About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Impressionnant

Paris
Philharmonie
03/11/2023 -  et 13 (Luxembourg), 16 (Hamburg) mars 2023
Gabriella Smith : Tumblebird Contrails
Serge Rachmaninov : Concerto pour piano n° 3, opus 30
Béla Bartók : Concerto pour orchestre, BB 123

Yuja Wang (piano)
San Francisco Symphony, Esa‑Pekka Salonen (direction)


E.‑P. Salonen, Y. Wang (© Alexandre Wallon/Cheeese)


La salle Pierre Boulez était comble ce soir pour le second programme de l’orchestre symphonique de San Francisco en tournée européenne, et ce sans doute grâce à la présence à l’affiche de Yuja Wang.


Que dire de la pièce de Gabriella Smith qui débutait ce programme ? Composée et créée en 2014 sous la direction de Marin Alsop, elle est inspirée des bruits de l’océan mais ressemble à beaucoup d’autres pièces contemporaines. Elle se déploie tel un mouvement lent sans vraie structure débutant dans un pianissimo, rapidement suivi d’un crescendo avant un descrescendo final. La seule originalité réellement perceptible est l’utilisation atypique de certains instruments – on pense aux violoncellistes tapotant leurs instruments ou aux cors qui tentent d’imiter le bruit de la mer. C’est insuffisant pour faire de cette pièce une œuvre marquante, même sous la direction précise d’Esa‑Pekka Salonen.


Place ensuite à la star de la soirée, la pianiste chinoise Yuja Wang, dont l’entrée se fait un peu attendre. Au programme, le Troisième Concerto de Rachmaninov, dont la réputation d’extrême difficulté date de la création par le compositeur, qui ne put proposer un bis à l’issue de la première à New York en 1909 tellement ses doigts avaient souffert. La prestation de Yuja Wang est très impressionnante. Dès son entrée, on sent que l’on va vivre un moment passionnant. La technique est stratosphérique et pas une note ne manque à l’appel, mais il y bien heureusement plus que cela. L’émotion qu’elle parvient à créer dans les passages retenus, la puissance des moments plus extravertis comme la connexion avec l’orchestre sont exemplaires. La partie orchestrale est assez sobrement dirigée par Esa‑Pekka Salonen, ce qui permet de percevoir au mieux l’infinie richesse de cette musique et de son orchestration. Quant à l’équilibre entre le piano et l’orchestre, il est ce jour tout simplement idéal. En bis, Yuja Wang propose un extrait du Voyage d’hiver de Schubert et la fameuse mélodie d’Orphée et Eurydice de Gluck arrangée par Sgambati que jouait si souvent le regretté Nelson Freire. Tous deux sont joués avec une poésie qui laisse le public suspendu.


Après l’entracte, le public tarde à revenir en salle, ce qui impose à Salonen et à ses musiciens déjà prêts sur scène de patienter, ce qu’ils font avec beaucoup d’humour. Le Concerto pour orchestre de Bartók est lui aussi sur les cimes. On sait que le chef finlandais connaît cette musique comme personne et qu’elle lui va bien. L’introduction d’abord angoissante puis joyeuse, l’Allegretto entamé à la caisse claire par un percussionniste debout au milieu de ses collègues, l’« Elégie » qui évoque tant Le Château de Barbe‑Bleue, l’Allegretto presque champêtre puis grotesque (glissandi des cuivres) et le presto final mené à un tempo rapide impressionnent tous, tant la maîtrise du discours et la conduite orchestrale sont efficientes et en situation. L’Orchestre symphonique de San Franciscomontre, sans doute plus encore que dans Rachmaninov, ses incroyables qualités : cuivres brillants sans être agressifs, bois chantants, cordes homogènes sans oublier les deux harpes qu’on n’a sans doute jamais aussi bien entendues et une percussion présente, d’une précision sans faille. S’ajoute à ces qualités techniques une transparence du jeu qui permet de percevoir chaque ligne de cette fascinante et si riche musique.


Un Prélude de l’acte III de Lohengrin de Wagner aux cuivres saisissants achève cette soirée décidément rare. Incroyable concert donc, par une pianiste hors du commun, un des plus grands chefs du moment et un orchestre qui n’a rien à envier aux grands orchestres américains de la côte Est.



Gilles Lesur

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com