Emmanuel Andrieu

 

 

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